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Jonathan Manique : Un jeune dans la cour des grands

3 avril 2016, 09:20

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Jonathan Manique : Un jeune dans la cour des grands

En deux ans, Jonathan Manique, 23 ans, est passé de commis serveur à chef de rang au restaurant italien du Royal Palm. Ce qui n’est pas rien pour quelqu’un qui n’a pas de certificat de fin d’études secondaires. S’il en est arrivé là, c’est grâce au Programme employabilité jeunes, qui fête cette année ses 15 ans d’existence.

Jonathan Manique est tiré à quatre épingles. Pour cause : dans l’heure qui suit l’entretien, il va prendre son service au restaurant La Brezza. Service qui débute à 15 h 30 et qui prend fin aux alentours de minuit. Il en est ainsi six jours sur sept. Il arrive parfois que le travail aille au-delà de l’heure susmentionnée, en particulier quand les clients s’éternisent au restaurant. Des inconscients trouveraient que c’est de l’esclavage des temps modernes. Pas Jonathan, qui mesure à quel point, parti de rien, il a gravi les échelons de la restauration en si peu de temps.

Un emploi de bureau n’était pas pour lui. Tout comme l’école d’ailleurs. «Depi maternel, mo pa ti kontan aprann», déclare cet habitant de la Cité Mère Teresa, à Triolet. Ce quatrième enfant d’un travailleur de sucrerie, qui a pris avantage du plan de retraite volontaire, traîne les pieds lorsqu’il faut aller à l’école. Il rate quelques matières à l’examen de Form V et ne se sent pas d’attaque à reprendre l’examen. Il s’essaie au métier de maçon puis à celui de charpentier. Mais ces emplois ne sont pas sécurisés. Un de ses amis, qui a suivi le Programme employabilité jeunes (PEJ) de la Fondation espoir et développement (FED), a été embauché dans les cuisines de l’hôtel Trou-aux-Biches. Ce dernier l’encourage vivement à suivre cette formation gratuite en métiers de l’hôtellerie, dispensée aux jeunes déscolarisés par la FED. Comme ses frères aînés travaillent dans ce domaine, Jonathan Manique se laisse tenter, d’autant plus que le cours théorique a lieu une fois la semaine. «Anplas mo res narien fer… »

Pendant six mois, il suit le cours théorique hebdomadaire dispensé par Frédéric Augustin, le responsable du PEJ. Il va de découverte en découverte. «Boukou kitsoz monn aprann : ki été loteleri, disiplinn, pran responsabilité, ki gagn drwa fer ek pa fer.» Au bout de six mois de cours, Jonathan Manique a si bien absorbé les enseignements qu’il est envoyé en stage pratique de trois mois au Royal Palm, considéré comme un des plus beaux fleurons du groupe Beachcomber. Il est d’abord affecté au restaurant La Goélette puis au restaurant italien La Brezza. Lorsqu’il y débarque, c’est la pleine saison qui commence et le service est en continue. Il est au four et au moulin de 19 h 30 à 22 heures et souvent au-delà.

À la fin de son stage pratique en avril 2012, il est retenu comme commis serveur et n’est pas peu fier de porter le noeud papillon blanc qui va avec le poste. Il s’applique tant et suit à la lettre les directives du serveur qui le parraine, qu’au bout de huit mois, il est nommé serveur et son noeud papillon prend alors la teinte verte. Et en avril 2015, il arbore fièrement le noeud papillon noir du chef de rang, n’ayant comme supérieur que le maître d’hôtel Ganessen Mardaymootoo. Il a une trentaine de clients sous sa responsabilité. SomduthTakoor, le Food and Beverage Manager, le prend aussi sous son aile, le forme et l’encourage à se dépasser.

«IL A NAGÉ AVEC AISANCE»

Karen Ah-Young, la directrice des Ressources humaines au Royal Palm confie que si Jonathan a été recruté, c’est parce qu’il a impressionné son supérieur par sa motivation d’apprendre et d’avancer. «Il a appris vite durant ses six mois de stage et plus encore lors du stage pratique. Il a assimilé les différents services, concepts et la sommellerie. Cela n’a pas été facile pour lui car quand il a commencé, c’était la pleine saison. Soit il apprenait à nager, soit il se noyait. Il a nagé avec aisance. C’est un rude travailleur qui s’absente peu et qui a intégré facilement l’équipe. Ce qui n’est pas rien puisque son travail demande une certaine rigueur et exigence pour assurer un service irréprochable.»

Outre le fait de se décarcasser et d’offrir aux clients ce qu’ils souhaitent, même si la demande ne figure pas sur la carte, il aime ce contact avec les clients, avec qui il aime faire un brin de causette à la fin du service. «Ler pena boukou klian, nou kapav kozé, mé ler restauran plin, pa kapav met dialog ditou. A mwin kan servis fini.» Et puis, travailler au Royal Palm, c’est aussi avoir la chance de côtoyer des vedettes qu’il n’aurait jamais pu rencontrer autrement. Parmi, l’humoriste Florence Foresti, l’animateur Fred de l’ancienne émission Service après-vente des émissions sur Canal+ ou encore l’acteur José Garcia. «Mo bien kontan seki mo pe fer kouma travay. Mo resi deal ar bann problem aizéman.»

En sus d’exercer un métier qu’il apprécie, Jonathan Manique a trouvé chaussure à son pied au Royal Palm en la personne de Nusayah, diplômée de l’école hôtelière, spécialisée en pâtisserie. Jonathan conseille aux jeunes déscolarisés de suivre le PEJ car «zot pou aprann boukou ek enrisi zot personalité. Enswit, sé enn travay asiré». Ses parents, qui étaient derrière lui pour qu’il trouve un emploi stable, sont ravis. «Avan, zot ti bizin pous mwa pou mo rod enn travay. Zordi personn pa bizin pous moi… »



Plus de 1900 personnes formées

Le groupe Beachcomber a un double anniversaire à célébrer cette année. En effet, la FED, son plan de Corporate Social Responsability, compte 17 ans d’existence alors que le PEJ en compte 15. L’objectif initial du PEJ est d’assurer une formation aux jeunes déscolarisés, qui souhaitent s’initier à un métier dans le secteur des services. Plus de 1900 jeunes ont suivi le PEJ, 60 % étant des filles. De ce nombre, 500 à 600 ont été absorbés par l’hôtellerie, les critères de sélection étant les vacances dans le secteur et la motivation des jeunes. Le PEJ a modifié légèrement son cap. Aujourd’hui, cette formation est davantage axée sur l’hôtellerie. Si autrefois, la FED plaçait les jeunes dans les hôtels d’autres groupes, désormais elle le fait uniquement en cas de surplus de stagiaires. Autrement, ils sont absorbés par les huit hôtels du groupe. Si autrefois, les stagiaires ne payaient rien, aujourd’hui, seule la formation est gratuite. La FED dépense entre Rs 20 000 à Rs 25 000 par jeune. Frédéric Augustin, responsable du PEJ, n’entrevoit pas le recrutement des stagiaires formés pour les bateaux de croisière comme un désavantage. «C’est valorisant pour nous car cela signifie que notre formation est internationale. Et puis, financièrement, c’est plus intéressant pour les jeunes.» Cette année, non seulement le PEJ se focalisera davantage sur l’intégration dans l’hôtellerie mais il débutera en avril au lieu d’août. De plus, le nombre de stagiaires passera de 175 à 250-300.