Y aurait-il connivence au niveau de la Traffic Branch de la police ? C’est en tout cas ce que soupçonnent les enquêteurs de la Criminal Investigation Division Port-Louis Sud après avoir décelé un réseau de faux permis de conduire suivant la perquisition d’une maison à la rue Tang Kwen, au Ward IV, à Port-Louis, le 16 juin. Une chose est sûre. Les enquêteurs n’écartent pas cette piste après la découverte sur place de tampons quasi «genuine» de la Mauritius Police Force, entre autres équipements saisis. C’est à la suite d’informations reçues sur le 148, hotline de la police mise à la disposition du public pour toute dénonciation anonyme, que cette perquisition a été menée.

À l’intérieur, la police a mis la main sur toute la panoplie du faussaire pour la production de faux permis. En l’occurrence, une quarantaine de permis de conduire – dont des learners – des pièces d’identité, des photos en format passeport, du papier de couleur bleu identique à celui du permis de conduire, une photocopieuse, un ordinateur, des cartouches d’encre vides, un clavier sans fil et des tampons de la Mauritius Police Force.

La police a mis le grappin sur le présumé cerveau dans cette affaire lundi 18 juillet. Muddashir Gureebun, un électricien de 26 ans habitant Canal Bathurst, Plaine-Verte, a été arrêté par la CID Port-Louis Sud avant de comparaître en cour le lendemain. Une charge provisoire de Breach of computer misuse and Cybercrime Act pèse sur lui. Il est passible d’une peine maximale de 20 ans de prison.

Samedi, Muddashir Gureebun a commencé à répondre aux questions des enquêteurs de la CID Port-Louis Sud menée par le surintendant de police Behary, avant de faire valoir son droit au silence. Ayant retenu les services de Me Iantish Bacorisen, il a fait savoir qu’il poursuivra avec l’interrogatoire ce jeudi. Cependant, il a eu le temps d’admettre qu’il louait «de temps à autre» cette maison de la rue Tang Kwen au Ward IV, Port-Louis, contre un loyer de Rs 2 000.

C’est à la suite de l’interrogatoire d’une dizaine de «clients» habitant Bambous, Eau-Coulée, Baie-du-Tombeau, Vallée-Pitot et Cité La Cure, dont les pièces d’identité et photos ont été trouvées lors de la perquisition, que la police a pu remonter jusqu’au principal suspect.

Pièces à conviction

Un des «clients», employé par une ligne de bateaux de croisières, a expliqué qu’il a opté pour ce réseau vu qu’il est à l’étranger la plupart du temps. Un autre a expliqué qu’il a échoué à plusieurs reprises à l’examen du permis de conduire. D’où la raison pour laquelle il a choisi cette solution.

Trois autres personnes qui auraient, elles, agi comme intermédiaires entre les clients et le présumé cerveau de ce réseau de faux permis de conduire, ont également été entendues par les enquêteurs de la CID Port-Louis Sud. Leur modus operandi : repérer de potentiels demandeurs de permis de conduire et leur proposer un permis contre un paiement variant, selon le type de véhicule, entre Rs 10 000 et Rs 15 000. L’une d’entre elles a admis à la police qu’elle touchait Rs 2 000 de cette somme et qu’elle serait elle-même détentrice d’un faux permis de conduire obtenu à travers ce réseau.

Une vingtaine d’autres personnes dans le collimateur des enquêteurs devraient être entendues dans le cadre de cette affaire. Si les «clients» et les intermédiaires présumés n’ont pas été inquiétés pour l’heure, un responsable de l’enquête affirme qu’ils sont loin d’être tirés d’affaire.

«C’est clair qu’ils sont complices dans cette affaire, du moment où ils sont tombés d’accord pour avoir un faux permis de conduire. Il y a des preuves, comme leur photo. C’est le Parquet qui décidera de leur sort», indique notre interlocuteur.

Pour sa part, le commissaire de police Mario Nobin met en garde le public contre ce trafic. Il fait un appel pour que les Mauriciens ne se laissent pas tenter par cette voie «facile» pour obtenir un permis de conduire. «Il y a une seule voie pour cela et elle se trouve à la Traffic Branch, aux Casernes centrales», fait-il valoir.