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La forêt Daruty en peril

Entre richesse historique, défis environnementaux et pratiques illegales

31 août 2024, 22:00

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  • Vue aérienne de la forêt Daruty.

    Vue aérienne de la forêt Daruty.

  • Des quads présents dans la forêt Daruty. (Photo Facebook)

    Des quads présents dans la forêt Daruty. (Photo Facebook)

  • Les grosses pierres ont été enlevées pour permettre l’accès aux quads et aux véhicules.

    Les grosses pierres ont été enlevées pour permettre l’accès aux quads et aux véhicules.

  • Des bouteilles cassées sur le sentier de la forêt Daruty.

    Des bouteilles cassées sur le sentier de la forêt Daruty.

La forêt Daruty, un joyau naturel et historique situé à Petit-Raffray, est aujourd’hui au coeur d’une polémique. Connu pour ses sentiers paisibles et sa richesse en biodiversité, ce lieu de détente est malheureusement en proie à des comportements irrespectueux et à des pratiques illégales qui menacent son intégrité. Les activités de «quad biking», les dégradations environnementales et les nuisances causées par certaines pratiques récréatives ont conduit à un climat de tension croissante au sein de la communauté locale.

Un trésor naturel et historique

La forêt Daruty, ou forêt de Belle-Vue, couvre une superficie de 108 hectares et abrite une diversité botanique impressionnante. On y trouve des espèces exotiques comme l’eucalyptus tereticornis, l’araucaria cunninghamii et le mahogany (acajou), entre autres. Ces arbres matures créent un cadre verdoyant, propice à la méditation et à la détente. Les sentiers bien balisés et adaptés à tous les niveaux de condition physique en font une destination idéale pour les randonneurs, les joggeurs et les familles.

En 2022, la forêt Daruty a bénéficié d’un programme de rénovation visant à en faire un lieu encore plus attrayant pour les Mauriciens. Des bancs ont été installés le long des sentiers, agrémentés de citations inspirantes, dans l’esprit de la Journée internationale des forêts. Cet effort visait à encourager la population à renouer avec la nature et à pratiquer des activités physiques en plein air. Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, avait inauguré les nouveaux sentiers lors d’une cérémonie marquant cette journée internationale, soulignant l’importance de préserver et de valoriser les espaces naturels de l’île.

Cependant, ces initiatives de revitalisation risquent d’être compromises par des comportements irresponsables, tels que le quad biking, qui cause des dégâts considérables sur les sentiers et met en danger la sécurité des autres usagers de la forêt.

«Quad biking» : une menace pour la sécurité et l’environnement

Le quad biking, pourtant interdit dans la forêt Daruty, est devenu une pratique courante, souvent associée à des comportements dangereux et irrespectueux. Un récent incident a déclenché de vives réactions sur les réseaux sociaux. Une femme se promenant avec son chien a rapporté avoir été malmenée par un groupe de jeunes en quad, qui auraient même tenté d’écraser son animal. Ce même groupe de jeunes a réfuté les propos de la femme en déclarant qu’à aucun moment ils n’avaient voulu faire du mal à la dame ni à son chien. Dans un post sur Facebook, les jeunes ont admis avoir fait du drifting mais en prenant toutes les précautions. Cette affaire a soulevé des inquiétudes quant à la sécurité des visiteurs de la forêt.

Une équipe de l’express s’est rendue à Daruty durant la semaine pour constater les faits. Lors de notre promenade, aucun quad n’était en vue. Les nettoyeurs de la forêt nous ont fait comprendre que c’est d’habitude tard dans l’après-midi qu’ils viennent. «Monsieur, je suis un simple nettoyeur. Je n’ai pas le droit d’empêcher les personnes qui viennent ici avec leur quad. C’est le ministère qui doit agir et prendre des mesures. Les personnes qui font du quad biking ont enlevé les grosses pierres qui bloquaient l’accès pour qu’elles puissent entrer», explique un nettoyeur.

Un peu plus loin, nous rencontrons Akshay Tibaya Sobnath, conseiller du village de Petit-Raffray et membre du mouvement civique local, qui révèle que ce type de comportement n’est pas nouveau. Il y a deux mois, un groupe de jeunes s’était livré à des actes de vandalisme nocturnes, jetant des pierres sur les véhicules qui passaient à proximité de la forêt. Ces actions, qui ont endommagé une dizaine de voitures, ont provoqué l’indignation des habitants. Grâce aux efforts concertés de la communauté et aux plaintes déposées auprès de la police, ces jeunes ont été dissuadés de poursuivre leurs méfaits.

«Malheureusement, un nouveau groupe semble avoir pris le relais, cette fois-ci avec des quads, ajoutant une couche supplémentaire de danger. Ces jeunes s’amusent à faire des courses à grande vitesse sur les sentiers, ignorant les règles en place et mettant en péril la sécurité des randonneurs et des joggeurs. Les accès, initialement bloqués par des rochers pour empêcher l’entrée des véhicules motorisés, ont été illégalement dégagés, facilitant l’accès aux quads dans la forêt», explique Akshay.

Nuisances multiples : une forêt en peril

Outre le problème du quad biking, la forêt Daruty fait face à d’autres nuisances qui menacent son intégrité. Un habitant de la région, qui se rend quotidiennement dans la forêt pour courir, décrit la situation alarmante. Les quads ne sont pas seulement dangereux ; ils causent également des dégâts considérables aux sentiers, détruisant les aménagements récemment installés et perturbant la tranquillité du lieu.

«Un restaurant de la région propose à ses clients des excursions en quad, ajoutant à la pression sur cet espace naturel fragile. Ces excursions, guidées par une moto de trail, conduisent souvent les participants à travers la forêt Daruty, aggravant les dégâts sur les sentiers. Les barrières et autres mesures de protection mises en place par les autorités sont régulièrement contournées, rendant difficile la protection de ce lieu. Par ailleurs, les propriétaires de chevaux qui promènent leurs animaux dans la forêt laissent souvent des excréments sur les sentiers, créant des conditions insalubres pour les autres visiteurs. Les odeurs nauséabondes et la prolifération de mouches nuisent à l’expérience de ceux qui cherchent à profiter de la nature. Enfin, certains visiteurs utilisent leur véhicule pour pénétrer illégalement dans la forêt afin de réaliser des séances photos. Non seulement cette pratique est interdite, mais elle contribue également à la dégradation de l’environnement et à la pollution du site par des déchets laissés derrière eux», explique le randonneur. Lors de notre promenade, nous avons aussi remarqué qu’il y avait des bouteilles cassées sur le sentier, ce qui représente un danger pour le public.

Face à l’escalade de ces problèmes, le ministère de l’Agro-industrie a réaffirmé l’interdiction de pratiquer le quad biking dans la forêt Daruty. Le ministère envisage de renforcer les mesures de protection en replaçant les rochers pour bloquer à nouveau l’accès aux véhicules motorisés. Toutefois, la préservation de ce site nécessite la coopération de tous. Les habitants, les visiteurs et les autorités doivent travailler ensemble pour protéger cet espace naturel afin qu’il continue à être un refuge de tranquillité et un symbole du patrimoine historique de l’île Maurice.