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Démissions en série des pilotes
Appel à Air Mauritius pour stopper l’hémorragie
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Démissions en série des pilotes
Appel à Air Mauritius pour stopper l’hémorragie

Nouvelles préoccupations au sein d’Air Mauritius (MK) résultant d’une vague de démissions parmi ses pilotes. Au cours des deux dernières années seulement, environ 25 sur 175 pilotes ont quitté le transporteur national, soit presque le double du taux d’attrition normal selon l’International Air Transport Association, indiquent ceux du milieu.
Parmi les démissionnaires qui ne se résument pas qu’à un chiffre figurent de nombreux capitaines très expérimentés. Ces derniers totalisent des milliers d’heures de vol, ce qui, soutient-on, laisse des lacunes difficiles à combler.
«Le niveau d’expérience au sein du poste de pilotage, qui se mesure en fonction des heures de vol cumulées par les pilotes sur le type d’appareil en question, est en chute libre. Avant la pandémie de Covid-19, la moyenne des heures de vol était bien au-delà de 20 000 heures réparties entre les trois pilotes sur un long-courrier. Aujourd’hui, post-administration volontaire et après le départ de bon nombre de membres du personnel navigant, la moyenne est descendue sous les 15 000 heures dans certains cas», confie un commandant ser vant MK depuis deux décennies.
La situation est aggravée par une structure salariale jugée profondément injuste par des pilotes. «Certains copilotes recrutés récemment via des agences intermédiaires gagnent plus que des capitaines chevronnés en poste depuis des années. Cette inégalité a provoqué un fort sentiment d’injustice morale et professionnelle, sapant la confiance des pilotes expérimentés envers la direction de la compagnie. Cela démotive et pousse à claquer la porte du cockpit», explique un autre pilote d’expérience.
Bien que la sécurité soit toujours respectée et maintenue au-dessus de la moyenne industrielle, cette tendance inquiète quant à la capacité des équipages de substitution, qui sont moins expérimentés et dont certains n’ont jamais travaillé pour une compagnie aérienne auparavant, à gérer des imprévus, «qui dans le jargon aéronautique se rapportent à des obstacles difficilement surmontables en situation d’urgence», indique-t-on.
Plus inquiétant encore, l’exode n’épargne pas les jeunes pilotes, sélectionnés après un processus rigoureux, et parfaitement formés à grands frais par MK – soit plus de Rs 3 millions par candidat – et qui auparavant restaient fidèles à la compagnie. Un phénomène inédit par le passé, confie-t-on au sein de la compagnie.
Perte de revenus
Des expatriés ne sont pas en reste. Eux aussi commencent à quitter le Paille-en-Queue après plus de dix ans de fidélité. Pour finir, des pilotes étrangers, recrutés post-Covid et qui ont vu leur licence renouvelée aux frais de la compagnie, s’envolent également, peu de temps après vers d’autres horizons.
Ce turnover coûte cher, soutient-on. Former des pilotes aux standards de MK représente un investissement de plusieurs millions de roupies. De l’autre côté, des compagnies aériennes concurrentes n’ont aucun mal à les attirer.
«Emirates qui a embauché 200 pilotes en seulement cinq mois et d’autres compagnies ne lésinent pas sur les moyens, valorisent leurs pilotes et s’assurent de leur stabilité interne. Nous les formons pour mieux les voir partir», regrette un commandant.
Dans le secteur, MK est devenue une véritable passerelle vers les grandes compagnies aériennes, au point d’être perçue comme une «école de formation internationale».
« Bon nombre de compagnies aériennes, aujourd’hui florissantes, ont dû y faire face dans le passé. Mais, contrairement à MK, elles ont appris leurs leçons. Ces compagnies valorisent aujourd’hui leurs membres d’équipage expérimentés non seulement pour les retenir mais aussi pour s’assurer d’une stabilité interne, d’un avancement soutenu vers leurs projets d’avenir ainsi que d’une consolidation de leur réputation sur le plan de la sécurité et du service.»
Avec l’arrivée annoncée des Airbus A320 et A350, un appel est lancé pour une intervention urgente. Un manque de pilotes suffisamment formés peut impacter les ambitions d’expansion de MK. Des avions restent alors cloués au sol, entraînant une perte de revenus et des paiements de location inutiles. La compagnie se verra alors contrainte de retarder ou d’annuler des itinéraires prévus, minant, comme témoigné récemment, la confiance des passagers.
La requête au sein de la communauté de pilotes toujours fidèles à MK est que le transporteur national fasse de la valorisation de sa main-d’œuvre essentielle une priorité. Cela, à travers une rémunération équitable, des opportunités de développement de carrière, et un engagement renouvelé en faveur de l’expérience et de la fidélité de ses pilotes.
«Un examen stratégique des conditions de travail des pilotes n’est plus un luxe, mais une nécessité absolue pour assurer la survie de la compagnie», fait-on comprendre.
Nous avons sollicité MK et attendons une réponse.
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