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La semaine vue par Gilbert Ahnee

20 juin 2016, 09:15

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La semaine vue par Gilbert Ahnee

 

Lundi 13 juin 2016

Un député fait valoir qu’il n’est pas un nwar touni. «To tro blan twa ?» lance un policier à une citoyenne. Palette de couleurs d’affiches…

Une chance à la vie

Un coeur. Ceux qui, aux heures de pointe, sont régulièrement pris au piège des bouchons provoqués autour du rond-point dit de Jumbo, à Phoenix, ceux-là ne peuvent pas se douter… Au plus atroce de cette jungle urbaine, mis à part les happy few qui savent, qui pourra se douter que cette fatalité polluante se concentre à proximité de son antithèse, d’une formidable réponse de la convivialité aux maux de la société hydrocarburée ? Vers le sommet de la Hillcrest Avenue traversant Sodnac, sur l’ancien pas de tir de la SMF, aux limites de Quatre-Bornes et de Phoenix, l’Employees’ Welfare Fund a financé l’aménagement d’une base de plein air, offrant des circuits pour la marche ou le jogging, des terrains de foot,
des appareils de musculation et de cardio. Au fil des années, les plantes mises en terre ont poussé, la SMF assure en permanence la sécurité et, au final, les habitants de la région disposent d’un très bel équipement. Pour la santé, voire le sport mais aussi pour l’expérience – simple et sans discours mais réelle – de la citoyenneté que favorise ce lieu.

This is so smart !

Messieurs les promoteurs de Smart Cities, allez un dimanche après-midi, vers 16 h 30, à cette base récréative de Sodnac. Ce lieu rassemble, crée des liens, nous réapprend à vivre à côté de nos voisins, à partager les lieux avec eux. Offrez un coeur semblable à vos projets. Autour de cela, créez d’abord de l’habitat convivial, inclusif. Assurez-vous de l’appropriation sociale de l’espace. That’s smart !

Mardi 14 

Visitez l’AN, son salon des injures… son dernier bazar : le discount à la criée de billets d’avion pour le hadj. Bientôt Lourdes, Haridwar…

Whose burden it is, Madam ?

Réinventer l’institution. Il n’y a pas de grande surprise. Dès la demande d’excuses de la speaker à la rédactrice en chef de l’hebdomadaire Weekly, on pouvait prévoir ce qui était susceptible d’arriver. Il paraissait assez clair que Touria Prayag ne déjugerait pas son journal et resterait sur ses positions, ce qui aurait pour résultat une pénalité quelconque infligée par la présidente Hanoomanjee. Cela a toujours été l’ordre des choses mais il est peut-être temps de revoir ces dernières et le désordre qu’elles occasionnent.

1) On a beau lire et relire Catch me if you can, l’éditorial incriminé, on n’y trouve que des observations validées par les faits, suivis de commentaires qui, en tout état de cause, peuvent être considérés comme fair comments on matters of public interest. Ni désinformation, ni malice, ni mischief.

2) Il est fini le temps où les institutions d’État, qu’il s’agisse des tribunaux de plus haute instance ou d’assemblées politiques, pouvaient compter sur un respect a priori, voire une révérence spontanée. Dans ce nouveau monde apparu au croisement de la connectivité généralisée, de l’information en temps réel, du commentaire citoyen sans inhibition, les institutions et les personnes qui les incarnent doivent justifier le respect auquel ils s’attendent.

3) Juge et partie, c’est la prétendument offensée qui administre la punition. Ce qui aurait été digne : que Mme Hanoomanjee démontre, si possible, point par point, comment l’éditorialiste a porté atteinte aux privilèges de la Chambre. Car si quelqu’un doit porter le Burden of Proof, c’est la Madam.

Mercredi 15

Ce truc Boskalis-là, ça arrive quand même au IT Hub de l’OI, non ? Des témoignages par Skype, FaceTime ou Facebook étaient-ils recevables ?

Taken for granted ?

Eoula Joe. Derrière le folklore de l’insatisfaction, prélude fréquent à la trahison, que cachent les gesticulations du député Lesjongard ? Sans doute une conviction que le MMM a peu de chances d’être à nouveau pertinent, qu’il n’est plus possible de compter sur Bérenger pour mobiliser son ancien électorat. Très probablement aussi, également, le sentiment que la montée en puissance du PMSD – 25 000 adhérents cotisants à la mi-2016 – est imputable tant à l’inexistence d’une formation militante jeune qu’à l’absence d’un espace pour la population générale au sein du MSM. Le parti de Pravind Jugnauth acceptera-t-il de reprendre un de ses anciens présidents, parti en claquant la porte en passant aux Mauves ? Quoi que puisse penser le leader du MSM de la nécessité pour son parti d’une image plurielle, il est probable, face à un Lesjongard, qu’il se montre plus regardant quant à la loyauté attendue.

Y a-t-il un seul de nos grands partis politiques qui pourrait désirer Joe Lesjongard pour diversifier son offre ? Le MSM, donc, très peu probable. Le MMM, ça paraît difficile. Le Parti travailliste peut-être. Trop content de son accroissement d’audience, encore souligné, en ce mois de ramadan, par les nombreux iftars auxquels, aux côtés de son ami Azad Dhomun, Xavier Duval est invité, le PMSD n’imputera pas beaucoup de valeur à l’éventuel apport de Lesjongard à son présent exercice de consolidation d’assises.

On le savait, le MP était un mouvement d’accélération. Du déclin mauve. Lesjongard préfigurant la prochaine vente à l’encan du MMM.

Jeudi 16

On pensait qu’il n’y avait que Bérenger à être, à l’occasion, en matière fécalisé. On découvre que le Dr Malhotra aussi joue dans ce registre…

A higher calling

Encapsulating fairness. Après les élections municipales, dans chacune de nos cinq villes, la première séance du nouveau conseil est présidée, jusqu’à l’élection du maire, par le Senior Councillor. Il s’agit de l’élu dont le pourcentage de suffrages, dans son Ward, est le plus élevé pour l’ensemble de l’administration. Comme quoi, dans notre vieille tradition municipale, antérieure – pour ce qui est de Port-Louis – à la première élection, en 1886, de membres du conseil de gouvernement, il existe un lien très fort entre la présidence d’une assemblée politique et la légitimité que donne le suffrage universel. Et il est peut-être temps, sans hargne ni attaques ad hominem – enfin ad mulierem – d’envisager s’il est vraiment proper que des membres d’un parti politique – rouges ou orange, sans mandat électif, président notre Assemblée nationale.

Dans le passé, Harilall Vaghjee, bien que n’étant pas député, a présidé l’Assemblée nationale avec une rare élégance mais la situation était tout à fait particulière. Par la suite, les autres speakers nominés – sir Ramesh Jeewoolall, Kailash Purryag et Razack Peeroo – étaient tous de formation juridique, ce qui n’est pas le cas de l’actuel speaker.

En Grande-Bretagne, il y a longtemps eu un consensus total pour que le siège d’un Outgoing Speaker ne soit pas contesté. Ce qui vaut aux titulaires une totale liberté par rapport aux partis politiques. À Maurice, avec nos scrutins trinominaux, il ne serait pas possible d’appliquer cette norme d’élégance. Mais il va falloir en trouver une autre. Pour sauver l’institution.

Vendredi 17

Argent public. Quels pourraient être les plus utiles messages de la présidence de la République ? Sobriété et frugalité. Sustainable budgets…

Samem zot tom sa…

Même pas 30 ans. Que de doutes, d’états d’âme et de débats, que d’inquiétudes aussi face à l’endettement, sans compter par la suite la colère du coaltar, l’apostrophe de la rue, les militants déçus. «Sa loto duty-free-la, samem pou sarié zot dan simitier sa», disaient un peu partout, à travers le MMM Territory, ces militants de base qui, en ces années-là, en l’occurrence en 1987/88, considéraient encore les députés comme des militants, comme eux, leurs stricts égaux. Les instances avaient débattu de l’opportunité d’accepter la proposition de l’Etat d’offrir également aux élus d’opposition des facilités hors taxes pour l’achat d’une voiture. Certains possibles bénéficiaires avouaient leur gêne, se demandant s’ils accepteraient bien cette offre, craignant d’être considérés zwiser eux aussi. Finalement, lorsque le principe fut accepté, les premières voitures acquises, le plus souvent de modestes Nissan Sunny ou Honda Civic, certains députés eurent encore à subir les reproches et invectives de camarades inquiets et mécontents.

Le MMM, en ces années-là, avait encore l’ambition d’incarner une éthique, de symboliser la droiture. Sans doute cela étaitil déjà une illusion, sans doute certains leaders étaient-ils déjà gagnés par le cynisme mais la base chérissait l’image d’Épinal. En 1990, ces gens-là revinrent au gouvernement. En 1991, ils furent même élus pour gouverner. La suite est connue…

En 2016, une opposition mauve accepte sans coup férir l’augmentation des indemnités de ministres et députés qu’une large part de l’opinion publique trouve excessive. Jugé nul au pouvoir, le MMM ne sait même plus s’opposer. Simitier mem do…

Samedi 18 

Moins de véhicules individuels, davantage de transport en commun. Des horaires respectés. Cela réduirait-il le nombre d’accidents mortels ?

Action culturelle

Degrafting society. Il n’est pas nécessaire de connaître ces jeunes hommes pour mesurer combien l’information est cruelle : alors qu’ils sont à la veille d’être reçus médecins, en Chine, ces deux Mauriciens sont condamnés à neuf et sept ans d’emprisonnement pour trafic de drogue. Des carrières, possiblement des vies brisées. À Maurice, ce sont d’autres professionnels formés, des ingénieurs de Mauritius Telecom selon l’express de ce samedi, qui sont soupçonnés de s’être livrés à un trafic frauduleux d’accès aux chaînes de MyT. Un beau parcours académique, une éducation enviée semblent ne plus constituer un frein face à l’appât du gain. Du pain sur la planche pour Navin Beekarry, à nouveau à la tête de l’ICAC à partir du 1er juillet.

Il ne suffit pas de condamner, de moraliser, il ne sert à rien de geindre à tous les carrefours que ça n’a jamais été aussi mauvais et tutti quanti. Il faut tenter, davantage, de se donner les moyens de comprendre. On s’attendrait  que le département d’études sociales de l’université – soutenu s’il le faut par l’ICAC, le Bar Council, le National Economic and Social Council – lance un programme de recherche. En vue d’identifier, au sein de notre société, les mécanismes inhibant la corruption ou, au contraire, levant les interdits. Il y a, là, un chantier pluridisciplinaire, susceptible de faire appel aux savoirs et problématiques de l’anthropologie culturelle, de l’étude des religions, de l’incitation consumériste, de la philosophie morale, la psychologie sociale.

Et ce n’est pas du il-n’y-a-qu’à…