Publicité
Chamarel: un des totems de la liberté cède
Par
Partager cet article
Chamarel: un des totems de la liberté cède
Elles avaient l’air de sentinelles gardant l’entrée de Chamarel. Ces deux sculptures en bois, représentant des esclaves, donnaient un look unique au village. Mais il ne reste désormais plus qu’un seul totem sur son socle. Et l’autre est sans doute voué au même sort.
«Je siégeais comme conseiller de village quand on les avait installés et c’est moi qui ai récemment aidé à soulever le totem qui s’est écroulé pour le ranger dans un coin», indique Rico L’Intelligent, conseiller du village de Chamarel. C’est avec un pincement au coeur qu’il a vu cette sculpture à terre.
Il n’est cependant guère étonné, ayant vu la lente détérioration de ces oeuvres, laissées à la merci du temps. «La pluie et le vent en sont venus à bout. Aurait-on dû laisser ces oeuvres ainsi exposées aux intempéries et sans entretien, sachant que ce sont des sculptures en bois? Même dans cette situation, ces totems représentent bien le sort de l’esclave, qui fait toujours face aux difficultés, exposé à toutes sortes de mauvais traitements», souligne Rico L’Intelligent.
«Tous ceux qui voyaient ces sculptures se souvenaient de la lutte des esclaves pour leur liberté.»
Ces sculptures, qui comprenaient trois éléments représentant deux esclaves, dont l’un portant un enfant sur la tête, ont été réalisées en 2005 par le sculpteur Lewis Dick et les élèves fréquentant son école. Elles ont été inaugurées en grande pompe au mois d’août de cette année-là. Contacté, l’artiste exprime son chagrin de voir plusieurs semaines de labeur et de passion ainsi s’écrouler. «Des jeunes, dont le plus âgé avait à l’époque 13 ans, ont sacrifié leurs vacances pour venir sculpter le tronc et donner vie à ces personnages», explique-t-il.
Si, pendant des années, touristes et visiteurs ont souvent dit leur appréciation des deux oeuvres, leur entretien n’a pas suivi. Une partie d’un des totems, soit l’enfant, est tombée et s’est retrouvée dans les champs, à servir d’épouvantail, déplore le sculpteur. «Il est triste de voir que les autorités n’ont pas assumé leurs responsabilités. On m’avait promis que tous les deux ans, le vernis écaillé serait enlevé et une nouvelle couche remise», affirme Lewis Dick. Il avait proposé de le faire lui-même, à titre bénévole, mais cela lui a été refusé car «ce n’est pas la procédure».
Aujourd’hui, Lewis Dick réitère son offre. «Si j’obtiens l’autorisation de le faire dans un futur proche, j’irai sur place et je m’attellerai à donner un nouveau souffle à ces totems.»
Le but de ces sculptures était de rappeler aux passants l’existence des esclaves marrons et le rôle qu’a joué le village de Chamarel dans leur fuite vers la montagne du Morne. «Tous ceux qui voyaient ces sculptures se souvenaient de la lutte des esclaves pour leur liberté et aussi du fait que l’esclave et l’affranchi sont passés par là», déclare Rico L’Intelligent.
Publicité
Les plus récents