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Cérémonie: Jah rasta féerie à Tranquebar
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Cérémonie: Jah rasta féerie à Tranquebar
Les tambours rythment une mélopée monocorde à la gloire de «Jah». Elle est reprise en choeur par une bonne centaine de «frères» et «soeurs» rassemblés autour d’un feu généreux. Le vent se lève et fait danser les braises. La pluie hésite. Le temps semble se figer. C’est une réunion spirituelle, un peu secrète. Une assemblée de prières, à Bangladesh, sur les hauteurs de Tranquebar. Un nyabinghi, comme on dit dans la culture rastafari.
À la nuit tombée, ils arrivent d’un peu partout. Par petits groupes, plus nombreux que d’habitude. «Le mouvement rasta vit des heures difficiles, on a besoin de se retrouver», chuchote un homme à la veste Marley avant de regagner sa tente. Il y en a déjà une quinzaine posées à l’entrée d’un terrain vague mal éclairé. Le site fait penser à un décor de Mad Max. Là, des carcasses de voitures rouillées de fatigue. Ici, une maison au toit scalpé où l’on sert du thé à la citronnelle.
C’est que la nuit va être longue. Jusqu’à six heures le lendemain pour les plus résistants. «Ziska mo lespri tini» pour Anabelle, 28 ans. Turban coloré et badge Hailé Sélassié, elle vit «en mode rasta» depuis ses 12 ans. Anabelle est venue de Curepipe avec mari et enfants. Elle tient à nous présenter son aîné, Jebelion, «un très bon élève alors que l’État nous considère comme des illettrés».
Minuit, déjà l’heure de la troisième session de prières. Et du chalice, cette pipe à eau qui a la faveur des frappeurs de tambours pour fumer «l’herbe mystique». «Chaque cérémonie débute de la même façon, par l’interpellation à la nature», sous-titre Siva, en tunique blanche immaculée. Le rythme, un battement de coeur «pour s’éclaircir l’esprit». En Jamaïque, on dit même que c’est pour cela qu’il a été persécuté: le rythme nyabinghi aide les gens à voir clair.
Les percussions ont maintenant du renfort : les mains clapent le même tempo. Les corps chaloupent à peine. Des yeux se ferment. D’autres s’ouvrent grand. On devine que ça bouillonne dans les veines. C’est le moment choisi pour les chants, psalmodiques, lancinants. Une ferveur tout en retenue mais que rien n’arrêtera plus. Pas même la menace, maintes fois «imminente», d’une descente de police.
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