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Nos souvenirs : Un petit drame sans prétention

27 mai 2016, 09:29

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Nos souvenirs : Un petit drame sans prétention

 

Au pied du Mont Fuji, au Japon, se trouve la forêt d’Aokigahara, aussi appelée La Forêt des Suicides. C’est l’endroit qu’a choisi un Américain, Arthur Brennan, pour mettre fin à ses jours parce que sa femme Joan, qu’il aime passionnément, a décidé de le quitter.

Arthur repense aux moments les plus marquants de sa vie de couple : sa rencontre avec Joan, leur amour et aussi l’usure de leur couple et leur éloignement progressif. Mais, alors qu’il s’apprête à commettre l’irréparable, il rencontre Takumi Nakamura, venu se suicider lui aussi. Les deux hommes se parlent et cette conversation sera pour tous les deux l’occasion d’un long voyage d’introspection…

Qu’elle semble loin l’époque où Gus Van Sant produisait Larry Clark, ces moments où son cinéma s’autorisait encore l’expérimentation et l’invention. Sur le papier pourtant, ce film – et sa forêt morbide nichée à l’ombre du mont Fuji –, filmé par Gus Van Sant, s’annonçait prometteur, qui plus est avec Matthew McConaughey, Naomi Watts et Ken Watanabe au casting.

Durant les premières dizaines de minutes du film, avec le bénéfice du doute, il peut s’avérer un joli symbole pour dépeindre un espace mental. L’ennui est que ce terrain de jeu, mis à part quelques beaux plans anecdotiques, est bien trop statique, malgré les retours en arrière évoquant les difficultés conjugales d’Arthur.

Lorsque Takumi commence à parler du bois comme d’un purgatoire habité par des esprits, l’on se dit que Van Sant a un peu trop regardé Lost. Le scénario est certes, dans l’ensemble, bien construit, mais il emprunte tant de poncifs que toute la dernière partie peut se prédire trois bons quarts d’heure avant le final. Toutes les métaphores utilisées sont lourdes et les ressorts scénaristiques grossiers. Tant et si bien que l’on se demande comment le réalisateur d’Elephant a pu tomber aussi bas.

Même si le cinéma de Gus Van Sant a toujours hésité entre mises en scène très grand public mais sophistiquées (Will Hunting, À la rencontre de Forrester ) et logiques d’auteur plus hermétiques (My own private Idaho, Gerry, Last Days), jamais jusqu’à présent celui-ci ne s’était avéré aussi déterminé à plaire à tout le monde. Étonnant d’ailleurs que Nos Souvenirs ait été présent en compétition officielle à Cannes. La déception est telle que l’on peine désormais à voir Van Sant se tourner vers autre chose que des mièvreries, lui qui par le passé n’hésitait pas à filmer les va-et-vient des adolescents comme un ballet cosmique. Lui qui projetait les petits détails de la vie sur un plan métaphysique.

Si le mysticisme et la cosmologie ne sont pas complètement absents dans ce film, ces thèmes sont noyés dans un verbiage entravant tout développement éventuel. Un dispositif dont la morale n’inviterait finalement qu’à prêter davantage d’attention aux subtilités de la personnalité de son compagnon ou sa compagne. Par exemple en retenant sa couleur préférée ou encore à apprécier davantage la vie grâce à autrui. Plus bateau, tu meurs. Dommage, car les plans de la forêt d’Aokigahara sont par moments fantastiques et prouvent qu’un autre Gus Van Sant est peut-être encore possible. À voir pour les fans de petits drames sans prétention.

LA NOTE : 6/10

FICHE TECHNIQUE
Titre original : The sea of trees
Genre : Drame
Durée : 1 h 50
De : Gus Van Sant
Avec : Matthew McConaughey, Ken Watanabe, Naomi Watts, Katie Aselton, Jordan Gavaris
Salles : Star La Croisette, Caudan, Bagatelle