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Accident en rade de Port-Louis: confusion autour de deux morts

3 novembre 2014, 02:45

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Accident en rade de Port-Louis: confusion autour de deux morts

Que s’est-il réellement passé en rade de Port-Louis dans la nuit du vendredi 31 octobre? Ni les autorités portuaires, ni la police n’ont encore pu expliquer comment deux membres de la National Coast Guard (NCG) ont péri noyés près du Quai D lorsqu’un remorqueur de la Mauritius Ports Authority (MPA) est entré en collision avec leur Heavy Duty Boat (HDB) vers les 23 heures.

 

Bien que des membres d’équipage des deux navires de guerre indiens mouillant au Quai D aient immédiatement porté assistance au constable Kaushal Harpal, 31 ans, ainsi qu’au Trainee Police Constable Avinash Balloo, 24 ans, ils avaient déjà rendu l'âme lorsqu’ils ont été sortis de l’eau. Jwalah Beeharry, le timonier – le coxswain selon le terme utilisé par la MPA – du remorqueur Ochna, a déclaré à la police du port qu’il n’a pas pu éviter le HDB qui a soudainement viré devant lui.

 

Le Trainee Police Constable Avinash Balloo.

 

L’impact a été tel que le HDB des gardes-côtes a sombré après avoir chaviré. Kaushal Harpal et Avinash Balloo ont été projetés à l’eau et l’un d’eux s’est retrouvé coincé sous l’embarcation. L’autopsie conduite dans la matinée d’hier a révélé qu’ils portaient des blessures légères à la tête, ce qui confirme la thèse qu’ils ont perdu connaissance après avoir heurté les montants de l’embarcation au moment du choc, d’où la noyade.

 

Le constable Kaushal Harpal.

 

«Jwalah Beeharry venait de remorquer un chalutier en dehors de la rade et retournait au Quai C. Alors qu’il venait de dépasser les navires de la marine indienne au Quai D, il a soudain aperçu l’embarcation des gardes-côtes. En termes imagés, c’est comme si un éléphant avait embouti une fourmi», explique un porte-parole de la MPA. Il insiste également pour faire ressortir que c’est bien la première fois qu’un accident de ce genre se produit en rade de Port-Louis.

 

La MPA a essayé de faire libérer son barreur sur parole, la même nuit, mais la police a trouvé moyen de le garder en détention préventive, déplore notre interlocuteur. En évoquant une vieille affaire d’escroquerie pour laquelle Jwalah Beeharry est en liberté conditionnelle. «C’est triste que deux hommes sont morts. Mais un accident reste un accident. Il y a un code de navigation et Jwalah Beeharry est un excellent pilote qui a près de trois décennies d’expérience sur un remorqueur», ajoute-t-il.

 

Un ancien responsable du port recommande que l’enquête de la police soit menée de manière impartiale dans cette affaire, vu que deux des leurs ont péri. Il invite les Casernes centrales à visionner de près les images des caméras de vidéosurveillance du Caudan Waterfront, du Port-Louis Waterfront ainsi que celles sur les ponts des navires de la marine indienne pour déterminer comment l’accident est survenu.

 

«Le Coxswain a de l’expérience par rapport aux deux gardes-côtes... Il connaît la rade comme sa poche. Il se dirigeait vers le Quai C. Il ne pouvait pas être lancé à pleine vapeur. Tout laisse penser que l’accident s’est produit dans un angle mort. C’est comme si des piétons avaient soudain traversé devant lui», avance ce spécialiste.

 

Il demande également à la police du port de déterminer si les deux gardes-côtes portaient des gilets de sauvetage lorsqu’ils sont sortis en mer, comme le veut la procédure. Cette interrogation est partagée par les proches des deux victimes.

 

Le timonier sera traduit en cour

 

À hier soir, les Casernes centrales ont imposé un black-out complet sur cette affaire. La version officielle est que l’accident a eu lieu une quinzaine de minutes après que le HDB est sorti en patrouille. C’est-à-dire peu après que les constables Balloo et Harpal ont pris leur quart lors du second shift.

 

Toutefois, une autre version circule dans les milieux des Casernes centrales. En quittant le Harbour Security NCG Post, situé entre le Port-Louis Waterfront et le Grenier, pour débuter leur patrouille, les deux gardes-côtes auraient pris deux membres d’équipage de la marine indienne à bord. Ces derniers revenaient d’une soirée. Ils auraient accosté l’INS Talwar ou l’INS Mumbai, qui sont en tournée dans l’océan Indien pour une cinquantaine de jours, afin que les marins puissent rejoindre leurs couchettes.

 

C’est lorsque le HDB s’est séparé des deux navires que le drame s’est produit. Plus particulièrement à l’emplacement qui est décrit comme un blind spot, selon les enquêteurs. À hier soir, ni le commandant de la NCG, ni les autres hauts gradés de la police responsables de la zone portuaire ne pouvaient commenter cette version du drame. Le premier ne répondait pas à son téléphone, les seconds étant davantage occupés par la visite de Sushma Swaraj, ministre indienne des Affaires étrangères, à l’Aapravasi Ghat, ce dimanche.

 

Un haut gradé aux Casernes centrales explique, lui, que des experts se penchent actuellement sur les mouvements du HDB et du remorqueur dans la nuit de vendredi. Jwalah Beeharry s’en tenant à sa version, la police devra vérifier pourquoi le HDB de la NCG a viré de bord devant son remorqueur s’il se conformait à son plan de navigation dans le cadre d’une patrouille normale. En attendant, le timonier sera traduit en cour pour homicide involontaire.