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Enquête policière: la fortune de Soornack disséquée
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Enquête policière: la fortune de Soornack disséquée
Comment Nandanee Soornack, partie de rien, a-t-elle fait pour amasser une immense fortune en même pas cinq ans? Quels ont été les procédés utilisés par l’amie de l’ex-Premier ministre Navin Ramgoolam pour s’approprier des commissions de plusieurs dizaines de millions de roupies dans un accord conclu entre la société suisse Dufry et le corps parapublic gérant les boutiques hors taxe à l’aéroport de Plaisance en 2012?
Ce sont deux des questions fondamentales auxquelles des limiers du Central Criminal Investigation Department (CCID) sont appelés à fournir des réponses dans le cadre de l’enquête ouverte contre la patronne d’Airway Coffee pour blanchiment. Déjà empêtrée dans de nombreux high profile cases, l’équipe de l’assistant commissaire de police (ACP) Heman Jangi aura à réunir des éléments à charge contre l’ancienne vendeuse de cotomili actuellement assignée à résidence en Italie.
Y a-t-il eu connivence entre Soornack et Ramgoolam ?
L’autre mission du CCID consiste à établir s’il y a eu connivence entre Nandanee Soornack et l’ex-chef de gouvernement, déjà inculpé de blanchiment après la découverte de Rs 220 millions en espèces à son domicile, pour un délit passible d’au moins 10 ans de prison. Les enquêteurs auront à fouiller le passé de l’ancienne habitante de Carreau-Laliane et dépoussiérer de vieilles dépositions, comme celle de Pravind Jugnauth dans l’affaire du Mauritius Institute of Training and Development en janvier 2013, qui détaillent la nature présumée de ses liens avec Navin Ramgoolam.
Outre cet aspect de la vie privée de Nandanee Soornack, les hommes de l’ACP Jangi devront se mettre en contact avec la direction de la Mauritius Duty Free Paradise (MDFP), une filiale d’Airports of Mauritius Ltd (AML). Epaulés par la commission anti-corruption, ils devront obtenir l’ensemble des échanges de correspondances et les contrats signés avec Dufry, la société qui l’approvisionne en produits hors taxe, après que Navin Ramgoolam a décidé qu’il fallait se séparer de l’allemand Gebr Heinemann.
Les explications de Serge Petit attendues
Outre les membres du conseil d’administration de la MDFP, l’ancien directeur Serge Petit aura à expliquer les raisons pour lesquelles Dufry a été choisie pour fournir l’aéroport de Plaisance en produits duty-free. Et pourquoi cette société a décroché le contrat de gestion de la MDFP. Il devra enfin dire s’il était au courant que Nandanee Soornack et l’homme d’affaires Rakesh Gooljaury, ancien homme de confiance de Navin Ramgoolam, négociaient avec Dufry en tant qu’intermédiaires.
Les deux se sont rendus à Paris pour démarcher des fournisseurs en remplacement de Gebr Heinemann. Rakesh Gooljaury présentait alors Nandanee Soornack comme sa sœur cadette bien qu’elle soit plus âgée et faisait croire à tout ce monde que Serge Petit était son employé…
Rakesh Gooljaury sous les feux des projecteurs
Rakesh Gooljaury n’échappera pas à un interrogatoire et ses propos seront intéressants à suivre, dans la mesure où il a déjà «dénoncé» Navin Ramgoolam quant au cambriolage survenu au campement de ce dernier dans la nuit du 2 au 3 juillet 2011. De nouveau ami avec le Mouvement socialiste militant (MSM), il devra expliquer qui est le «véritable» cerveau derrière la demande de commissions auprès de Dufry.
Le patron de Fashion Style aura également à dire qui a décidé qu’il fallait créer la société Frydu en Suisse. Celle-ci avait comme fonction première de percevoir les commissions deDufry ni vu ni connu des autorités mauriciennes.
Rakesh Gooljaury devra aussi révéler pourquoi Nandanee Soornack et lui-même ont revendu leurs parts au sein de Frydu à la société chypriote Wigam Holdings. Laquelle est dirigée par l’Irlandais Thomas Francis Gleeson, un grand ami de Navin Ramgoolam qui a son mot à dire sur chaque appel d’offres international pour un gros contrat public, à l’instar de l’acquisition des appareils Airbus par Air Mauritius.
Étant l’homme qui a propulsé Nandanee Soornack en affaires, notamment en créant Airway Coffee, Rakesh Gooljaury sera questionné sur le monopole obtenu par cette société pour le service traiteur à l’aéroport de Plaisance sous le mandat de Navin Ramgoolam. Notamment sur les privilèges accordés à la quadragénaire par AML et sur la provenance de l’argent qu’elle a utilisé pour acquérir de nombreuses propriétés à Maurice comme à l’étranger.
Sur ce dernier point, Rakesh Gooljaury aura des révélations à faire. Le 29 juillet 2009, il a avancé Rs 5,5 millions à Nandanee Soornack pour qu’elle procède à l’acquisition d’une maison pour son fils Akshawv Aditish Oogarah dans la région de Réunion, à Vacoas. Un chèque de Fashion Style a servi pour cette transaction.
Cerise sur le gâteau: Jack International Ltd, société spécialisée dans la vente de produits électroniques à l’aéroport, a injecté Rs 25 millions dans l’achat de la propriété de la famille Maingard, dans un quartier huppé de Floréal, par Nandanee Soornack en février 2011. Cette propriété a été achetée au prix cassé de Rs 30 millions car elle coûtait presque le double au taux du marché à cette époque-là.
Les deux sociétés de Rakesh Gooljaury ont également dû se plier aux caprices de l’ancienne vendeuse. Le 5 mars 2014, le 3 avril 2014 et le 30 avril 2014, un total de Rs 3 millions lui a été versé. Sans compter de grosses sommes qui lui ont été remises en devises et des paiements pour des billets d’avions pour l’Italie, la location de voitures de luxe ou des chambres d’hôtel à Dubaï.
Des factures à hauteur de Rs 13,4 millions
Fashion Style a aussi épaulé Airway Coffee en réglant ses factures à hauteur de Rs 13,4 millions et en lui avançant Rs 10 millions. Rakesh Gooljaury a donc subventionné Nandanee Soornack à hauteur de Rs 76 millions. L’entourage de l’amie de Navin Ramgoolam confirme: une mise en demeure lui a été servie le mois dernier afin qu’elle rembourse cette somme.
Le CCID aura, de ce fait, à déterminer pourquoi Nandanee Soornack vivait aux crochets de Rakesh Gooljaury et quelle est la provenance du dépôt de plusieurs millions de roupies qu’elle possède à l’ex-Bramer Bank. Il se penchera aussi sur les 24 transferts qu’elle a effectués de l’Italie depuis qu’elle a quitté Maurice au lendemain des législatives du 10 décembre. Autre colle pour la police: d’où a-t-elle tiré l’argent qu’elle a entassé sur un compte dans une banque suisse ?
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