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Premika Teeluckdharry, femme sapeur-pompier : Une pionnière au tempérament de feu
10 octobre 2015, 06:57
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Premika Teeluckdharry, femme sapeur-pompier : Une pionnière au tempérament de feu
Durant la semaine écoulée, les Fire Services de Maurice ont accueilli 160 recrues, dont sept femmes. Un recrutement qui fait plaisir à la première promotion de cinq femmes datant de janvier 2012 et dont fait partie Premika Teeluckdharry.
Elle recevra son Bachelor of Science en droit et gestion de l’université de Maurice la semaine prochaine. Mais Premika Teeluckdharry, âgée de 27 ans, n’entend pas pour autant abandonner le service. «Lorsque j’ai fait ma demande pour intégrer les Fire Services, c’était un challenge. Je savais que si ma candidature était retenue, je ferais partie des pionnières. Et c’est ce que je voulais», déclare-t-elle, avec une lueur de fierté dans les yeux.
DES MÉTIERS EXIGEANTS MAIS PASSIONNANTS
Cette native de St-Pierre, aînée de deux enfants, n’a pourtant pas eu un parcours atypique jusqu’ici. Elle a été scolarisée au collège Basdeo Bissoondoyal à Flacq et a grandi entre une mère gérante d’un snack de la localité et un père policier. Si Premika Teeluckdharry a opté pour une carrière dans la brigade des sapeurs-pompiers, c’est sur les conseils de son père. «Les policiers, les pompiers et le personnel pénitentiaire tombent tous sous les Disciplined Forces. Ce sont des métiers très exigeants mais passionnants.»
Elle et les autres postulants ont été soumis à plusieurs examens qui comprenaient des exercices physiques, notamment une course d’un kilomètre et des tests d’aptitude, comme le Vertigo Test qui consiste à faire marcher les candidats sur une planche reposant sur des pôles de trois mètres de haut pour vérifier s’ils sont sujets au vertige. Sans compter une série d’entretiens.
Une fois tous ces examens finis, Premika Teeluckdharry est envahie par le doute. «De nombreuses filles ont postulé et au fur et à mesure que le temps passait, je doutais d’avoir réussi.» Or, trois mois plus tard, on l’informe de son acceptation.
FORMATION INTENSE
Place alors à une formation intense à la brigade de Coromandel qui a duré six mois, commençant à 8 heures et se terminant à 16 heures. «On faisait la parade, des exercices physiques et d’endurance, des courses de longs parcours et aussi des cours théoriques. C’est là que nous avons appris à manier les équipements, notamment les échelles dont la plus lourde mesure 13,5 mètres et des pompes de plus de 70 kilos. Faire tous ces exercices sous le soleil de Coromandel, c’était dur. On a fini par s’y habituer et à y prendre du plaisir.»
À l’issue de la traditionnelle Passing out Parade lors de laquelle elles ont été confirmées, les cinq femmes sapeurs-pompiers ont été postées à la caserne de Coromandel. Durant trois à quatre mois, elles ont travaillé de jour, soit de 8 heures à 16 heures. L’alarme à incendie se déclenchait trois à quatre fois par jour. Premika Teeluckdharry et les quatre autres filles allaient alors sur le terrain.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les feux de brousse et de champs de canne sont plus nombreux que les incendies de maisons. Le sinistre qui a le plus marqué la jeune femme, c’était celui qui a totalement ravagé une maison à Pailles. «Lorsque nous sommes arrivés sur place, la maison était complètement détruite et la famille était inconsolable. Cela faisait peine à voir», raconte-t-elle.
LES POMPIERS SONT SOUMIS À DIFFÉRENTES SIMULATIONS
De tous les incendies qu’elle a aidés à circonscrire, ce sont les feux de montagne qui étaient, selon elle, les plus pénibles. «Il faut escalader les flancs pour atteindre le point de feu et cela demande de l’endurance. Mais nous sommes entraînés pour cela», déclare Premika Teeluckdharry. Elle précise que durant leur formation, les pompiers sont soumis à différentes simulations, dont l’une se déroule dans la Breathing Apparatus Chamber. «Nous avons dû entrer dans une salle en feu et notre tâche consistait à non seulement circonscrire l’incendie mais aussi à sauver des vies.»
Après quelques mois, les cinq femmes sapeurs-pompiers ont été mutées à la Management Support Unit au quartier général. Là, elles ont travaillé pour le Chief Fire Officer Louis Pallen et pour son assistant. Elles dactylographiaient des Routine Orders ou des Special Orders, bref, un changement total où elles ne faisaient que de l’administration.
Premika Teeluckdharry reconnaît que «c’est statique depuis deux ans et demi. Nous allons de temps à autre sur le terrain pour faire du training ou parer aux inondations. Mais autrement, nous restons au bureau».
Une situation qui est loin de lui plaire. «On nous a fait comprendre que nous ne pouvons être déployées dans les différentes casernes où il n’y a que des hommes car nous ne sommes pas assez nombreuses.»
Ce que Premika Teeluckdharry trouve injuste car elles n’ont pas les mêmes conditions de travail que leurs collègues hommes. Elle explique que les sapeurs-pompiers qui sont sur le terrain travaillent 15 jours par mois, alors que les femmes, elles, sont actives cinq jours sur sept.
Sans compter le fait, dit-elle, que «le package salarial des hommes est plus intéressant car ils ont plusieurs allocations que nous ne recevons pas». Ainsi, s’il fallait chiffrer, elle dirait que les hommes perçoivent plus de Rs 6 000 supplémentaires par mois. «Nous sommes désavantagées par rapport à eux alors que nous aurions voulu être traitées sur un pied d’égalité.»
Premika Teeluckdharry trouve le travail de bureau plus stressant que celui du terrain. Elle n’hésite pas à dire que plusieurs de ses collègues masculins n’ont pas digéré l’admission des femmes au sein de la brigade des sapeurs-pompiers. «C’est encore un monde d’hommes. M. Pallen, le Chief Fire Officer, nous accorde tout son soutien mais ce n’est pas le cas de tous.»
«LES FEMMES SONT POLYVALENTES»
Certains pompiers, dit-elle, parlent à haute voix devant elles et émettent des commentaires désobligeants à leur égard comme : «Bann tifi pa kapav fer sa travay-la ; zot finn rékrit sink mannkin dan biro.» Les femmes sapeurs-pompiers, relate-t-elle, font alors mine de ne rien voir et de ne rien entendre. «De toutes les façons, les fois où les Higher Officers ont demandé à certains pompiers de faire de l’administration comme nous le faisons, ils ont refusé. Pourquoi ? Parce qu’ils ne sont pas habitués aux tâches multiples. Ce sont les femmes qui sont polyvalentes.»
Elle ajoute que certains collègues avancent que les femmes n’arrivent pas à manier la chaîne de sciage ou le Holmatro Rescue Equipment, une sorte de pincescieuse pour découper les voitures accidentées afin d’en extraire les blessés. «Eux arrivent à les manier à deux. Nous nous sommes capables de le faire à trois. Le tout est une question d’entraînement.»
Se verrait-elle faire du travail de terrain si elle se mariait et fondait une famille ? Premika Teeluckdharry prend l’exemple de sa collègue et amie Rajshree Jowaheer-Luckeea qui est mariée depuis un an et qui veut avoir un enfant. «Oui, je me vois continuer ce travail. Il est tout à fait possible d’avoir un light duty pendant sa grossesse et ensuite reprendre le travail de terrain après l’accouchement.»
Pour Premika Teeluckdharry, l’arrivée des sept recrues est une lueur d’espoir. «Plus il y aura de femmes sapeurs-pompiers, plus nous nous approcherons d’une masse critique qui permettra notre redéploiement dans les casernes.» Si elle avait un message à adresser aux nouvelles recrues ? «Prenez patience. N’écoutez pas les hommes car ils tenteront de vous décourager par tous les moyens. Restez maître de vous.» Premika Teeluckdharry veut absolument prendre part aux exercices de promotion pour grimper dans la hiérarchie. Jusqu’où se voit-elle monter ? «Jusqu’au poste de Chief Fire Officer. Je suis là pour ça…»
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