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Iqbal Mallam-Hasham: «Nandanee Soornack a contribué à la défaite de Ramgoolam»
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Iqbal Mallam-Hasham: «Nandanee Soornack a contribué à la défaite de Ramgoolam»
Amer, Iqbal Mallam-Hasham, l’ami de l’ex-Premier ministre, attribue la défaite de l’alliance rouge-mauve aux «caprices» de Nandanee Soornack, entre autres. Le directeur de la State Investment Corporation montre aussi du doigt le style de leadership de Navin Ramgoolam.
Comment se porte un nominé politique après un changement de régime ?
Mon sentiment peut paraître paradoxal. Voire cynique. Pour la première fois dans l’histoire de Maurice, une défaite a créé pas mal de soulagement parmi les travaillistes.
Du soulagement ? Comment ?
Le leadership de Navin Ramgoolam, son style surtout, a fait énormément de tort au travaillisme. Le projet de la IIe République avait, tant sur le fond que dans la forme, les germes d’une dérive institutionnelle et pouvoiriste.
Le pays s’était retrouvé face à deux individus dépassés par les événements qui ont décidé d’un projet sans aucune concertation avec le plus grand nombre. Le constitutionnaliste Maurice Duverger, expert en Ve République de France, se retournerait dans sa tombe s’il prenait connaissance de ce projet.
Pourquoi le projet de la IIe République vous rebutait-il autant ?
Avez-vous déjà entendu parler d’un président voulant assister à un conseil des ministres quand il en a envie? Ils ont essayé de travestir la formule française. Kot ounn trouve ou ? Dan ki pei ?
Pire, ce projet allait maintenir quelqu’un au pouvoir pendant sept longues années. Créant, par la même occasion, une cohabitation entre deux hommes qui ne sont pas de la même famille politique.
Vous êtes un ami proche de Navin Ramgoolam. Avez-vous pu discuter avec lui après la débâcle du 11 décembre ?
Absolument pas. Il avait déjà coupé contact avec moi depuis plusieurs mois. Il est demeuré inaccessible même lorsqu’il a repris le portefeuille des Finances au départ de Xavier-Luc Duval du gouvernement. On lui envoyait plusieurs dossiers, mais ils ne retournaient jamais vers la State Investment Corporation (SIC). Suresh Seeballuck, secrétaire au Cabinet et membre du conseil d’administration de la SIC, était le seul saint à qui nous pouvions nous vouer.
Comment expliquez-vous la façon de fonctionner de l’ex-Premier ministre ?
Je crois qu’il avait d’autres priorités… En fin de compte, être inaccessible a toujours été le style de Navin Ramgoolam. Vous seriez étonné de savoir le nombre de personnalités des secteurs public et privé qui ont, à maintes reprises, sollicité un rendez-vous avec lui. Elles ne l’ont pas obtenu, alors qu’une poignée d’agents pouvaient rester dans son bureau pendant des heures.
Êtes-vous toujours l’ami de Navin Ramgoolam ? Comment l’avez-vous connu ?
Il était l’ami de mon frère Nash. C’est chez lui, à Londres, que j’ai croisé Navin. À l’époque, son père était Premier ministre. Nash avait ses entrées à la rue Desforges. Notre amitié s’est approfondie avec le temps.
J’ai aussi été l’un de ceux qui l’ont conseillé pour l’alliance entre le PTr et le MMM en 1995. J’ai été au fameux dîner donné à Riverwalk. À l’époque, Milan Meetarbhan, Dan Maraye, Sarat Lallah, Kadress Pillay, Joseph Tsang Mang Kin et moi-même étions de ceux qui visaient ses discours avant qu’il ne se rende à un meeting.
L’alliance de 1995, pour votre gouverne, a été concrétisée à Londres. Chez Nash. Dans le secret absolu. Et non sur la place publique.
Aujourd’hui, évidemment, entre Ramgoolam et le pays, j’ai un choix à faire.
Votre ami a-t-il tant changé ?
L’appétit du pouvoir l’a transformé. Un de ses conseillers, qui a été candidat aux dernières élections, me faisait la réflexion suivante : Navin adore le pouvoir absolu. S’il a accepté de faire alliance avec le MMM, c’est qu’il s’est senti en position de faiblesse. Il sentait l’usure du pouvoir. Linn kwar kouto dan diber pou gagn 60-0. Il a cependant eu un choc lors du meeting du 12 octobre. Son entourage a commencé à parler d’un 45-15, avant d’admettre que la lutte serait serrée.
The writings were already on the wall.
Pourquoi tant d’amertume ?
J’ai déjà couché ce que je ressentais dans une opinion que j’ai demandé à un journal de publier avant les élections. Je l’avais signée sous un nom de plume. Le rédacteur en chef n’a pas accueilli mes critiques contre Navin, soutenant que j’étais pro-Jugnauth. Donc biased.
Ce qui m’a le plus dégoûté, c’est Nandanee Soornack. Elle s’est permise de m’appeler, il y a trois mois, pour me menacer. Linn dir mwa : «Misie Iqbal, si ou le gagn enn tiket ou si ou le rest SIC ou DBM, fer byen atensyon a seki ou pe fer.» Elle était hors d’elle parce que Rakesh Gooljaury était descendu au Touessrok.
Honnêtement, je n’ai toujours pas saisi pourquoi elle m’a contacté. Linn dir mwa Touessrok pa pou SIC sa ? Monn dir li mo pa pe konpran. Pensait-elle réellement que Rajesh Gooljaury devait passer par moi pour descendre à cet hôtel ? Ce sont de telles dérives qui m’ont dégoûté.
Peut-on attribuer une part de la défaite de Ramgoolam à Soornack ?
Définitivement. À 50 %. Mo afirm li e mo kapav vinn prouv li. Nandanee Soornack a voulu diriger le pays par télécommande. Elle voulait être l’Imelda Marcos de Maurice. Eski sa li akseptab ? Sa kinn dégout mwa de Ramgoolam et du travaillisme.
Personne au sein des instances du PTr n’a eu le courage de dire à Navin ses quatre vérités. Des ministres faisaient la queue chez Nandanee Soornack pour obtenir des faveurs. Pour obtenir un ticket. Moi, je n’ai jamais quémandé d’investiture.
Avez-vous déjà démissionné ou attendez-vous qu’on vous maintienne à votre poste ?
J’ai déjà soumis ma lettre de démission au ministère des Finances. Je lui ai juste demandé de me permettre de remettre les gros dossiers à mon successeur. Voilà pourquoi je me permets de vous dire ce que j’ai sur le coeur.
Je ne suis pas un roder bout. Sinon, je serais parti rencontrer sir Anerood Jugnauth quand je me suis rendu au dernier grand meeting de l’alliance Lepep. Pour moi, quand sir Anerood s’est fixé un objectif, il va le réaliser. Ce qui tranche avec la méthode Ramgoolam.
Quel est votre bilan à la SIC durant ces neuf dernières années ?
Il y a plusieurs projets qui ont été mis en chantier. Parmi, il y a le Port-Louis Fund, qui est le premier fonds du pays. La SIC a également géré de manière transparente le Stimulus Package.
J’ai toutefois un regret. J’ai frappé aux portes de Rama Sithanen, de Pravind Jugnauth et de Xavier-Luc Duval pour suggérer la privatisation des casinos. La SIC ne peut continuer à verser une enveloppe salariale de Rs 4 millions par mois alors que les casinos fonctionnent à perte.
Je voulais que la SIC se désinvestisse des casinos, mais les différents ministres des Finances se sont défilés. Un groupe était prêt à faire l’acquisition de 51% des actions pour un montant de 34 millions de dollars (environ Rs 1,02 milliard).
Sir Anerood Jugnauth a toujours critiqué cette initiative. Y a-t-il trop d’agents politiques aux casinos?
Exactement. C’est la raison principale pour laquelle je voulais que la SIC se désengage des casinos. Il y a eu tout un débat sur ces personnes que je qualifierais plutôt de privilégiés politiques.
À combien estimez-vous cette catégorie d’employés ?
Ils sont au moins 200. Il y a les dirigeants politiques qui appellent pour qu’on recrute untel ou pour offrir une promotion à un autre. Pendant ces cinq dernières années, j’ai résisté à toutes sortes de pressions. Il n’y a eu aucun recrutement, aucune promotion.
Est-ce la raison pour laquelle Ramgoolam vous tient à l’écart ?
Possible. Beaucoup de ministres étaient en froid avec moi. Navin, lui, ne voulait pas se débarrasser des casinos. Pour lui, il était sans doute plus important de maintenir ses partisans à leurs postes. La privatisation aurait poussé ces gens à s’améliorer et à mieux accomplir leur devoir. Il y avait comme une peur bleue à chaque fois que j’évoquais la question de partenariat stratégique.
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