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Dans les hôpitaux: curetages ou avortements illégaux ?
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Dans les hôpitaux: curetages ou avortements illégaux ?
Pour épargner des frais de clinique à leurs patientes, certains médecins n’hésiteraient pas à faire admettre ces dernières à l’hôpital. Pour quoi faire ? Pour qu’elles se fassent avorter. Des opérations que certains déguisent ensuite en curetages. Piqûre de rappel.
Elle allègue avoir subi un curetage sans anesthésie, à l’hôpital, le 27 août. Et, Karen (prénom modifié) a porté plainte pour négligence médicale. Si, dans son cas, l’opération» en question n’aurait, selon ses dires, rien à voir avec une interruption volontaire de grossesse (IVG), cette affaire suscite des interrogations. Dans quels cas les curetages sont-ils pratiqués dans les hôpitaux ? Seraient-ce là des avortements déguisés ? Certaines blouses blanches se salissent-elles les mains pour une bonne poignée de roupies ? Des témoins accouchent.
À commencer par cette trentenaire, originaire des Plaines-Wilhems. «Il y a un an, j’en étais à mon quatrième mois de grossesse et j’ai voulu me faire avorter pour des raisons personnelles. Je suis allée voir un médecin, qui travaille à l’hôpital, dans sa consultation privée. J’ai pris la peine de lui faire comprendre que mon budget était restreint.» Moyennant Rs 20 000, ledit médecin lui aurait alors détaillé la marche à suivre. «Pour m’éviter les frais de clinique, il m’a dit qu’il allait me faire admettre à l’hôpital, deux jours plus tard. Il m’a demandé de me présenter là-bas et de dire que c’était pour un D&C (NdlR, dilatation et curetage). Tout s’est passé comme sur des roulettes, le corps médical, les infirmiers, notamment, ne m’ont pas posé davantage de questions.»
S’il n’a pas fallu de forceps pour les convaincre, cela veut-il dire que médecins et infirmiers sont de connivence ? Ces derniers sont-ils de simples instruments ? «Non. Ils sont souvent complices. Ils se partagent l’argent entre eux.»
Des membres du corps médical en rajoutent une couche. Cette pratique, expliquent-ils, n’est pas née hier, elle a depuis longtemps déjà dépassé le stade embryonnaire. «En 30 ans de carrière, j’en ai vu des choses», confie, pour sa part, un infirmier. «Des médecins qui transforment les salles des hôpitaux en cabinet privé, c’est une pratique courante.»
Mais encore ? «Il y a effectivement des blouses blanches qui, avec la complicité de mes collègues parfois, font passer des avortements illégaux pour des curetages. Je vous rappelle que les IVG sont réglementaires dans certains cas seulement (NdlR, voir la réponse du ministère de la Santé), mais certains en profitent.» Selon les dires de cet infirmier, dont la voix se contracte de colère, «dan lasal lopital, ou ena de kalite pasian. Bann ti dimounn ek bann seki finn pey dokter. Sabanla gagn tretman VIP. Pa gagn drwa dir zot nanye, sinon problem lor nu».
Comment se fait-il que personne n’ose assumer la paternité en ce qui concerne les dénonciations ? Le ministère a-t-il été alerté ? «Pfff. À part vous dire qu’ils vont initier une enquête, ils ne font pas grand-chose. Il y a quelques années, un médecin s’est retrouvé devant la justice pour avoir, justement, pratiqué un avortement illégal. On a vu une fois sa tête dans les journaux, et puis plus rien.»
Des avortements illégaux dans les hôpitaux, «ena enn ta sa», renchérit un autre infirmier. Le problème, selon lui, c’est qu’il «faut prendre ceux qui les pratiquent la main dans le sac. Chose qui n’est pas aisée puisque le médecin peut toujours dire que la patiente s’est fait avorter avant et qu’elle a eu des complications, d’où la raison du curetage». Résultat des courses, c’est la loi du silence qui prévaut. Il admet, par ailleurs, que certaines «infirmières qui assistent ces médecins sans scrupule prennent d’immenses précautions quand il faut se débarrasser du foetus».
Une infirmière soutient, pour sa part, que «nous avons souvent des patientes qui viennent à l’hôpital après que leur avortement a mal tourné. Elles prennent des comprimés et viennent nous voir quand elles font face à des complications».Elle n’a quant à elle, jamais assisté un quelconque médecin pendant qu’il pratiquait une IVG à l’hôpital. «Je ne vous dit pas qu’il n’y en a pas, il y a des brebis galeuses partout. C’est juste que moi, je n’ai jamais été témoin d’une telle scène.»
Consulté pour un avis sur le sujet, le Dr Chandra Shekar Ramdaursingh, gynécologue obstétricien, tient lui aussi à rappeler que l’avortement est autorisé dans certains cas seulement. «Et, effectivement, il y a des avortements illégaux qui sont pratiqués dans les hôpitaux, si l’on en croit les dires du corps médical. Sauf que, jusqu’à présent, personne n’a encore été pris sur le fait.» D’ailleurs, «il n’y a pas que pour des avortements que des médecins font admettre leurs patients payants à l’hôpital. C’est également le cas de certains qui doivent se faire opérer de l’appendicite ou qui doivent se faire enlever un kyste, par exemple», poursuit-il.
Pour le Dr Ramdaursingh, «le ministère devrait se pencher sur tous ces cas. Pour ce qui est des avortements, les autorités ne doivent pas seulement se concentrer sur les dossiers de certains médecins qui travaillent dans les hôpitaux mais aussi et surtout sur ceux des blouses blanches qui exercent dans le privé».
Car le mal est bel et bien là et a dépassé, depuis longtemps, le stade de la gestation.
Dans les hôpitaux: curetages ou avortements illégaux ?
Dans quels cas les curetages sont-ils pratiqués dans les hôpitaux ? Seraient-ce là des avortements déguisés ? Des témoins soutiennent que certaines blouses blanches n’hésiteraient pas à faire passer des avortements illégaux pour des curetages, moyennant paiement.
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