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Ils ont DU MÉTIER… Ahmad Soreefan, 70 ans : un boucher qui se décarcasse

4 juin 2016, 14:15

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Ils ont DU MÉTIER… Ahmad Soreefan, 70 ans : un boucher qui se décarcasse

 

Nichée en plein cœur de Chebel, entre les côtes de deux croisées, une boucherie. De la chair fraîche pour cette rubrique. Allez, haut les cœurs, poussons la porte d’entrée et tranchons dans le vif.

Tiens ? Ça ne sent pas le fauve. Des carcasses accrochées à droite, un tablier avec un coq imprimé dessus à gauche. Sur la table, des os, des faux-filets, des entrecôtes et autres beaux morceaux et restes. Au milieu : Ahmad Soreefan. Qui, à 70 ans, donne l’impression d’être toujours fort comme un bœuf.

«Dépi 55 banané mo fer sa travay-la», confie-t-il sur un ton tranchant. C’est son père qui lui a transmis son couteau de boucher et depuis, il désosse, dégraisse, bref, il se décarcasse pour gagner sa vie. Risquons le coup de sabot. Qu’en est-il du chiffre d’affaires ? La viande «veau»-t-elle de l’or ? Cela dépend, avoue Ahmad. Car, les périodes de vache grasse succèdent à celles de vache maigre.

Au final, le boucher engrange entre Rs 25 000 et Rs 30 000 mensuellement. Mais de cela, il faut soustraire Rs 9 000 pour le loyer, le montant avalé par les factures d’eau et d’électricité mais aussi le salaire de son frère, Abu Swaley, qui lui donne un coup de main pour manier la hache. À la fin, «ress ziss karkass pou débrouyé !»

D’autant qu’il faut «travay kouma esklav kan ou fer sa métyéla», fait valoir le boucher. Et rester debout «lor ou lapat» de 5 heures du matin à 18 heures. «Mo travay toulézour, ziss dimans ki fini midi.» Alors, quand il rentre chez lui, il n’a qu’une envie : dormi kouma bef.

En parlant de compter les moutons, lui arrive-t-il de faire des cauchemars, à force de découper, taillader, dépecer des animaux ? Cela l’a-t-il incité à devenir végétarien ? Oh que non. «La viann, pou bann séki fer mo travay, sé enn ladrog ! Mo bizin manz mo bout laviann sinon pa gagn konpran !» Ce qu’il préfère, c’est «enn ti ladob ou byen enn bon briani…» Préparé par sa chère et tendre, de préférence.

Justement, pour ce qui est de la chair, la relève est-elle assurée ? À qui Ahmad compte-t-il transmettre son couteau à son tour ? Pas à l’un de ses cinq enfants en tout cas… Car, l’un est journaliste, les autres médecins et avocat, notamment. «Finn vann dibyen fami ti lésé pou rési fer zot arivé.»

Et à l’arrivée, quels sont les plans pour l’avenir en ce qui le concerne ? La retraite. «Monn fatigé aster. Zanfan dir mwa aret travay, mé mo pa kontan fié lor zot. Enn kestion labitid sa.» Alors, le boucher à la langue bien aiguisée, aux solides épaules et au cœur tendre, compte rouler sa bosse pendant encore un petit moment.

Quoi qu’il en soit, il est de ceux qui retombent toujours sur leurs pattes.