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Un soldat américain échangé contre cinq taliban de Guantanamo

1 juin 2014, 13:48

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Un soldat américain échangé contre cinq taliban de Guantanamo

Un soldat américain capturé par les taliban en juin 2009 en Afghanistan a été libéré samedi en échange du transfert au Qatar de cinq taliban détenus sur la base américaine de Guantanamo, à Cuba.

 

Le sergent Bowe Bergdahl était le dernier prisonnier de guerre américain retenu en Afghanistan.

 

L'échange est le résultat de plusieurs années de tractations indirectes, relancées en novembre dernier, dans lesquelles le Qatar a servi de médiateur, a-t-on précisé de source américaine autorisée.

 

Bowe Bergdahl, apparemment en bonne santé, a été relâché vers 18H00 locales (13H30 GMT) dans l'est de l'Afghanistan et remis aux forces spéciales de l'US Army en présence de dix-huit taliban, a-t-on ajouté.

 

Un responsable du Pentagone a déclaré qu'une fois dans l'hélicoptère, Bergdahl a écrit sur une assiette en carton "SF?", l'abréviation pour les forces spéciales. Ses sauveteurs lui ont répondu: "Oui, et ça fait longtemps qu'on te cherchait!". A ce moment, le sergent a éclaté en sanglots.

 

Après avoir subi des examens médicaux sur la base américaine de Bagram, en Afghanistan, il devait rejoindre un hôpital américain situé en Allemagne. Selon une autre source, il pourrait ensuite être transféré dans un centre médical de l'armée à San Antonio, au Texas.

 

Parallèlement, samedi en fin d'après-midi à Washington, un responsable du Pentagone a annoncé que les cinq taliban avaient quitté Guantanamo à bord d'un appareil de l'armée américaine à destination du Qatar.

 

Lors d'une brève conférence de presse organisée dans la roseraie de la Maison blanche, Barack Obama, entouré des parents du soldat, a évoqué "l'engagement indéfectible" des Etats-Unis à ramener chez eux les prisonniers de guerre américains.

 

"Nous nous sommes engagés à mettre progressivement fin à la guerre en Afghanistan et nous nous sommes engagés à fermer Gitmo (le camp de Guantanamo à Cuba). Mais nous avons également pris l'engagement indéfectible de ramener nos prisonniers de guerre à la maison", a-t-il dit.

 

S'adressant aux parents du soldat, le président américain a déclaré: "en tant que parent, je ne peux imaginer l'épreuve que vous avez traversée".

 

Processus de réadaptation

 

C'est Barack Obama lui-même qui a appelé les parents de Bowe Bergdahl pour leur annoncer la libération de leur fils, aujourd'hui âgé de 28 ans.

 

Originaire de l'Idaho, il avait été fait prisonnier le 30 juin 2009, deux mois après son arrivée en Afghanistan. Soldat de deuxième classe à l'époque de sa capture, il a été promu sergent au cours de sa captivité.

 

Prenant la parole après Barack Obama, Bob Bergdahl a déclaré que son fils "avait des difficultés à s'exprimer en anglais". "Nous ne pourrons jamais appréhender totalement la nature complexe de son rétablissement", a-t-il ajouté.

 

Son rétablissement après près de cinq années de captivité s'annonce difficile. Selon un responsable du Pentagone, Bowe Bergdahl entamera en Allemagne un "processus de réadaptation".

 

"Cela comprend du temps pour lui permettre de raconter son histoire, décompresser, de reprendre contact avec sa famille lors de conversations téléphoniques et de visioconférences", a-t-il ajouté.

 

En conférence de presse, Barack Obama a remercié le Qatar pour son rôle dans cette affaire, ainsi que le gouvernement afghan.

 

"Le Qatar nous a donné l'assurance qu'il mettrait en oeuvre des mesures pour protéger notre sécurité nationale", a déclaré Barack Obama.

 

Le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel, en visite en Asie, a déclaré que le gouvernement de Doha allait prendre les mesures nécessaires pour que ces cinq hommes soient bien surveillés et ne représentent aucun danger pour la sécurité nationale américaine une fois transférés au Qatar.

 

Cinq taliban ont quitté Guantanamo

 

L'idée de cet "échange" courait depuis quelques temps et plusieurs membres du Congrès avaient fait part de leur crainte de voir les cinq taliban, et notamment Mohammed Fazl, détenu depuis 2002 à Guantanamo, reprendre leurs activités anti-américaines.

 

Sous condition d'anonymat, un représentant du Pentagone a identifié les cinq détenus transférés au Qatar comme étant Mohammed Fazl, Mullah Norullah Noori, Mohammad Nabi, Khairullah Khairkhwa et Abdul Haq Wasiq.

 

Selon des documents du Pentagone publiés par l'organisation Wikileaks, les cinq hommes ont été transférés en 2002 à Guantanamo, où ils ont été enregistrés comme des détenus "à haut risque", "susceptibles de menacer" les Etats-Unis, leurs intérêts et leurs alliés.

 

Fazl serait responsable de la mort de milliers de chiites afghans entre 1998 et 2001.

 

Selon des responsables américains, les négociations sur la libération de Bowe Bergdahl ont été relancées par le soudain revirement de factions extrémistes des taliban qui s'opposaient jusqu'à présent à des discussions avec les Américains.

 

La libération de Bowe Bergdahl a été confirmée par les taliban afghans. "C'est vrai. Après plusieurs séries de négociations sur un échange de prisonniers, nous avons libéré le soldat américain, notre cher hôte, en échange de cinq commandants détenus à Guantanamo depuis 2002", a déclaré un responsable taliban.

 

Il a ajouté que le soldat avait été principalement retenu dans les zones tribales entre le Pakistan et l'Afghanistan depuis son enlèvement dans la province de Paktika en juin 2009.

 

L'échange de prisonniers survient alors que les Etats-Unis se désengagent progressivement du conflit en Afghanistan et pourrait favoriser des pourparlers entre le gouvernement de Kaboul et les taliban sur une paix négociée.

 

"Nous espérons que ce succès, limité mais important, créera l'opportunité d'élargir le dialogue sur d'autres questions. Mais nous n'avons aucune promesse à ce sujet", a déclaré un responsable américain impliqué dans la diplomatie.

 

Barack Obama a annoncé mardi dernier son intention de réduire à 9.800 soldats la présence américaine en 2015 en Afghanistan, au-delà de la date prévue pour la fin des opérations de combat de l'Otan à la fin.

 

Fin 2016, il ne devrait rester qu'un nombre de soldats suffisant pour assurer la simple protection de l'ambassade.