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David Chung et Yannick Casquette, ordonnés prêtres le 8 décembre
Touchés par la grâce de la persévérance
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David Chung et Yannick Casquette, ordonnés prêtres le 8 décembre
Touchés par la grâce de la persévérance
Dans la Bible, il est dit que Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, Jésus, en sacrifice pour sauver les hommes. Mais il y est aussi très clair que Dieu laisse les hommes libres de leurs choix. David Chung et Yannick Casquette, deux jeunes quadras, ont exercé ce libre choix, s’éloignant parfois de leur élan naturel d’entrer dans les ordres. En fin de compte, touchés par la grâce de la persévérance, ils ont compris que pour être totalement libres et pleinement heureux, la voie à suivre pour eux était la prêtrise. Leurs portraits en marge de leur ordination comme prêtres diocésains, le dimanche 8 décembre, au Thabor.
David Gilles Chung Sum Wah, 43 ans, a longtemps coché toutes les cases du «jeune homme bien comme il faut». Malgré son statut d’enfant unique, ce fils de fonctionnaires aujourd’hui à la retraite et vivant à Baie-du-Tombeau n’était pas un enfant gâté. Il devait mériter tout ce qu’il avait. «Mes parents, qui n’étaient pas fortunés, se sont toujours souciés de me donner ce dont j’avais besoin, mais pas nécessairement ce dont j’avais envie», précise-t-il. Ainsi, par exemple, pour obtenir le cadeau de Noël désiré, il devait avoir de bons résultats scolaires.
Il s’est également conformé au vœu de sa grand-mère maternelle, qui répétait à ses petits-enfants que, pour leur offrir Rs 10 000 en fin de cycle primaire, les filles devaient impérativement être admises au Queen Elizabeth College, et les garçons au Collège Royal de Port-Louis (RCPL). Après une scolarité à la Raoul Rivet Government School et une année de préparation au Certificate of Primary Education (CPE), marquée par un bourrage de crâne qu’il qualifie de «l’année la plus stressante de ma vie», il se classe 82e à l’examen et fait son entrée au RCPL.
Il est très proche de sa mère, Marie-Josée, avec qui il partage une foi vive depuis l’enfance. «Elle m’emmenait à la messe tous les week-ends. Je n’en ai pas le souvenir, mais il paraît qu’à l’âge de cinq ans, je lui ai demandé de m’apprendre à prier», raconte-t-il. Bien que son père, Maxime, ne soit pas baptisé, celui-ci a toujours laissé son épouse et son fils libres de pratiquer leur religion. Au RCPL, David reste studieux mais relâche un peu ses efforts en Form V, n’obtenant pas les résultats escomptés par sa famille élargie.
Au cours de sa scolarité secondaire, il découvre le premier exemple vivant d’une vocation en la personne de son enseignante de Social Studies et de sociologie, Mme Lallah, qui, précise-t-il, «avait un intérêt pour chaque élève et avait à cœur leur épanouissement. Elle allait well beyond her scheme of duties». Si bien que lorsqu’il choisit ses matières pour la Form VI afin de concourir pour la bourse d’État, soit les mathématiques, l’économie et la comptabilité, elle vient le voir et lui demande de laisser tomber une de celles-là pour opter pour la sociologie «car elle disait que j’en sortirai gagnant, les élèves et elle aussi.» Il se donne un temps de réflexion et finit par accepter. Pour son Higher School Certiticate, il obtient au final un A en mathématiques, un B en économie et un C en sociologie, tout en se classant au niveau national en langue française comme matière subsidiaire.
400 coups à Singapour
Voulant à tout prix faire des études supérieures à l’étranger, il pense d’abord aller à Montpellier, en France, pour obtenir un diplôme d’études universitaires générales en mathématiques appliquées et sciences sociales, mais la montée du Front national refroidit sa famille. Il obtient son admission à la National University of Singapore, où le gouvernement de l’époque finance deux tiers des études des étudiants étrangers à condition qu’ils travaillent pendant trois ans pour l’économie singapourienne. Ses parents contractent un emprunt pour financer la majorité du tiers restant, et c’est ainsi que David part pour Singapour, où il opte pour un Bachelor of Arts en psychologie et en Information and Communications Management.
Tout en étudiant, il se lâche et fait «les 400 coups». Son diplôme obtenu, le contexte de récession économique ne se prête pas à l’embauche. Il cumule donc de petits boulots – copy-boy, videur pour boîtes de nuit («à l’époque, j’étais baraqué»), interprète de l’anglais au français – avant d’être embauché à plein temps dans le département des ressources humaines d'une usine de Toshiba. Il est ensuite recruté comme consultant en branding et en management pour une entreprise singapourienne, et finalement comme Project Manager pour une multinationale américaine basée à Singapour.
Tout au long des huit années qu’il passe dans ce pays, David va régulièrement à la messe. Et comme à chaque fois il sonde les étudiants mauriciens pour savoir qui l’accompagnera à l’église, on finit par lui attribuer le sobriquet de «David monper». C’est aussi dans ce pays qu’il commence à s’interroger à propos de sa foi et, voulant l’approfondir, il suit des sessions de formation animées par un prêtre. Un jour, alors qu’il assiste à l’une d’elles, le prêtre évoque le manque de vocations sacerdotales, soulignant que les prêtres sont vieillissants, et exhorte ceux dans l’assistance à répondre à l’appel de Dieu. David se retient pour ne pas se lever et se porter volontaire. «C’était un élan vrai et sincère.»
Il se sent tiraillé. «J’ai réalisé que je portais en moi ce désir de suivre le Christ en tant que prêtre mais en même temps, j’avais aussi le désir d’avoir une carrière et de fonder une famille.» Lors de vacances à Maurice, il s’en ouvre au prêtre de sa paroisse, le père Robert Bathfield, aujourd’hui décédé, qui le connaît depuis qu’il a 16 ans. «Il m’a fait comprendre que l’on peut très bien vivre sa vocation de baptisé en étant un bon travailleur et un bon époux.» Soulagé, il repart et continue à s’amuser, ayant des petites amies, mais «pour X raison, ça ne marche pas».
Il regagne Maurice pour de bon en janvier 2008 et, à partir de là, sa carrière prend un autre essor. Après un court passage comme assistant du Managing Director à Gamma Civic, où il sent qu’il n’est pas à sa place, il intègre le secteur bancaire, dont le cadre réglementaire lui correspond mieux. Il passe six ans dans trois différentes banques, où sa progression est remarquable, car il est nommé Head of Cash Management, ne traitant qu’avec des clients corporate. En apprenant qu’il est diplômé en psychologie, certains de ses collègues le consultent par rapport à leur vie personnelle, et il répond toujours bienveillamment aux sollicitations. Il a un salaire plus qu’attrayant et peut se permettre de socialiser, voire d’envisager une vie à deux. Or, plus il gagne de l’argent, s’amuse et mord la vie à pleines dents, entrant dans le moule social, plus il sent «le vide» dans sa vie.
Un objet ne le quitte pas, et il l’emmène même à la banque : c’est le Nouveau Testament que lui a offert son institutrice pour sa première communion. Il le consulte régulièrement, et à un moment, il tombe sur une phrase qui le secoue. Celle-ci dit : «Que sert-il à un homme de gagner le monde s’il y perd son âme ?» «Je sentais que c’était ce qui m’arrivait.» Des mois plus tard, une autre phrase tirée du Nouveau Testament l’ébranle par sa clarté : «On ne peut pas servir deux maîtres à la fois, c'est Dieu ou l’argent.»
Dieu inexistant à la banque
David réalise alors que «Dieu n’existe pas à la banque. Le Dieu à la banque, c’est l’argent. La banque ne connaît qu’une logique, et c’est la profitabilité. Comment expliquer qu’en période de récession économique majeure, les entreprises financières engrangent des profits en hausse ? Cela dénote des pratiques financières étranges, pour dire le moins», Sentant qu’il ne peut plus faire l’autruche et continuer à répondre aux attentes mondaines de la société, qui, au final, ne le rendent pas heureux, il décide de répondre à l’appel de la prêtrise, ressenti une première fois en 2001 et qui revenait le titiller de temps à autre.
En 2013, il prend alors le temps pour discerner sa vocation et contacte le père Jean Michaël Durhône, aujourd’hui évêque de Port-Louis, et à l’époque responsable des vocations. David suit le programme Zezi Vre Zom et, lors d’une retraite avec six hommes qui savent seulement qu’il est haut cadre dans une banque, ces derniers lui demandent s’il n’a jamais envisagé la prêtrise. Surpris, il répond par la négative. Quelque part, il espère encore que les prêtres qu’il côtoie dans son discernement lui diront qu’il n’a pas la vocation d’être prêtre. Or, «le Seigneur a une façon bien particulière de nous faire des clins d’œil», raconte-t-il.
Voulant en savoir plus sur le charisme des Jésuites, il va suivre une retraite non résidentielle à St Ignace en bermuda, t-shirt et savates aux pieds. Il s’assoit au fond de la salle et, à côté de lui, se trouvent Monique et Pierre Dinan. Sans avoir échangé avec eux par rapport à son discernement, à la fin, Monique Dinan l’approche et lui dit spontanément qu’il lui rappelle le Christ lorsque celui-ci a commencé sa mission. David tombe des nues.
Il demande à prendre un temps de recul lorsqu’en côtoyant des prêtres dans le cadre du processus de discernement, il prend conscience que ce sont des êtres humains avec des qualités mais aussi des failles. Il est tenté de retrouver le secteur bancaire, mais quelque chose au fond de lui l’en empêche. Il fonde une société coopérative dans la paroisse qu’il fréquente toujours, celle de St Malo à Baie-du-Tombeau, pour les personnes qui ne pourront jamais contracter un prêt bancaire par manque de garantie collatérale.
Cette coupure, où il continue toutefois à prier et à aller régulièrement à la messe, dure trois ans. En ayant accompagné plusieurs personnes durant ces trois ans, David finit par se rendre compte que malgré toutes les différences de culture, d’éducation, de statut social, au fond, tous les hommes ont les mêmes désirs et les mêmes questionnements. «L’Esprit Saint est venu me souffler à l’oreille que même les apôtres se chamaillaient entre eux pour savoir qui était le plus grand et que le Seigneur est la patience incarnée.»
Il reprend alors son accompagnement spirituel et fait sa demande d’entrer au séminaire auprès du cardinal Maurice Piat, qui l’accepte. Il part pour le séminaire à Nantes où il passe un an et demi, fait son stage pastoral à Maurice, notamment dans les paroisses de St Sauveur à Bambous et St Cœur de Marie à Petite-Rivière, et repart faire des études au séminaire pontifical de St Bède le Vénérable à Rome, où, pendant quatre ans, il approfondit la philosophie, la théologie, les écritures saintes et le développement humain. Le 14 juin 2023, il devient le premier Mauricien à être ordonné à la Basilique St Paul hors les Murs comme diacre en vue du presbytérat.
Depuis, il se sent heureux et serein. Il n’a pas de crainte par rapport à sa vocation de prêtre. «Si le Seigneur m’appelle à le suivre dans la prêtrise, c’est qu’il va me donner les moyens et toutes les grâces dont j’ai besoin pour exercer ma vocation. Rien ne me fait peur, car Dieu est 100 % à mes côtés. Il a été présent à tous les moments de ma vie. Celle-ci n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, mais les moments difficiles m’ont permis de vérifier la véracité de cet appel.»
David a fait le choix d’être prêtre diocésain pour ne pas être loin de ses parents vieillissants. Mardi après l’entretien, il a confié avoir hâte d’aller en retraite au Foyer de l’Unité à Souillac avec Yannick Casquette. «Il y a une certaine frénésie autour de notre ordination. Il nous faut prendre du recul et take stock du chemin parcouru. Il faut se ressourcer.»
Jovial
Yannick Casquette, 42 ans, est la jovialité même et le non-conformisme. Autant David s’est présenté à la conférence de presse en tenue noire et col romain propre aux prêtres, autant lui était en bras de chemise, sans col romain. «Je l’avais pourtant préparé, mais je l’ai oublié», raconte-t-il en riant. En pensant à leur double ordination du dimanche 8 décembre, ce Curepipien, né d’un père soudeur à son compte et d’une maman qui a travaillé 35 ans comme machiniste d’usine avant d’être cantinière dans un collège, a le sentiment que la boucle entre lui et David est quelque part bouclée. «Quand j’ai commencé le Camp Jonas pour discerner, David était l’animateur et j’étais un des participants. En 2018, j’étais son aîné dans la formation. Il a été ordonné diacre avant moi et m’a accueilli comme diacre le 3 septembre 2023, et c’est avec lui que j’ai commencé mon ministère diaconal. Et le dimanche 8 décembre, on termine ‘la course’ ensemble.»
La religion a toujours occupé une place prépondérante chez les Casquette. Marguerite Marie, la mère de Yannick, aime la prière charismatique, alors que la foi de son père Daniel est plus contemplative. «Il prie trois à quatre fois par jour devant la Vierge.» Et chaque soir avant le dîner, la famille se réunit devant l’oratoire et prie pendant une vingtaine de minutes, faisant le Notre-Père, l’Ave Maria, la prière à Saint Michel Archange, la prière de Saint Benoît, celle de la Sainte Croix de Jésus-Christ. Sans compter les prières pour les intentions de chacun. Et lui, priait comment ? «Je suis assez éclectique. J’ai une foi très posée, mais musicalement c’est Linkin Park (NdlR, groupe de rock alternatif) (rires).» Dans sa paroisse de Sainte-Hélène, il agit d’abord comme enfant de chœur après le CPE au Saint-Esprit RCA, puis il intègre d’autres mouvements d’Église, notamment le service d’écoute. Vu qu’il montre un sens de responsabilité, très tôt, il est nommé responsable des enfants de chœur.
De tous les collèges que son père lui propose, il opte pour le Collège de la Confiance, car il aime l’uniforme blanc et noir. Sans compter que le trajet quotidien le mène loin de chez lui où il lui est possible de déployer ses ailes. Il ne regrette pas son choix et est impressionné par le recteur Daniel Merven, qui, au lieu d’appeler les élèves par leur nom de famille, les appelle par leurs prénoms. En Form VI, il opte pour les mathématiques, la physique, le design et la communication. Et bien qu’il concourt pour une bourse, il ne se donne pas à fond, car il souhaite rentrer au plus vite dans la vie active afin d’économiser pour étudier soit la cuisine, soit le développement de jeux vidéo.
À 19 ans, il sent chez lui le désir d’être prêtre. Il consulte un prêtre, et celui-ci lui donne comme conseil d’aller vivre sa vie et ensuite de décider. Yannick le prend très mal. «On me réplique cela alors qu’il y a une crise des vocations ! Ce prêtre avait sans doute vu des choses en moi que je ne voyais pas, mais j’étais en colère. D’autant plus que dans mes engagements d’Église, je sentais que je plafonnais. Et entendre cela me donnait l’impression d’être mis sur la touche. J’ai dit : gardez votre Église pour vous, je n’en veux pas. Le Bon Dieu, c’est pour les vieux.» Une attitude qui attriste ses parents, et pendant des mois, lui et son père ne se parlent presque plus.
Bricoleur informatique
Embauché comme Administrative clerk à la Compagnie Mauricienne de Textile (CMT) à Phoenix, Yannick ‘déguste’ la première année car ses collègues le poussent à bout pour le faire grandir. En parallèle, il suit des cours d’informatique auprès de la DCDM Business School. Il est ensuite envoyé dans le département informatique de la CMT à La-Tour-Koenig et apprécie le travail d’équipe. Voulant changer de décor, il prend un emploi d’Invoicing clerk auprès de Pharmacie Nouvelle, aujourd’hui PNL, qui à l’époque, changeait son système informatique. Il suit de près ce changement, se mettant non seulement dans la peau du développeur mais aussi de l’utilisateur. Il n’y fait pas long feu et après un an à Capital Touch, où il fait des montages, du design, du graphisme, il prend un emploi de développeur dans une agence web où il reste quatre ans. Il se définit comme «bricoleur informatique.»
Yannick trouve le temps de sortir avec des filles. *«Une ou deux ont vraiment compté et avec une, je pensais même pouvoir aller jusqu’aux fiançailles.» Sauf qu’il réalise qu’il n’est pas heureux. «Nous étions ensemble dans la chorale. Ce n’était pas de sa faute mais je sentais que je n’étais pas bien dans cette relation. Je me sentais comme dans une cage dorée. En fait, j’étais plus heureux et à l’aise dans mes engagements d’église et je n’arrivais pas à concevoir un ‘nous’ dans ma tête.» Au bout du quatrième essai se soldant par une rupture, Yannick abandonne cette relation.
Un soir de la St-Sylvestre, il suit son impulsion d’aller se réconcilier avec son père. Père et fils s’enlacent, les larmes aux yeux au fond desquels se trouve aussi le pardon mutuel. Après s’être réconcilié avec son père biologique, il le fait avec son Père céleste. «Le lendemain, j’ai repris le chemin de l’Église.» Mais ce n’est pas pour autant qu’il veut reprendre ses engagements. Un ami réussit à le persuader de le faire et il se remet à encadrer des enfants, à préparer des textes de l’Évangile pour qu’ils puissent en discuter. «Petit à petit, je me suis réapproprié la foi que j’avais rejetée. Quand un enfant a remercié le Seigneur pour le beau temps, ma première réaction était de me dire qu’il fallait remercier la météo plutôt (rires). Mais au fur et à mesure, la simplicité des enfants a attendri mon cœur et de plus en plus, une joie m’a habité.» C’est ainsi qu’il intègre le Conseil Pastoral des Jeunes (CPJ) et il fait une relecture de sa vie. Il se rappelle notamment le précurseur du CPJ, soit le Carrefour des Jeunes et repense à un tableau vivant dans lequel il campait le rôle du Christ. «Lors des répétitions, au passage précédent la crucifixion, mes amis faisaient semblant de me battre. Mais le jour de la représentation, ils s’en donnaient à cœur joie et c’était douloureux», se remémore-t-il en rigolant.
Dieu, le lien entre les hommes
Yannick participe à deux Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ), soit à Sydney et Madrid et bien qu’il se sente heureux dans tout ce qu’il entreprend, au cours de sa deuxième année du groupe 40, il ressent un grand vide, l'impression qu'il lui manque quelque chose. Tout en appréciant sa vie de célibataire, il ne met pas totalement de côté la possibilité d’avoir une vie amoureuse. Et demande alors à participer aux JMJ à Rio de Janeiro. Le responsable insiste pour qu’il soit un des animateurs et Yannick finit par mettre ses réticences de côté. Il est animateur au sein du groupe et prend du plaisir à accompagner les jeunes et ressent une grande joie en préparant ceux qui iront à Rio avec lui. Et comme Dieu ne manque pas d’humour également, l’appel le rejoint au Brésil. «Dans le village de Montes Claros, on a vécu une expérience extraordinaire. Nous étions dix Mauriciens et dix Brésiliens et un seul comprenait un peu d’anglais et aucun Mauricien ne maîtrisait le Portugais. Or, nous avons pu communiquer malgré tout. Saolo, un Brésilien du groupe, m’a appris à danser la samba et la barrière de langue n’existait plus. Seule comptait la fraternité.» Il éprouve aussi beaucoup de joie en jouant au foot avec les enfants. «En priant le soir, j’ai réalisé que c’est le Christ qui faisait le lien entre nous et qu’il était présent dans tout ce que je faisais et qu’IL m’ouvrait des portes.»
Autre expérience vivifiante pour lui a été d’être capable, «malgré que je sois bien enrobé», précise-t-il en rigolant et en désignant son tour de taille, il réussit à passer dans un tunnel alors que le spéléologue n’y était pas convaincu. «Ce tunnel était un cul-de-sac et en arrivant au bout, j’ai hurlé de joie. J’avais réussi et j’étais requinqué. Le spéléologue nous a demandé de refaire le parcours inverse, lampes éteintes. Et nous avons réussi à le faire en nous basant sur nos autres sens. En faisant mon examen de conscience le soir, je me suis dit que l’on se plaint souvent qu’on ne voit pas Dieu physiquement. Or, là aussi, je pouvais utiliser mes autres sens que la vue pour le voir.»
Lorsqu’il entend le Pape François demander aux jeunes de ne pas être des spectateurs mais des acteurs du changement, sa décision de discerner pour être prêtre est prise. Pour en être sûr, il vit le célibat pendant un an et en faisant une relecture de toute sa vie, il «redécouvre tous les trésors que le Seigneur y a déposés et plus j’avance, plus je consolide mes assises spirituelles. Je prends goût à la prière et la joie du service prend le pas sur le rêve du mariage».
En faisant son stage pastoral auprès de plusieurs paroisses pour voir ce qu’est la vie de prêtre, il réalise qu’il a «le cul entre deux chaises car je ne suis pas encore séminariste ni paroissien de l’église où je suis en observation mais cela ne me dérange pas du tout.» Et au fur et à mesure de sa progression spirituelle, Yannick comprend que c’est bien le chemin de la prêtrise qu’il veut emprunter mais que la peur qui le paralyse tient au fait que plusieurs prêtres qu’il connaît ont quitté les ordres et ont subi l’opprobre. Mais comme il l’a fait avec la natation – il avait développé une phobie de l’eau après avoir failli se noyer à 14 ans, sentiment qu’il a surmonté en prenant des cours de natation – il se lance en dépassant sa peur et en acceptant l’appel. Il entre au séminaire à Nantes et vit un jour après l’autre. Après une période d’acclimatation difficile, il s’y sent heureux malgré les différentes personnalités et cultures des séminaristes. «J’ai senti que j’avais une direction précise. Je sais où je vais et je connais le chemin que je dois prendre.»
Même si Yannick a surmonté sa peur, il n’a pas de certitude par rapport à son avenir comme prêtre. «Je dépose ce ministère dans les mains de Dieu en me disant que je vis ce qu’il me donne aujourd’hui comme une prière. Je pose un acte de foi. La seule chose dont je suis sûr c’est que le Seigneur est avec moi et que je suis heureux dans ce que je vis. Il y a quelque chose de beau dans ce don total de soi. C’est parce que le Christ m’a touché, a brûlé mon cœur, m’a embrasé que je veux que le peuple découvre cette joie d’être touché et habité par le Christ… »
Une double ordination placée sous le thème «Embraser pour proclamer»
David Chung Sum Wah et Yannick Casquette seront ordonnés prêtres par Mgr Jean Michaël Durhône qu’ils ont connu quand celui-ci était responsable des vocations. Cette double ordination a été préparée par un comité dirigé par le père Yudesch Arnachellum, responsable de la Pastorale des Vocations. Comité qui a coordonné la logistique, la liturgie et la communication de cet évènement majeur pour les catholiques. Une prière a été composée pour l’occasion et une neuvaine est proposée pour vivre cette ordination dans la joie et le recueillement. Un kit a été réalisé pour les enfants afin qu’ils comprennent ce qu’est une ordination. La chorale comprend 63 choristes et sept musiciens, qui ont répété pendant six dimanches. La communion se fera par les prêtres et les diacres et environ 6 000 personnes sont attendues au Thabor, le 8 décembre, à 14 h 30. La devise de David est «Exaltez la parole de vie» alors que celle de Yannick est «Je suis venu jeter un feu.» Le thème de cette célébration est «Embraser pour proclamer».
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