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Alan Ganoo: «Je n’ai jamais voulu usurper la place de mon leader»

18 décembre 2014, 11:07

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Alan Ganoo: «Je n’ai jamais voulu usurper la place de mon leader»

Pour le leader adjoint des mauves, l’heure est à l’introspection et à l’autocritique pour «redonner au MMM sa grandeur d’antan». Toutefois, précise Alan Ganoo, Paul Bérenger doit être partie prenante de toute cette démarche...

 

Dans une de vos récentes interviews, il semblerait que vous vouliez prendre le leadership du MMM. N’est-ce pas là un crime de lèse-majesté ?

Je suis très étonné par votre question. Je n’ai jamais fait état, dans quelque interview que ce soit, de ce que vous mentionnez. Vous me prêtez des intentions que je n’ai pas. Le MMM c’est une partie de moi-même, c’est mon devoir de dire les choses qui l’aideront à se relever. Le parti représente encore l’espoir pour la moitié de la population.

 

Il y a tout de même cette perception... N’a-t-elle pas été évoquée jeudi au bureau politique (BP) ?

La perception c’est dans la tête des gens qui ont envie d’interpréter à leur guise ce que j’ai dit. Si vous relisez l’interview, vous verrez que j’ai dit que tout le monde au MMM reconnaît Paul Bérenger comme le leader incontesté. J’ai aussi dit que, compte tenu de son poids, de son histoire et de sa contribution au parti, toute évolution ou révolution au MMM nécessite sa bénédiction. C’est à lui, en tant que leader, de venir de l’avant avec une formule pour insuffler un nouveau dynamisme au sein du parti.

 

Le parti panse ses blessures. Nous devons accepter que le revers que nous avons subi est sans précédent. L’heure est à l’introspection et à l’autocritique pour jeter les bases d’un nouveau départ. Bérenger doit être partie prenante de tout ceci.

 

Quant à moi, je n’ai jamais eu l’ambition d’usurper la place de mon leader. Mon ambition personnelle n’a jamais guidé mon action politique. Mon souci principal, comme des milliers de militants, est de redonner au MMM sa grandeur d’antan. Qu’il reste la première force politique du pays.

 

Parlant d’autocritique, Bérenger va-t-il enfin reconnaître sa part de responsabilité dans cette défaite?

Tout le monde reconnaît qu’il y a eu des erreurs de jugement. L’accord avec le Parti travailliste (PTr) a été entériné dans un contexte donné. Avec le recul, l’on se rend compte qu’on a payé pour l’impopularité des rouges.

 

La direction du MMM a sous-estimé cet élément. On pensait que le package qu’on avait obtenu allait override le lourd bilan du PTr. Bérenger est connu pour être un homme attaché aux valeurs que sont la démocratie et l’unité nationale ainsi que pour son combat contre la fraude et la corruption. Malgré tout cela, il a encore une fois été victime d’une campagne à relent ethnique en tant que candidat au poste de Premier ministre. Je suis étonné de voir comment, par un trait de plume, une partie de l’électorat a occulté la contribution d’un homme qui a façonné la pensée politique et l’histoire de Maurice.

 

Ou était-ce parce que le pouvoir semble avoir été privilégié au détriment des convictions du MMM ?

Le combat de tout parti politique, c’est d’accéder au pouvoir. Pour améliorer le niveau de vie des citoyens. Sur ce chapitre, le MMM a un bilan éminemment positif. Avec cet accord, on voulait reconquérir le pouvoir sur la base d’un programme. On voulait relancer l’économie, élargir l’espace démocratique, nous battre contre le chômage et la pauvreté. Non pas pour l’avantage personnel de Bérenger ou de Ramgoolam.

 

La preuve est que le MMM n’a jamais été pouvoiriste. Il a démissionné du gouvernement quand son programme n’était pas respecté. Oui, nous avons insisté pour que Bérenger soit Premier ministre pour cinq ans. Il le méritait. Mais l’adversaire a fait feu de tout bois, dont son origine ethnique.

 

Bérenger dit avoir accepté malgré lui le poste de leader de l’opposition. Est-ce que cela ne le décrédibilise pas davantage ? Surtout qu’il a négocié une alliance avec Ramgoolam pendant un an.

Au contraire. C’est tout à son honneur qu’il ait indiqué qu’il souhaitait passer le relais. Il y a cependant un fort courant au sein du parti qui insiste pour qu’il continue à occuper ce poste. Avec raison.

 

Le MMM traverse un moment sensible de son histoire, ce n’est pas le moment de déstabiliser davantage l’électorat. Il doit «keep cool», relativiser et prendre les mesures pertinentes pour que le parti capitalise sur les compétences. 

 

C’est injuste de dire que Bérenger n’a rien fait en un an. Il a discuté de la réforme électorale suite au jugement d’une instance de l’Organisation des Nations unies. Nous ne pouvions rater cette occasion historique pour trouver un consensus.

 

Cette élection nous démontre encore une fois qu’il faut réformer notre système électoral. 37% de l’électorat a permis à une alliance d’occuper 75% des sièges à l’Assemblée nationale.

 

Les dinosaures ne devraient-ils pas céder la place aux jeunes comme Ramano, Uteem et Meea ?

Le parti a l’avantage de compter des vétérans et des jeunes en son sein et a l’espace suffisant pour permettre à tous d’émerger. Reza Uteem et Kavi Ramano ont démontré leur proximité avec leurs mandats et leur performance au Parlement montre qu’ils sont devenus des dirigeants nationaux.

 

Je suis fier, personnellement, d’être le seul à avoir obtenu un 3-0 dans ma circonscription, la plus grande de l’île, et d’y avoir été élu huit fois. Je conseille aux jeunes d’être attachés aux valeurs du MMM tout en restant accessibles et humbles. Mieux vaut être un dinosaure efficace et productif. Et contribuer à l’avancement du parti et du pays. N’avons-nous pas un Premier ministre de 84 ans ?

 

Est-ce vrai qu’il y a une absence d’esprit de contradiction au MMM ?

Cette question découle d’une mauvaise perception du rôle de Bérenger au MMM. C’est vrai qu’il a une forte personnalité. Très souvent, en sa qualité de leader, c’est lui qui dicte et qui initie la ligne politique du parti. Mais tout ceci se fait dans la démocratie. Les instances fonctionnent. Il y a des désaccords. Ce n’est pas vrai de dire que Bérenger agit capricieusement. Sur la question d’alliance avec le PTr, le BP et le comité central ont eu l’occasion de s’exprimer. Il a même proposé un vote à bulletin secret afin que tous puissent s’exprimer librement. Trois ont voté contre.

 

La tenue de l’assemblée des délégués aujourd’hui (NdlR samedi 20 décembre) est une preuve de l’attachement du MMM à la démocratie au sein de ses structures. C’est une des prémices vers l’élection des nouveaux dirigeants en février.

 

Bérenger a aussi attribué la défaite de l’alliance PTr-MMM aux médias libres. N’est-ce pas plutôt le résultat d’une mauvaise communication ?

Les élections sont derrière nous, le MMM doit normaliser ses relations avec cette partie de la presse avec laquelle on a eu des soucis. Le boycott a débuté avec une émission de Radio Plus. Il était demandé au MMM de défendre le bilan du PTr. On ne pouvait le faire.

 

Ensuite, il y a eu de la désinformation qui a joué contre l’alliance. Celle-ci n’a pas été acceptée par une partie de la presse qui ne voulait pas d’un retour de Ramgoolam au pouvoir.

 

Quelle est la position du MMM sur la façon dont Pradeep Jeeha a commenté un enregistrement concernant Kobita Jugnauth ?

S’attaquer à la vie privée des gens a toujours été l’apanage des lâches et des faibles. Une enquête policière est en cours et je m’abstiendrai de tout commentaire. Laissons-la déterminer les responsables de cette machination odieuse.

Je mets ma tête à couper que le leader du MMM n’a rien à faire avec la diffusion de cette bande audio. Je connais beaucoup de cas, durant les campagnes électorales, où des personnes ont voulu salir la réputation de certains adversaires en s’attaquant à leur vie privée. Sans hésitation, Bérenger leur a montré la porte de sortie. Il en a fait un principe.

 

Comment expliquez vous la victoire au n° 14 ?

Au-delà de grands débats durant la campagne, il y a la proximité du candidat qui compte. Il pèse aussi lourd dans le choix de l’électeur. J’ai toujours été accessible, humble et proche de mes mandants. En vérité, je ne suis pas un politicien classique. J’ai une relation atypique avec l’électorat. Il est de ma famille. Si j’ai un conseil à donner aux jeunes députés, c’est de se rappeler que le peuple est allergique à l’arrogance.