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Flic-en-Flac: la route de la mort
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Flic-en-Flac: la route de la mort
Une arène de rodéo ? Une piste de Formule 1 ? Le décor du film Fast and Furious ? Non, la route qui mène à Flic-en-Flac est-elle un Highway to Hell pour les intimes. Si elle a été baptisée ainsi, c’est parce qu’elle est tès souvent le théâtre de plusieurs accidents fatals. Pourquoi ?
Parce que les fous du volant l’empruntent chaque week-end, soutient Dario Moothen, 48 ans. Cela fait 30 ans que ce chauffeur, employé dans une compagnie privée, avale les kilomètres au quotidien. «Les gens partent à la plage pour se relaxer après une dure semaine de labeur.» Comme il n’y a qu’une seule sortie à la hauteur de Flic-en-Flac, ils se retrouvent coincés dans les embouteillages. Le stress, l’adrénaline et l’alcool aidants, tout part en vrille… Et d’ajouter : «Prémié lokazion enn dimounn gagné, li pou doublé. Sirtou si ou rétrouv ou déryer enn bis individiel ki roul kouma torti.»
Pour remédier au problème, il faudrait que les autorités passent à la vitesse supérieure, en aménageant une autre voie d’accès et de sortie dans cette région très fréquentée. «Zot inn répar simé-la, zot inn élarzi li, mé péna lot simé sorti. Get-la komyé morselman pé monté. Biento ou pou tann dir loto inn rant direk dan enn salon.»
Ashwin Mangaram, lui, emprunte une autre ruelle. Si cette route est une tueuse professionnelle, c’est parce que les radars qui y sont installés ont fermé l’oeil depuis quelque temps déjà. Ce pompiste de 32 ans, qui travaille et habite à Flic-en-Flac, est d’avis que les caméras de surveillance contribuaient à dissuader ceux qui se prennent pour Alain Prost, Michael Schumacher ou Lewis Hamilton. «Tou kalité ou trouvé, sirtou dan week-end. Zot ti pé inpé pokpok kan ti éna kaméra, aster zot fer séki zot anvi.»
Un avis allègrement partagé par Cédric Cunsamy. Pour cet étudiant de 20 ans, qui habite également à Flic-en-Flac, les radars aidaient à calmer l’ardeur de certains Don Juan à moto ou en auto, que l’on croise fréquemment sur la route qui mène à la plage. «Bann zéness glasé. Ils font rugir le moteur pour impressionner les filles, quitte à se briser les tympans et les os.» Courses et rallyes sont ainsi chose courante, surtout quand ils ont quelques verres dans le nez. «Il faut rapidement rebrancher les caméras.»
Selon Cédric, un autre moyen de freiner l’excès de zèle des chauffards serait d’exercer un contrôle plus strict sur les véhicules dont les propriétaires sont adeptes du tuning. Son raisonnement : «Pas de moteur modifié, pas de pot d’échappement qui pète le feu, pas de jantes rutilantes, pas de grosses roues, donc pas de raison de frimer, donc respect du code de la route et vitesse réduite.» Quelques lampadaires supplémentaires, à la hauteur de Beaux-Songes, surtout, ne seraient pas superflus, fait valoir le jeune homme.
«Mo dakor bizin amizé. Mé matlo, pa abizé»
Pour que ceux qui ont une caisse ne terminent pas leur course dans un coffre en bois, il faudrait également mettre l’accent sur la conduite défensive, qui permet de réduire l’agressivité au volant, souligne Melvin Sohaduth, 36 ans, tour-opérateur installé à Flic-en-Flac. «Il faut que les gens réapprennent à conduire.» Pour cela, il faut faire appel aux crocodiles, notamment.
«J’ai pris des cours à l’étranger et on m’a appris qu’il fallait pouvoir dire ‘un crocodile, deux crocodiles’ pour jauger la distance correcte entre deux véhicules. Sinon, ça veut dire que je suis trop près et que je ne pourrais pas freiner à temps s’il y a un pépin.» De petites astuces qui peuvent aider à sauver des vies, estime ce père de famille.
Ce qui exaspère ce policier rencontré alors qu’il patrouillait près de la plage, c’est l’inconscience de certains automobilistes. «Mo dakor bizin amizé. Mé matlo, pa abizé. Lalkol ek vites, sé enn cocktail mortel.» Les autorités auront beau essayer toutes les tactiques, restreindre et sanctionner, les accidents fatals continueront à faire la une des journaux si les automobilistes ne font pas preuve de prudence, martèle le flic.
Ne faudrait-il pas être plus sévère pour les y aider ? Patrouilles et barrages sont-ils fréquents aux petites heures du matin, à la sortie des boîtes de nuit, par exemple ? «Oui, on patrouille jour et nuit. On installe les barrages à différents endroits pour que les automobilistes ne les esquivent pas.»
Une autre question qu’il ne faut pas esquiver : le rôle des auto-écoles. Les futurs chauffeurs sont-ils suffisamment «éduqués» ? Sont-ils vraiment conscients des dangers qui les guettent ? D’aucuns arguent que les moniteurs se contentent du strict minimum. «Ou finn déza trouv enn moniter donn léson aswar ou ? Pour ce qui est de la mécanique, ce n’est même pas la peine», déplore Dario Moothen. On apprend à conduire mais pas à reconnaître les signes annonciateurs d’un ennui mécanique, par exemple. «Si ou frein inn koumans persé, ou bizin konn rékonet bann sign pou kapav évit aksidan.»
Il est vrai que certains moniteurs se concentrent uniquement sur le test de conduite à passer, concède Manoj Rajkoomar, secrétaire de l’Association des moniteurs d’auto-écoles. Résultat des courses : «Le conducteur qui ressort de ladite école n’est pas forcément un automobiliste averti.» Et de se demander si les moniteurs ont eux-mêmes reçu la formation adéquate pour dispenser des cours aux aspirants chauffeurs.
Ces derniers devraient également être autorisés à emprunter l’autoroute pendant les leçons de conduite, histoire de bien se rendre compte des dangers que représente la route et les anticiper. «Je ne dis pas qu’il faut le permettre pendant les heures de pointe, mais on pourrait trouver un créneau.» Manoj Rajkoomar fustige aussi les autorités, qui, selon lui, devraient regarder autre chose que leur nombril. «Il faut organiser des discussions avec ceux qui sont sur la route tous les jours, comme les moniteurs, les techniciens, les automobilistes eux-mêmes. Enfiler un costume, s’asseoir derrière un bureau et devant un écran d’ordinateur, ce n’est pas ça qui réglera le problème…»
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