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Ajmal Panchoo croque la vie à pleines dents

19 juin 2016, 11:00

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Ajmal Panchoo croque la vie à pleines dents

Notre compatriote, le dentiste Ajmal Panchoo, ancien responsable de l’unité de prise en charge buccodentaire d’adultes polyhandicapés au CHRU de Lille, a été suivi pendant trois ans par un réalisateur, qui a fait un film sur lui. Film qui a été projeté au début de juin à Lille. Zoom.

Quel effet cela vous a-t-il fait d’avoir un caméraman sur vos talons pendant trois ans?

J’ai vécu une très belle aventure humaine ces trois dernières années. Abdé Keta, le réalisateur, je l’ai rencontré par hasard à une soirée d’anniversaire. Je lui ai un peu parlé de mon parcours et il m’a tout de suite répondu: «Il faut faire un film.» Je l’ai pris à la légère mais deux jours plus tard, il débarquait dans mon service au centre de soins dentaires avec ses caméras.

Quelques mois plus tard, il installait des caméras chez moi. J’ai joué le jeu, en même temps, j’étais tellement pris par mon boulot que je ne calculais pas trop et à force, j’ai oublié la caméra. Puis, lorsque je suis rentré à Maurice en décembre, une camerawoman m’a accompagné. À Maurice, les gens ont vite oublié la caméra et elle a pu prendre des images magnifiques de notre île!  Abdé Keta et son équipe ont été fascinés par les images de Maurice et les gens, pour lui, il a semblé évident que son film était avant tout un film mauricien.

Quelles ont été les réactions des gens qui l’ont vu ?

Le film a été projeté le 9 juin dernier à Lille. On a fait une avant-première, surtout avec les protagonistes et les associations. Il y a aussi eu beaucoup de curieux qui sont venus voir le film, j’ai remarqué quelques Mauriciens. Ça m’a touché. On a fait salle comble!

Les gens ont été très touchés par le film. Beaucoup m’ont dit qu’ils avaient été carrément bouleversés. Les gens sont surpris car on ne s’attend pas à ce périple. Je ne peux en dire plus, mais le film traite de beaucoup de sujets sensibles: le handicap, l’immigration, la religion, la recherche scientifique, la politique, Maurice, etc., donc cela a suscité beaucoup de débats à la fin du film.

Ajmal Panchoo lors d'une rencontre avec la présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim.

Qu’est-ce que cela va changer pour vous ?

Côté métier, rien n’a changé. Je continue à travailler au cabinet, à me déplacer dans des centres pour handicapés et aussi, je continue les recherches. C’est vrai que maintenant je ne passe plus trop inaperçu à Lille. Je suis sollicité par beaucoup de personnes un peu partout, mais grâce à ce film, j’ai aussi l’occasion de faire connaître le handicap, de parler du polyhandicap, de mettre en avant ces êtres oubliés de l’humanité universelle et valoriser aussi les familles.

Ce film apporte une reconnaissance à mon travail, beaucoup de gens me posaient souvent la question: «Qu’est-ce que tu fais que les autres ne font pas?» Je ne pouvais l’expliquer mieux que par les images réalisées par Abdé Keta et son équipe. De plus, je me sens fier de représenter mon pays, de porter haut les valeurs inculquées par la famille, les amis, mes profs.

Que faites-vous durant votre temps libre et durant les week-ends?

Je n’ai pas beaucoup de temps libre. Je travaille beaucoup mais dès que je peux, je n’hésite pas à partir une journée à Paris manger un briyani ou aller faire un tour à Londres pour acheter des DVD de Bollywood ou à Bruxelles pour manger dans de bons restos. J’aime bien bouger et souvent, je me déplace avec les amis Français, qui à force de me côtoyer parlent même le créole aujourd’hui!

Parlez-nous de votre famille.

Je suis originaire de Brisée-Verdière. Nous sommes quatre enfants. Mon père est chauffeur d’autobus et c’est lui qui m’a inculqué les valeurs que sont le travail, la persévérance et le courage. Ma mère s’est occupée de nous et nous n’avons jamais manqué de quoi que ce soit. J’ai trois sœurs: Fazloon, Amreen et Anjum. J’ai vécu bien entouré jusqu’à mes 18 ans et puis, je suis parti en France pour les études. Ma famille a joué un rôle primordial dans mon parcours, même si je ne l’ai pas beaucoup vue au cours des 15 dernières années. J’ai la chance d’avoir des proches qui me soutiennent à fond.

Cuisinez-vous ?

Oh que oui, j’adore ça ! Au début, c’était une nécessité lorsque je suis arrivé en France et ayant vécu seul. Mais au fil du temps, c’est devenu un réel plaisir. Je cuisine des plats mauriciens: mines frits, roti, curry de poulet, etc. Il n’y a pas longtemps, j’ai même réussi un briyani.

Très souvent, j’invite mes étudiants à partager mon repas. Il y a deux ans, pour une fête à l’université, j’avais même monté un stand mauricien avec des amis. C’est incroyable, mais on avait fait et vendu plus de 3000 samoussas et des sandwichs au vindaye d’ourite!

Ajmal Panchoo : «Je prends le temps d’apprécier la bonne bouffe.»

Gourmand ou gourmet ?

Je dirais gourmet, car je prends le temps d’apprécier la bonne bouffe. Par contre, quand je suis à Maurice, je redeviens gourmand, histoire de bien apprécier les délices du pays pendant mon séjour.

Un péché mignon ?

Je dirai le fromage. Il y en a tellement en France mais celui que j’adore, c’est le maroilles. Fondu ou avec des tartines trempées dans le café, c’est exquis.

Pratiquez-vous du sport?

J’avoue que je n’ai pas trop le temps de me consacrer au sport, mais bon je marche beaucoup! Je suis les événements sportifs, j’y assiste très souvent. Cette année, j’ai eu la chance de passer une journée à Roland Garros et pour l’Euro, je vais voir quelques matchs.

Quels livres lisez-vous ?

Actuellement, je suis en train de lire la biographie de Sir Alex Ferguson, quel grand personnage. Sinon, je lis beaucoup d’articles scientifiques.

Écoutez-vous la radio ?

Oui, quasiment toute la journée quand je suis au cabinet. J’écoute surtout de la musique. D’ailleurs, beaucoup de mes patients sont contents car je m’adapte en fonction de leurs goûts, âges et préférences. La musique est très importante lorsque j’exerce, le patient est souvent plus détendu.

Quel type de musique écoutez-vous ?

De tout. Cela fait rigoler beaucoup de monde mais depuis mes 15 ans, je suis fan de variétés françaises. Je me souviens lorsque j’étais élève au Collège Royal de Port-Louis, je prenais souvent le bus après l’école pour aller acheter des cassettes de Michel Sardou à Rose-Hill dans un magasin tenu par Bruno Raya à l’époque.

Votre idée du bonheur ?

Le bonheur, ce sont surtout les personnes autour de vous, qui contribuent aussi à vous aider à rester positif, se donner à fond dans ce qu’on fait, être en paix avec soi, être honnête, persévérant.