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Horsepower : l'usine à fraudes de la NTA démantelée
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Horsepower : l'usine à fraudes de la NTA démantelée
Les protagonistes de cette fraude sur les cartes grises ou certificats d’immatriculation («horsepower») tombent comme des mouches. En deux semaines, 23 personnes ont été arrêtées. Soixante autres individus sont dans le collimateur de la police. «Quasiment tous les examinateurs de la National Transport Authority (NTA) sont impliqués», lance l’assistant surintendant de police (ASP) Hector Tuyau. Celui-ci vient de donner un véritable coup de pied dans une vaste fourmilière.
C’est une fraude fiscale avec la complicité des employés de la NTA. Essentiellement, elle consiste à payer moins de taxe (déclaration) sur les véhicules grâce à une combine toute simple : mentir sur la motorisation, car celle-ci détermine le montant à payer chaque année. Explications.
1ère fraude : le changement de moteur
Le propriétaire modifie son moteur en augmentant sa puissance (cc) mais n’alerte pas la NTA. Lors de l’inspection annuelle du véhicule, l’examinateur de la NTA, contre un pot-de-vin, fait semblant de ne rien constater. Le propriétaire paie la taxe pour une voiture de puissance inférieure car le horsepower ne correspond pas au véhicule.
2e fraude : la modification du «horsepower»
Le propriétaire prétend – alors qu’il ne le fait pas – avoir modifié son moteur en réduisant sa puissance et informe la NTA. Lors de l’inspection, l’examinateur, contre un pot-de-vin, confirme ce changement et publie un nouveau horsepower qui ne correspond évidemment pas au véhicule. Le propriétaire paie donc la taxe pour une voiture de puissance inférieure.
3e fraude : le clonage
Le propriétaire d’un véhicule cherche une voiture accidentée du même modèle que le sien mais d’une motorisation inférieure. Il n’achète pas le véhicule qui n’est pas en état de marche, mais juste le horsepower. Il calque son véhicule sur le horsepower acheté en prenant son immatriculation et faisant frapper illégalement le châssis et le moteur de son véhicule pour que leurs identifiants correspondent à ceux du horsepower. Lors de l’inspection, l’examinateur n’y voit que du feu. Il se peut aussi que le propriétaire ne manipule pas son numéro de châssis ou de moteur. Lors de l’inspection, contre un pot-de-vin, l’examinateur de la NTA ferme les yeux sur la disparité entre les numéros sur le châssis et le moteur, et ceux sur le horsepower.
C’est un «whistleblower» qui a permis d’ouvrir l’enquête, dit l’ASP Tuyau
Si chaque jour apporte son lot d’arrestations d’officiers de la NTA et de propriétaires de véhicules en marge de l’enquête sur le trafic de faux horsepower, le travail policier a débuté par une information anonyme et risque de faire tomber tous les examinateurs de la NTA.
«Presque tous les examinateurs sont impliqués. Cette enquête est vaste, ce n’est que le début. Une soixantaine de personnes sont déjà dans le collimateur de la police. On ne s’arrêtera pas à l’axe de simples propriétaires/officiers de la NTA. Des compagnies ont été citées. Elles ont des flottes de véhicules qui n’ont jamais été contrôlés et qui circulent avec de faux horsepower. Nous avons saisi jusqu’ici des documents qui montrent que la fraude remonte au début des années 2000. Il s’agit là de fraudes de plusieurs millions de roupies», explique le responsable de l’enquête, l’ASP Hector Tuyau.
Tout est parti d’une simple dénonciation reçue par la Criminal Investigation Division du Nord. «Tout a commencé par un whistleblower qui nous a donné des informations précises sur les faux horsepower», ajoute l’ASP Tuyau. Avec ces informations en leur possession, les enquêteurs procèdent à une première arrestation le 13 janvier. Il s’agit d’Evan Bantley Jhureea, le propriétaire d’une Toyota Premio, habitant cité La-Cure.
Arrestation médiatisée
Le même jour, Roubindra Aswin Sembhoo, Management Support Officer de la NTA, est arrêté. Ils comparaissent le lendemain devant la justice sous une charge de conspiracy to commit forgery et sont relâchés sous caution. S’ensuit l’arrestation d’un deuxième officier de la NTA, l’examinateur Veekash Sarju, le 15 janvier.
Toutefois ce ne sera que le mardi 19 janvier que l’affaire prend une autre tournure avec l’arrestation médiatisée du président de l’Alliance française de l’île Maurice, Bruno Dumazel. Le même jour, un mécanicien de Ste-Croix, Michel Kwet Sun Wong Wing Wan, et trois autres propriétaires de véhicules sont arrêtés.
À ce stade de l’enquête, il est question de corruption de fonctionnaires et d’utilisation de faux documents pour «diminuer» la puissance des véhicules. Les prévenus sont présentés au tribunal et sont libérés sous caution.
Cette deuxième semaine de l’enquête verra s’accélérer les arrestations. L’examinateur Girdharry Kurrun et son collègue Maanesh Kumar Ragen seront arrêtés le mercredi 20 et jeudi 21. Six autres propriétaires de véhicules seront aussi arrêtés durant ces deux jours. Ils sont Eshann Mohammad Jhootoo, Kaleeparsadsing Ramjeet, Conrad Emmanuel Law Lam, Bhanu Raj Parboteeah, Mohammad Salim Moideen et Tulsidas Mugon.
Les arrestations vont se poursuivre pour la troisième semaine. Quatre le lundi 25, un mercredi 27 et un autre jeudi.
Les à côtés de la fraude :
Différents délits ont été commis suite au trafic de faux «horsepower»
Le premier concerne le faux. Ce délit est commis par l’officier de la NTA.
- Le deuxième délit concerne la fabrication d’un faux. Il est également commis par l’officier de la NTA avec la complicité de toute autre personne ayant produit les faux documents.
- Le troisième délit est celui de corruption où non seulement le fonctionnaire ayant reçu de l’argent ou tout autre avantage est incriminé mais également la personne qui a corrompu le fonctionnaire (dans ce cas le propriétaire du véhicule).
- Le quatrième délit est celui de complicité pour commettre un acte de corruption. Là, tous les acteurs du réseau sont impliqués.
Premier dossier épineux pour Kaushik Reesaul
Le commissaire de la NTA, nouvellement nommé, aura à gérer l’épineux dossier de l’enquête sur le trafic de faux «horsepower» tout en assurant le bon déroulement du travail au niveau des contrôles techniques de véhicules. Après l’arrestation de quatre de ses officiers dans le sillage de cette enquête, il a dû réagir dans l’urgence en faisant une demande d’effectifs auprès de la force policière et un durcissement des règles en vigueur à la NTA. Il ne se voile toutefois pas la face, concédant qu’il y a effectivement «des trafics et de la corruption» au niveau de l’octroi des certificats de fitness mais compte y mettre bon ordre.
Cet ancien chef ingénieur au ministère des Infrastructures publiques, qui se voyait gérer le complexe dossier du développement routier avec l’avènement des smart cities à sa nomination en décembre 2015, se retrouve à gérer les retombées du démantèlement d’un trafic de faux. Son combat sera toutefois de courte durée car le gouvernement a clairement énoncé son intention de privatiser les centres de contrôles techniques. La NTA deviendra alors l’autorité régulatrice du secteur et devra se muer en chien de garde.
La NTA décimée
Une série de mesures vont être appliquées à la NTA après les arrestations de ces trois dernières semaines et la pagaille qui règne pour les contrôles techniques aux centres de «fitness» de Plaine-Lauzun et de Forest-Side. Une réunion, mercredi matin, entre le ministère du Transport, la direction de la NTA et les responsables de la force policière a permis d’établir un nouveau mode opératoire pour les contrôles techniques.
Les principales mesures :
Une vingtaine de policiers, notamment des ingénieurs mécaniques de la force policière, seront dépêchés dans les deux centres de fitness de Plaine-Lauzun et de Forest-Side pour épauler les examinateurs de la NTA.
- Le Principal Examiner de chaque centre sera responsable de vérifier le cahier des charges des examinateurs après les contrôles techniques des véhicules.
- Les deux centres de fitness seront ouverts les samedis à partir de février.
- Le nombre de rendez-vous pris chaque jour à la NTA sera ramené à quelque 200 afin de permettre des vérifications plus poussées par les examinateurs.
Enquête dirigée vers les assureurs
Après les premières arrestations, l’enquête sur le trafic de faux «horsepower» se poursuivra sur l’axe des assureurs. Une source proche de l’enquête nous précise que les premières arrestations dans le trafic de faux «horsepower» ne sont que le début d’un travail plus poussé qui vise à démanteler tout un réseau qualifié de «mafieux» qui s’est installé autour des certificats de fitness. «L’enquête ne se limite pas à prouver la complicité entre les examinateurs et les propriétaires des véhicules. Il s’agit également de fraudes où des assureurs sont impliqués. L’enquête se dirige vers cet axe», explique notre source.
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