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Maya Hanoomanjee: «Je ne tolérerai plus aucun dérapage»

17 octobre 2015, 00:44

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Maya Hanoomanjee: «Je ne tolérerai plus aucun dérapage»

C’est le cirque dans l’hémicycle. Vous le vivez comment?

Gérer les incidents fait partie de mon travail. Les accrochages et les chahuts ne sont pas nouveaux. Certains cherchent à être vus. Coûte que coûte.

 

Peut-être manquez-vous d’autorité...

Mais pas du tout ! J’ai beaucoup d’autorité et mes prérogatives sont nombreuses. Ceux qui en doutent n’ont qu’à consulter la Constitution, les Standing Orders and Rules of the National Assembly et la National Assembly (Privileges, Immunities and Powers) Act.

 

Alors pourquoi ces difficultés à vous faire respecter ?

C’est faux, des éditorialistes racontent n’importe quoi. Des désordres, il y en a eu et il y en aura encore, mais que l’on ne vienne pas me faire la leçon, je ne suis pas une novice. Le Parlement, ça fait plus de vingt ans que je le fréquente. J’ai été ministre, député de l’opposition, je connais les rouages de l’Assemblée nationale sur le bout des doigts. Contrairement à ceux qui se permettent de faire des commentaires déplacés. Enfin, je les laisse dire…

 

Vous ne vous remettez jamais  en question ?

C’est aux perturbateurs de se remettre en question. Et à ceux qui ne connaissent pas les procédures et qui font perdre du temps à la Chambre. Nous sommes là pour travailler et faire avancer le pays. Ce temps est précieux, je ne veux pas qu’on le gaspille en enfantillages.

 

Quand ça dérape, vous sentez-vous seule au «Perchoir» ?

Non, le speaker ne travaille pas dans un vacuum. Ma fonction de présidente, je l’exerce dans un cadre rigoureux, des paramètres précis. Des règlements sont d’ailleurs applicables à tous, ce serait bien que tous s’en souviennent parce que je ne tolérerai plus aucun dérapage.

 

Qu’entendez-vous par «dérapage» ?

Des parlementaires déversent leur amertume sur moi, c’est indigne. Je n’accepte pas que l’on vienne au Parlement pour faire du bruit.

 

Une démocratie vivante est aussi une démocratie bruyante…

Pour moi, l’institution est au-dessus de tout. Je suis la garante de la démocratie parlementaire, défier mon autorité est indigne d’un élu, c’est irrespectueux envers la Chambre. Tout député gagne le titre d’«Honorable», encore faut-il s’en montrer à la hauteur. 

 

L’opposition ne vous juge pas à la hauteur et se plaint de votre «partialité»…

C’est grotesque et mensonger. Jusqu’ici, j’ai mis un point d’honneur à rester équitable, juste et absolument impartiale. Tout récemment, j’ai demandé aux Honorables Ravi Rutnah et Bobby Hurreeram de retirer des propos que je considérais comme unparliamentary - ce qu’ils ont fait sans contester. Alors expliquez-moi en quoi suis-je partiale.

 

Aucun traitement de faveur, jamais ?

Jamais ! Les députés de l’opposition sont traités de la même façon que ceux de la majorité. Je mets au défi quiconque de démonter le contraire.

 

Les uns sont plus souvent expulsés que les autres…

Écoutez, on ne peut pas transformer le Parlement en cour de récréation. Même s’ils sont minoritaires, ces comportements entachent l’image des parlementaires et de l’institution.

 

Vous visez qui ?

Ils se reconnaîtront, je ne veux pas entrer dans les polémiques. Certains dérapages sont indignes et inacceptables. Venir injurier un collègue est une insulte à notre République.

 

C’est un rappel à l’ordre ?

C’est un rappel à se recentrer sur sa fonction d’élu. Le premier devoir d’un parlementaire est de protéger les intérêts du peuple. Pas d’alimenter les mesquineries partisanes. Je vous le dis : je serai intraitable avec les perturbateurs. Les attitudes de cour d’école doivent cesser.

 

Remettre en cause la ligne éditoriale de la MBC, n’est-ce pas protéger les intérêts de la population ? Celui d’être informé sans parti pris.

Ce n’est pas la question.

 

Mais si !

(Elle hausse le ton) Mais non ! Les invectives et les insultes ne font pas progresser le pays. Les débats seront bientôt télévisés, est-ce cette image de la politique que l’on veut donner ? Certains ont oublié qui les a placés dans l’hémicycle. Être parlementaire, c’est avant tout représenter le peuple ; perdre son temps dans des règlements de compte personnels est une rupture de ce contrat. Dites-moi en quoi les allégations gratuites, les provocations et les gestes déplacés protègent les intérêts du peuple ? Dites-moi ! 

 

Être parlementaire, c’est aussi avoir des convictions et les porter haut et fort…

Oui, mais dans le cadre de la loi. Il y a des règles. Certains ont poussé l’outrecuidance jusqu’à me manquer de respect. C’est pourtant l’une des règles d’or du Parlement : un respect inconditionnel au speaker. 

 

Le «Shame on you» de Paul Bérenger n’est pas passé ?

C’est du jamais-vu. Il a osé me défier, honte à lui.

 

 Robert de Niro vous a-t-il demandé des droits d’auteur ?

Robert qui ?

 

Votre «Are you talking to me ?» à l’adresse de Bérenger est une réplique culte du cinéma…

Ah bon ? Je ne le savais pas (rires). Comprenez une chose : quand je donne mon ruling le débat est clos, c’est définitif et incontestable, ce sont les règlements, point final. Si vous insistez, moi j’agis. (NdlR : Elle fait référence au bras de fer avec Rajesh Bhagwan, pour qui la MBC est «manipulée» par Roshi Bhadain, et qui a refusé de retirer ce terme malgré un ruling de la présidente le sommant de le faire). 

 

En quoi le «manipulated» de Rajesh Bhagwan est-il unparliamentary ?

Je n’ai fait qu’appliquer la «jurisprudence». Ce n’est pas la première fois qu’un député en accuse un autre de manipulation. Au moins quatre rulings ont été rendus par mes prédécesseurs. Tous ont souligné le caractère unparliamentary de cette allégation et leur décision a été respectée. Expulser un député n’est jamais agréable, je ne le fais pas de gaieté de cœur, mais le règlement est le règlement.  Je donne toujours une chance de se ressaisir, il n’y a rien de déshonorant à dire «I withdraw». Si l’intéressé refuse,  il ne me laisse pas le choix. 

 

Vous-même, dans l’opposition, n’étiez pas tendre envers la MBC…

Oui. Et alors ? 

 

Il n’y a pas un an, vous aviez banni ses journalistes de vos congrès.  La MBC, disiez-vous, est «une machine  à propagande qui désinforme et manipule l’opinion publique».

Et alors ? J’ai mon opinion sur la MBC et je la garde pour moi. Vous êtes en train de passer à côté du sujet. Mon opinion personnelle est une chose, mes décisions en tant que speaker en sont une autre. Est-ce que j’ai pris parti dans l’exercice de mes fonctions ? Non. Je suis im-par-tiale ! (elle appuie)

 

Avez-vous changé d’avis sur la MBC ?

Je ne peux pas vous dire ce que je pense.

 

On ne le répétera qu’aux lecteurs, promis…

Je refuse de répondre à cette question. Sur ce, je vous souhaite un bon week-end…

 

La séance parlementaire de mardi, vous la sentez comment ?

J’espère retrouver des parlementaires assagis et apaisés