Publicité
Rentrée à Mayotte
A Mayotte, les enseignants se préparent à une rentrée difficile
Par
Partager cet article
Rentrée à Mayotte
A Mayotte, les enseignants se préparent à une rentrée difficile

Les 117 000 élèves de l'archipel doivent reprendre le chemin de l'école ce lundi, six semaines après le cyclone Chido qui a endommagé ou détruit de nombreux établissements scolaires. La ministre de l'Education nationale, Elisabeth Borne, est attendue sur place pour échanger avec la communauté éducative, les parents et les élèves.
Le projet de loi d'urgence pour la reconstruction de l'archipel adopté à l'Assemblée mercredi dernier a éludé les questions scolaires. Qu'à cela ne tienne : à plus de 8 000 kilomètres de l'hémicycle, l'administration et les enseignants continuent de préparer la rentrée, coûte que coûte.
Pour accueillir les élèves ce lundi, l'objectif fixé par le gouvernement, le rectorat de Mayotte essaye même de monter des «tentes écoles» autour de l'école élémentaire de Cavani-Sud 1 à Mamoudzou. Son directeur, Rivo Rakotondravelo fait part de sa sidération face à des moyens qui sont habituellement utilisés «dans des pays du tiers-monde».
Comme 90 % des infrastructures à Mayotte, son école a été très endommagée par le cyclone Chido, le 14 décembre dernier. La toiture s'est envolée et l'eau a pénétré l'établissement. «Des pilleurs ont aussi volé la charpente, les tables, les chaises et même les cahiers des enfants», raconte le secrétaire du syndicat enseignant FSU-SNUipp dans l'archipel.
Assurer la rentrée pour ne pas « perdre les élèves »
158 écoles sur 221 sont «disponibles», a annoncé le ministre des Outre-Mer, Manuel Valls, dans une interview à «Ouest France». Selon le recteur de Mayotte, Jacques Mikulovic, 39 écoles sont en incapacité de fonctionner. Et sur les 33 collèges et lycées, «cinq établissements (sont) significativement impactés», précise-t-il. Pour garantir la sécurité des enseignants et des élèves, des commissions de sécurité doivent donc autoriser ou non le retour du public dans chaque classe, «une à une».
Pour compliquer l'équation, de nombreux établissements ont fait office d'hébergement d'urgence après le cyclone. Plusieurs centaines de migrants dont les habitations précaires ont été détruites ont ensuite longtemps refusé de quitter les lieux sans solution de relogement, générant parfois de fortes tensions avec des parents d'élèves et la police.
Difficile d'accueillir les 117 000 élèves du 101ᵉ département français dans ces conditions, constatent de nombreux professeurs joints au téléphone. Mais tous se disent conscients que la reprise des cours doit se faire dès que possible pour ne «pas perdre les élèves». Encore faut-il que les professeurs soient assez nombreux pour l'assurer.
Plusieurs centaines de professeurs absents
«Ils ne savent toujours pas combien d'enseignants seront présents le jour de la rentrée», explique Salah Ferhi, professeur d'histoire-géographie au collège Kaweni 1, situé dans le plus grand bidonville de France du même nom. C'est ici même que s'étaient rendus le Premier ministre, François Bayrou, le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, et la ministre de l'Education nationale, Elisabeth Borne, le 30 décembre. L'ancienne Première ministre est de nouveau attendue dans l'archipel en fin de semaine, accompagnée de Manuel Valls, pour échanger avec la communauté éducative, les parents et les élèves.
Sur les 74 professeurs que compte son collège, 31 sont toujours absents, raconte Salah Ferhi. La rentrée sera aussi l'occasion de «se compter» pour les enseignants de l'académie, admet le secrétaire adjoint du syndicat CFDT Académie de Mayotte.
Interrogé à ce sujet, le recteur Jacques Mikulovic se dit confiant dans la capacité des établissements à encadrer les élèves dès lundi. Mais selon ses propres chiffres, plusieurs centaines d'enseignants ne pourront pas être en poste à cette date. Certains ont encore du mal à rentrer dans l'archipel par avion. D'autres, nombreux, sont grévistes ou en arrêt maladie. Quelques-uns sont même encore injoignables.
Gérer les traumas des élèves
«Il ne faut pas oublier que les plus de 8.000 enseignants de Mayotte souffrent du manque d'eau et d'électricité comme tout le monde, et eux aussi ont pu perdre leur logement», soupire une professeure d'histoire-géographie ayant requis l'anonymat. Pour faire face au manque de structures et de professeurs, le ministère a prévenu que les «rotations» seront généralisées. Une pratique courante depuis très longtemps qui consiste à faire cours le matin avec une classe, l'après-midi avec une autre.
En attendant, cette enseignante d'un collège de la banlieue de Mamoudzou se demande comment elle pourra gérer l'état psychologique de ses élèves. «Certains ont tout perdu et dorment depuis plusieurs semaines dans un centre d'hébergement d'urgence», se désole-t-elle. Mais une chose l'angoisse plus que tout alors que le bilan définitif du cyclone n'est toujours pas connu : «J'ai peur que des élèves manquent à l'appel…»
Par les Echos
Publicité
Publicité
Les plus récents




