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Vikash Dreepaul: un collecteur d’eaux usées nous met au parfum

14 septembre 2015, 08:03

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Vikash Dreepaul: un collecteur d’eaux usées nous met au parfum

Il est jaune. Il ne sent pas la rose. Quand on roule à côté de lui, on n’a qu’une envie, c’est de le dépasser. Lui, c’est le camion qui transporte les eaux usées, poétiquement appelé le camion c… (censuré). Des questions dès lors: comment font ceux qui le conduisent? Comment devient-on «ébouseur» ? Réponses qui font un pied de nez aux idées reçues.

 

Il a toujours exercé le métier de camionneur. Depuis dix ans, il monte à bord d’un camion de la compagnie D. Seeven. Oui, celui-là même qui se charge de vider les fosses septiques après que vous avez vidé votre vessie (restons polis).

 

La journée de Vikash Dreepaul démarre à 5 heures. Après un petit tour aux cabinets d’aisance et le petit-déjeuner – pas toujours dans cet ordre – il débarque à Henrietta, où l’attend l’un des 40 poids lourds de l’entreprise. S’en suit une petite inspection, avant de prendre la route. Les clients ? Des entreprises, des hôtels, des hôpitaux, des particuliers, entre autres. Une fois sur place, une «inspection» s’impose. On déroule ensuite l’attirail du parfait collecteur d’eaux usées. La pompe se charge de faire «les» restes. Le nez souffre-t-il atrocement ? «Non, fini abitié.» S’est-il déjà trouvé nez à nez avec des «choses» pas très nettes ? «Non, pa ankor trouv okenn monstre ladan !»

 

Et Madame dans tout ça ? Varuna retrousse-t-elle le nez quand elle lui fait un bisou lorsqu’il revient du travail? «Éoula ! Baigné met parfum tousala bien, loder-la pa resté. Sa fer dix an ki mo Madame ar mwa, sa vé dir bizin santi bon, non ?» En fait, si la cargaison est «spéciale», le travail, lui, est le même que pour les autres chauffeurs de camion, souligne Vikash, qui est père de trois enfants. Mais pour éviter les problèmes de santé, il se fait vacciner régulièrement, tout comme ses collègues. «Compagnie fer nou fer pikir kont hépatite.»

 

Des «pompaz», qui durent environ 30 minutes, il en effectue environ trois ou quatre par jour, confie-t-il. Sa journée de travail, elle, peut se terminer à 14 heures ou à 17 heures. Peut-on connaître le salaire de quelqu’un qui côtoie au quotidien de la matière fécale ? «La base est de Rs 8 500 mais cela peut grimper jusqu’à Rs 25 000 ou Rs 28 000 dépendant des heures supplémentaires et de l’assiduité au travail.»

 

Et a-t-on envie d’aller aux toilettes après une journée de dur labeur ? «Normal.» De toute façon, «oblizé alé, pa kapav tini sa.»

 


 

MEET THE BOSS…

 

 

Son nom, on le voit sur tous ses camions. Et le personnage qu’est Dhagadisen Seeven, chanteur à ses heures perdues, mérite un petit détour. Ce Lucky Luke à rouflaquettes emploie une centaine de personnes. Comment lui est venue l’idée de se lancer dans le business de la collecte d’eaux usées ? Ses toilettes étaient-elles bouchées ? «Non. Mo ti al en France et monn trouvé kouma bann-la fer. Monn réalizé qui péna sa Maurice.»

 

À voir la flotte de véhicules et quand on sait qu’il collabore avec la Wastewater Management Authority (WMA), on devine que le business est florissant. Pour faire vider une fosse septique, il faut compter entre Rs 1 000 et Rs 4 000, dépendant du volume de travail.

 

Quid du chiffre d’affaires ? Nous ne le saurons pas. «Nou éna boukou frais : bizin paye dé patentes, enn WMA ek enn lot pou kapav al dévidé.» Justement, où décharge-t-il la précieuse cargaison ? À la station d’épuration, à Roche-Bois.

 

La société D. Seeven s’est aussi lancée dans la location de toilettes mobiles. Elles sont disponibles pour les événements spéciaux. «Nou ti loué kan président Modi de l’Inde ti vini», renchérit Endy Seeven, fils du patron. Le prix de la location de ces luxueuses latrines varie entre Rs 500 par jour et Rs 20 000 pour les VIP… La peau des fesses, dites-vous ?