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Kronik KC Ranzé

Les élections, c’est pour bientôt !

20 octobre 2024, 09:26

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Les élections, c’est pour bientôt !

Les élections, c’est la saison des délires. Soit ! Mais tout de même ! Monsieur Phokeer, ex-speaker «impartial» de notre Parlement national, dans une réunion politique dans la circonscription de Triolet, a étalé sa maîtrise des chiffres et son parti-pris pour le douteux, en disant comment les retraités mauriciens deviendront millionnaires, en moins de deux ans, grâce à l’Alliance Lepep et à son leader.«Dan okenn pei dan lemond pa existe sa! Ala kouma Pravin Jugnauth kontan lepep», déclare-t-il. ( * )

Le calcul s’affiche ainsi pour M. Phokeer: imaginez un couple de retraités, chacun recevant les Rs 20 000 promises, sur 13 mois. En deux ans, ce couple aura reçu Rs 40 000 x 13 x 2 = Rs 1 040 000. Millionnaire donc ! Il y a cependant quelques problèmes avec ce calcul simpliste et totalement malhonnête.

D’abord, le PM a pris bien soin de préciser que les Rs 20 000 ne sont pas pour tout de suite, mais pour «dan enn prosin manda». Si l’on extrapole ce qui s’est passé pour l’annonce des Rs 13 500 en 2019, effectivement payés cinq ans plus tard, les Rs 20 000, ce serait plutôt pour 2029/2030 ? Il faudrait d’ailleurs que le PM précise, maintenant, exactement QUAND les Rs 20 000 seront accessibles au commun des mortels, vu la déclaration de Phokeer… Car certains vieux désireront sans doute savoir s’ils seront «millionnaires»… avant de mourir ?

Ensuite, on ne peut, d’aucune manière, être millionnaire en recevant Rs 20 000 par mois car, pour que ce soit réel, il faudrait ne pas dépenser cette somme et l’épargner pendant deux ans ! Or, M. Phokeer doit peut-être aussi expliquer à son couple-type, comment ils mangeraient, paieraient l’électricité ou le loyer entre-temps ? De toute manière, l’exemple de Phokeer ne créera en deux ans que deux… semi-millionnaires.

Finalement, il est peut-être nécessaire de souligner que Phokeer a inévitablement et indirectement rappelé qu’un moyen rapide pour s’assurer que les moins fortunés de la nation deviennent tous «millionnaires» est de continuer à dévaluer la roupie en continuant à vivre au-dessus de nos moyens et donc à devenir propriétaire de «roupies illusoires» !

TOUS les Allemands ont ainsi été des millionnaires vers 1923, le taux de change du mark ayant évolué de 320 marks par dollar vers juin 1922 à 4 210 500 000 000 en novembre 1923 ! Le portemonnaie de circonstance était alors devenu… la brouette, résultat de trop d’emprunts et d’avoir trop imprimé des billets de banque, alors que plus personne n’avait confiance ! Au Zimbabwe ( * * ), la spirale de l’hyperinflation commence en 2008 et force la banque centrale à imprimer des billets de valeur de plus en plus forte qui produiront, en janvier 2009, un billet de cent mille milliards de dollars du Zimbabwe ! Ce billet avec 14 zéros, qui rendait probablement tous les Zimbabwéens instantanément milliardaires (plutôt que millionnaires !), ne valait que 30 dollars ! L’État avait bien trop dépensé au-dessus de ses moyens…

L’illusion «millionnaire», c’est de la mystification. Est-ce pour cela que ni le PM, ni le ministre des Finances n’ont suivi Phokeer dans son «argument» électoral délirant ?


L’extraordinaire a bien eu lieu. Cependant, Linion Reform arrive bien trop tard pour cette élection-ci, et donc un peu trop tôt, pour pouvoir prétendre à un résultat électoral matériel. Tentative d’explication.

Cette alliance in extremis, à moins d’un mois des élections du 10 novembre, est une façon pour le Reform Party et Linion Moris de reconnaître – mieux vaut tard que jamais – que, seuls et éparpillés, ils n’avaient que peu de chances. Bien ! Mais le reconnaître si tard, alors que pendant des mois, de nombreux stratèges leur rappelaient que seuls les ruisseaux qui se rejoignent peuvent éventuellement prétendre constituer des rivières, passe aussi le message qu’ils se sentaient un peu désespérés. Au point où même Roshi Bhadain a dû faire acte d’humilité !

Le regroupement d’une large majorité de l’opposition extra-parlementaire peut être une initiative significative dans la quête d’une alternative aux dynasties éternelles et au peu de renouvellement de la classe politique, qui nous rendent prisonniers involontaires de vieilles équations et d’innombrables rancunes personnalisées. Notre pays mérite clairement mieux que d’être encrassé dans les histoires de seulement quelques familles qui, nous le répète-t-on occasionnellement, relèvent apparemment de choix divins. Mais malheureusement muets…

Il faut du sang neuf car le chantier reste immense : la drogue dévastatrice, les enfants qui quittent le pays, la gangrène de la corruption, l’immoralité grandissante, la vie démocratique qui s’affaiblit, cela en fait des chantiers identifiés par Linion Reform lors de sa conférence de presse de lancement. Cependant, le plus dur sera aussi d’aller au-delà des constats de difficultés économiques (déficits divers, dettes, roupie dévaluée, inflation/coût de la vie) pour parler de solutions qui ne peuvent provenir que de plus d’investissements, de travailler mieux et de productivité améliorée…

Linion Reform rassemblera plus de voix maintenant que ses membres sont fédérés, plutôt qu’isolés. Il y aura peut-être même un peu synergie ! On le dira pourtant sans illusion : il n’y aura pas, ici, de miracle macroniste. Si le MSM a pu rapidement aspirer au pouvoir, c’est parce qu’il a pu créer une cassure ethnique majeure et payante, à partir du MMM gagnant de 1982. Le PTr et le MMM, par contre, nés dans la contestation et les remises en question fondamentales, plutôt que de conflits de personnalités et d’ethnicité, ont mis des années pour mûrir et convaincre. S’ils veulent prendre les rênes du gouvernement, il reste encore des années de labeur et de sacrifices pour Linion Reform…

Pour le 10 novembre prochain, la question qui va les tarauder sera de préciser à leurs partisans qui est leur principale cible. Ni Pravin, ni Navin est un beau slogan, mais si le 11 novembre, Pravin est encore au pouvoir, ils regretteront probablement d’avoir raté leur cible principale ? Car, en l’état actuel des choses, Linion Reform va plus gêner Navin en ville que Pravin à la campagne…


Les élections du 6 novembre aux Etats-Unis vont se jouer dans un mouchoir. Mais personne ne sait, pour l’heure, si le mouchoir sera finalement rouge (républicain) ou bleu (démocrate) ? Pour prédire le résultat, les sondages pleuvent. Si le nombre de firmes de sondage aux États-Unis a doublé entre 2000 et 2022 (Pew Research), les prédictions restent toujours aléatoires. Si la théorie statistique reste solide, la clé pour obtenir une marge d’erreur de 3 % avec 95 % de probabilité requiert qu’un échantillon minimum soit de 1 068, mais surtout que cet échantillon soit totalement représentatif de la population qu’il est supposé représenter… le jour du vote !

C’est en cela que réside la difficulté principale et même si l’échantillon est représentatif, la clé demeure le taux de mobilisation de ceux qui déclarent préférer Harris ou Trump, le jour même de l’élection. En 2020, le plus fort taux de participation au vote depuis 1900 se traduisait en 155 millions de votants sur 235 millions de votants éligibles (66 % seulement). Ceux qui votent ne sont pas toujours les mêmes d’une élection à une autre. Ou d’un sondage à une élection. Plusieurs millions de nouveaux électeurs se sont déjà enregistrés ou vont le faire jusqu’à fin octobre dans certains États…

En plus, aux États-Unis, ce n’est pas le vote populaire national qui comptera (Harris y mènerait par 3 % en moyenne), mais essentiellement le vote dans sept swing states (Pennsylvanie, Michigan, Wisconsin, Caroline du Nord, Géorgie, Nevada et Arizona) ou la course, menant à la victoire au collège électoral, est extrêmement serrée. Ces sept États, représentant seulement 18,6 % de la population du pays, auront donc un pouvoir démesuré dans le choix du président des quatre prochaines années. Typifiant cette course serrée, les sondages s’y suivent et ne se ressemblent pas toujours ; Trump et Harris étant tantôt donnés gagnants ou perdants, à l’intérieur d’une marge d’erreur de 3 à 5 %. Le dernier sondage NY Times/ Siena indique quatre des swings states favorisant Harris et trois favorisant Trump.

Comme à Maurice, le seul sondage qui importera en fin de compte sera le vote lui-même. Les conséquences pour les Etats-Unis seront planétaires, d’autant que les sérieux doutes alignés sur l’âge et la santé (y compris mentale) de Biden sont désormais transférés à Trump, dont la famille a malheureusement un historique médical de démence et d’Alzheimer. M. Trump, 78 ans, contrairement à Mme Harris, 59 ans, n’a toujours pas rendu publics ses rapports médicaux détaillés. Se référer à Orban comme le président de la Turquie (octobre 23), confondre Nikki Haley et Nancy Pelosi, croire que son adversaire cette année est Obama plutôt que Biden, prédire que la 2e Guerre mondiale est pour bientôt, accuser (par projection ?) Harris d’être «mentally impaired» et stupide (2024) sont pourtant autant d’indicateurs, entre autres, des risques encourus par la plus puissante démocratie du monde…

( * ) https://www.instagram.com/ mopays.moris/reel/DBApJxEvEbt/

( * * ) https://fr.wikipedia.org/wiki/ Hyperinflation_au_Zimbabwe