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Hippisme

Arrêt des activités de PTP en 2025 ? Vraiment?

28 mai 2024, 19:15

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Arrêt des activités de PTP en 2025 ? Vraiment?

Jean-Michel Lee Shim pourrait bien tenter un coup de bluff dans un contexte électoral.

L’éditorial du magazine en ligne de People’s Turf PLC (PTP) de jeudi dernier a eu l’effet d’une bombe. PTP ne souhaiterait plus organiser de courses en 2025. Plusieurs raisons sont avancées pour justifier cette décision, dont, sans pour autant l’être explicitement, une détérioration des relations privilégiées entre Jean-Michel Lee Shim et le pouvoir en place. Se dirige-t-on vraiment vers la fin de PTP ? Ou est-ce plutôt du bluff ? Quelle est la position du Mauritius Turf Club (MTC) à ce sujet ? Pourquoi le MTC s’est-il dissocié de l’avis de certains de ses membres ?

Beaucoup a été écrit sur les circonstances dans lesquelles PTP a vu le jour. Entre la nécessité «de sauver les courses», déclaration imputée à Jean-Michel Lee Shim et sa PTP, et le devoir «de résistance» du MTC, prôné dès la première heure par Jean-Michel Giraud et une frange du MTC, chaque clan, d’où la guerre de tranchée entre les deux entités, pensent détenir la vérité ultime. De là, est née toute la problématique de l’état actuel de nos courses. «Ne pas tenir compte de ce qui s’est passé, sans pour autant se tirer dans les pattes, équivaudrait à répéter les mêmes erreurs», prévient-on parmi une frange des deux bords.

Venons-en à la supposée fermeture de PTP en 2025. Il faut d’abord préciser que ni Jean Michel Lee Shim ni PTP n’ont communiqué officiellement sur la décision de l’organisateur de courses de cesser ses activités. Cela dit, si l’éditorial du magazine de PTP n’est pas signé, «on doute fort qu’un contenu aussi explicite et polémique puisse paraître dans le magazine de PTP sans l’aval du grand manitou», selon une personnalité du giron. Jean-Michel Lee Shim aurait lui-même écrit l’éditorial pendant son vol retour d’Afrique du Sud. «Autant a-t- il tenu tête aux opposants auparavant, Lee Shim en aurait maintenant marre en raison des contrecoups reçus du pouvoir en place», dit un ses proches.

Ce ne sont pas les exemples qui manquent: le retour sans condition des locaux du Port-Louis Tennis Club (PLTC) à ses membres sous la pression de Côte d’Or International Race course and Entertainment Complex Ltd (COIREC), la sommation de cette dernière d’enlever le slogan de bienvenue à l’entrée du Champ-de Mars, l’amende infligée à PTP après que celle-ci a fait couper des arbres sur l’hippodrome, le refus de la COIREC de construire des dortoirs sur place pour les travailleurs de PTP, ainsi que la décision de la Horse Racing Division (HRD) de sanctionner le Chief Executive Officer de People’s Turf après ses commentaires jugés graves sur les ondes.

La volte-face du pouvoir en place tiendrait peut être du fait que «PTP est trop critiquée». Nombre restreint de chevaux avec pour conséquence un enjeu peu attrayant, mainmise de Jean-Michel Lee Shim sur toute l’industrie, allant d’organisateur des courses à propriétaire de chevaux et operateur de paris, montes abjectes de certains jockeys, ou encore manque de professionnalisme, PTP en prend beaucoup pour son grade chaque semaine.

Le désintéressement des Mauriciens pour la chose hippique se traduit par une affluence médiocre au Champ-de-Mars et une baisse significative du chiffre d’affaires des opérateurs de paris. Rs 282 millions de taxes récoltées pour la période de 2023 à 2024 ! Et une projection encore plus fade pour la période 2024-2025.

«Les membres du gouvernement ont peut-être compris que la situation au Champ-de-Mars pourrait faire pencher la balance lors des élections», dira un avocat membre du MTC. «Il faut alors montrer que le pouvoir en place ne cautionne pas tout ce que fait Lee Shim», explique-t-on. Histoire de «calmer la grogne des nombreux Mauriciens en désaccord avec ce qui se passe dans le giron hippique».

Ce qui se passe au Champ-de-Mars est déjà un thème de campagne pour certains politiciens. Navin Ramgoolam a promis de rendre le Champ-de-Mars au MTC lors de son discours du 1er-Mai alors que Xavier-Luc Duval et Richard Duval, pourtant plus du même bord, n’ont pas manqué de critiquer PTP lors de leurs conférences de presse respectives. Roshi Bhadain ainsi que le tandem Valayden-Bodha se sont aussi prononcés sur le sujet.

Lee Shim aurait dit «assez!». «Zot trouv tou pa bon? Be organize zot em!», a lancé un de ses lieutenants présents chaque semaine à PTP. «PTP laissera le champ libre au MTC de reprendre le Champ-de-Mars l’année prochaine. Car PTP en a marre des critiques injustifiées et démagogiques», a déclaré l’auteur de l’éditorial en question. Et pour ce faire, PTP serait prête à aider le MTC à revenir au-devant de la scène. Des proches de Lee Shim ont signifié que ce dernier voudrait «louer les infrastructures de Petit-Gamin au MTC». Et que les «chevaux de la Global Equestrian Ltd seront à la disposition du MTC».

Sinon, il se chuchote que le prochain gouvernement approuverait une enveloppe d’aide de plusieurs millions au MTC pour redresser la situation. Le chiffre de Rs 100 millions est avancé. Reste que les sceptiques diront qu’«aucun gouvernement n’a injecté de l’argent dans le Sport Of King. Cela, pour la simple et bonne raison que cet argent pourrait être utilisé ailleurs pour soulager la misère des gens».

«Ki pe rode plis ki sa?»

Une autre école de pensée estime toutefois qu’il s’agit d’un bluff de la part de Jean-Michel Lee Shim. Certains pensent que le milliardaire veut faire réagir l’hôtel du gouvernement. «Lee Shim trouverait injuste la manière avec laquelle il est traité alors qu’il a sauvé l’industrie des tergiversations d’un MTC de l’époque plus apte à tout sacrifier sur l’autel de la politique», fait valoir un officiel de PTP.

Un partisan du retour du MTC fait la lecture suivante : «Que souhaite Lee Shim de plus du gouvernement ?» En effet, poursuit-il : «Le MTC a été poussé à la sortie au profit de PTP. PTP a obtenu l’exclusivité d’usage du Champ-de Mars. Aussi, le gouvernement a pris en charge les dépenses liées aux stipes et les tests antidopage. Ki PTP pe rode plis ki sa?»

Certains partisans «du bluff» ne croient pas en un retour du MTC si le pouvoir en place est réélu. «Si le PTr passe, il n’y aura point de tergiversations. Le MTC sera de retour.» Par contre, notre observateur fait la remarque suivante : «Le Premier ministre actuel acceptera-t-il le retour d’une entité remplie de partisans de l’opposition ?» «Pas si sûr !», devait-il répondre.

Et justement, Lee Shim «le sait !». D’où son «coup de semonce au pouvoir en place afin de mieux lui laisser mener ses opérations». Un politicien vient toutefois clore le débat avec une affirmation à peine contestable : «Les turfistes ont un attachement historique au MTC. Zot papa ek zot granper ti pe amenn zot lekours lepok MTC.» Ce qui expliquerait en partie toute la difficulté de PTP à conquérir le cœur des turfistes. Quoi qu’il en soit, Jean Michel Lee Shim, à travers l’édito qui lui est attribué, a déclaré qu’il fera tout pour assurer la pérennisation de l’industrie sous le MTC. En ce sens, le bon déroulement de ses affaires dans le domaine des paris sera peut-être plus encourageant.

Le MTC en mode «wait and see»

L’organisateur de courses historiques qu’est le MTC se veut prudent autour de l’éventuelle fermeture de PTP en 2025. Tout simplement parce qu’à ce jour, aucune communication officielle n’a été émise par celle-ci pour éclaircir ces rumeurs. Aussi, parce que dans le contexte électoral, tous les coups sont permis, et encore plus, les bluffs de grandeur sidérale. Le MTC est, par contre, sorti de son silence pour se dissocier des commentaires et opinions de ses membres à ce sujet. «Le conseil d’administration du MTC tient à préciser que les opinions des uns et des autres, membres du MTC ou pas, concernant un éventuel retour aux affaires du club à travers le MTC Jockey Club, n’engagent pas le MTC et sa subsidiaire (sic). Le conseil d’administration du MTC prendra toute décision nécessaire dans le respect de ses statuts», peut-on lire sur la page Facebook officielle du MTC.

La déclaration de l’ancien président du MTC, Jean-Michel Giraud, n’aurait pas fait l’unanimité parmi la hiérarchie du MTC. L’ancien président a déclaré à nos confrères de «Défi Plus» qu’il «n’était pas question d’organiser les courses sous les mêmes conditions que 2021». «Le MTC devra donc revenir sauver l’hippisme, mais pas sous les mêmes conditions imposées par la GRA (NdlR, Gambling Regulatory Authority) en 2021. Les conditions étaient que le MTC se retrouve comme un simple coupeur de gazon, sans aucune prérogative. Ni pour la nomination des commissaires de courses ni en ce qui concerne la licence des jockeys, des entraîneurs et le contrôle de l’importation des chevaux», a-t-il ajouté. Giraud finira ensuite par se fendre de ceci : «Je ne pense pas que le MTC devrait revenir sous les mêmes conditions imposées à l’époque.»

Certains membres, dont quelques-uns ont un mandat dans la haute chambre du MTC, sont d’avis que la communication du MTC doit se faire de manière «plus professionnelle». «Gavin Glover, le président actuel du club, n’a, certes, pas voulu commenter cette nouvelle, mais il n’était nullement du ressort de Giraud de le faire.» Le communiqué du MTC a-t-il été écrit pour se dissocier de Giraud ? «De qui d’autre sinon ?», dira un membre du MTC. D’autant plus qu’avec l’incertitude des résultats des élections, *«il serait mal avisé de dire n’importe quoi pour ainsi mettre encore plus à dos certaines personnes déjà susceptibles», a soulevé ce membre. «Ce n’est pas le moment d’aller encore se bagarrer», tonne un entraîneur.

Si la décision d’une séparation des pouvoirs dans le giron hippique a, semble-t-il, été acceptée, malgré quelques réticences sur l’impartialité et le professionnalisme de la HRD, un retour au «temps du MTC serait problématique à plus d’un titre». Et pour cause, le plus gros souci serait d’ordre financier. Rs 180 millions environ par année pour les tests antidopage et le coût d’opération de la HRD. Car dans l’éventualité d’un retour des prérogatives au MTC, comme demandé par Giraud, celui-ci devra assumer de tels coûts. *«Où le MTC ira trouver cette somme dès ses débuts, en sus de l’argent nécessaire pour remettre la machine administrative et logistique en marche ?», se demande-t-on.