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Rodrigues: début d’un abattage cauchemardesque et cruel
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Rodrigues: début d’un abattage cauchemardesque et cruel
La scène est d’une cruauté insoutenable. Moutons, cabris et bœufs sont égorgés à l’arme blanche dans la cour des propriétaires, avant d’être enterrés dans un trou creusé par des pelleteuses. Les animaux sont rassemblés dans les cours, attachés à des arbres, avant d’être égorgés. Une fois égorgés, les animaux sont jetés à terre, même s’ils ne sont pas encore morts. Les suivants y passent alors que les premiers agonisent à terre…
«Les animaux sont rassemblés, attachés à des arbres, avant d’être égorgés.»
La décision d’abattre le cheptel rodriguais qui aurait été infecté par la fièvre aphteuse est entrée dans sa phase d’action. À ce stade, 328 bêtes ont été égorgées à l’aide d’un couteau, puis enterrées. L’abattage a démarré samedi, avec 85 cas enregistrés. Dimanche, 243 bêtes ont été abattues. Si au départ, il avait été dit que seuls les animaux infectés seraient abattus, ce qui s’est produit lundi 8 août donne l’impression que même les animaux en bonne santé sont tués.
Notre journaliste a été sur le terrain dans la région ouest de l’île, notamment à Pistache et Plaine-Corail, ainsi que dans les régions avoisinantes. Ces régions sont réputées pour contenir le plus grand cheptel de bétail de Rodrigues, à savoir bœufs, cabris et moutons, entre autres. Ce qui nous a été rapporté laisse sérieusement à réfléchir.
Spectacle traumatisant
La manière de faire est décriée par presque tous les éleveurs de la région. Le spectacle est traumatisant, disent-ils. Un éleveur du village de Pistache raconte ce qui s’est passé chez lui, dimanche, aux alentours de 15 heures. «Prémié labataz ti fer kot mwa. Nek fouy trou, koup lagorz, zet dan trou ; mé bef ankor pé débat. Mo finn perdi 62 kabri ek mouton, plis trwa bef. Mo ti pou anbark mo bann toro dan bato le 13 août. Mo ti pou gagn Rs 40 000 pou enn toro. Lor bann kabri ek mouton mo finn perdi net. Zot finn fer labataz divan mwa. Ti bien dir sa. Mo finn tromatizé. Bokou bokou lapert», soupire-t-il, visiblement le cœur lourd. Il ajoute avoir été averti par les autorités compétentes que le bétail déjà mort chez lui devait être incinéré mais qu’il n’y aurait pas de compensation dans ces cas-là. Seuls les éleveurs dont les animaux sont abattus sur place seront indemnisés. Cet éleveur est d’opinion que ce sont les animaux importés qui seraient à l’origine de cette épidémie dans l’île. «Mem bann zanimo ki pa malad, zot pé touyé. Ek vaksin péna. Mo finn gagn bokou dimal kan monn trouv sa. Léker désiré, bien trist. Sa kalité kriyoté-la, difisil pou siporté», lâche-t-il, abattu. Il lance un vibrant appel aux autorités afin d’être indemnisé au plus vite.
Une autre éleveuse raconte : «Mo bann koson pa ti malad. Tir 10 koson dan park kot mwa ek ladan éna ti plenn. Finn tiré, finn touyé. Pa dir mwa nannié, mo nek trouv gro masinn vinn fouy trou. Mo koson ti fini manzé, nek touyé zet dan trou. Pa enn ti douler sa ! Mo ti pé kont lorla pou débrouyé. Mo finn ploré telman mo léker fermal. Zot touy mama koson ki ti pré pou met ba, zot zet dan trou. Vé dir ki mama-la ti mor avek so bann piti vivan dan so vant. Sé enn krim émosionel», raconte-t-elle d’un air désespérée. Certains éleveurs disent même avoir remarqué que seuls certains éleveurs sont ciblés et d’autres pas.
Ce que réfutent les autorités rodriguaises. On soutient que l’abattage se fait dans le respect des lois. Un préposé du service vétérinaire confie que les éleveurs qui perdent leur bétail sont frustrés et déçus. Ce qui les pousserait ainsi à dire que l’exercice n’est pas effectué en respectant les normes.
Nous avons également obtenus des informations, non confirmées à l’heure où nous mettions sous presse, selon lesquelles tout le bétail de l’île serait exterminé afin d’éradiquer la maladie. En effet, même les animaux qui ne présentent aucun signe de maladie sont suspectés d’avoir contracté le virus, étant donné que la Footand-mouth disease compte une durée d’incubation de 15 jours avant l’apparition des premiers symptômes. Selon nos informations, une fois l’épidémie isolée, il faudra attendre deux à trois ans avant d’exporter les animaux.
La SMF attendue dans l’île ce mardi
<p>Afin d’éviter que cette maladie virale ne se propage davantage, des membres de la <em>Special Mobile Force</em> sont attendus dans l’île cet après-midi, mardi 9 août. Ils procéderont à l’abattage par balles demain.</p>
<p>Depuis sa mise sur pied, jeudi dernier, le comité de crise se réunit tous les jours. Présidé par le chef commissaire Serge Clair, il a pour but de suivre de près l’évolution de la fièvre aphteuse et d’évaluer l’impact des mesures prises pour la contrecarrer.</p>
<p>Très sollicité dans les diverses régions de Rodrigues, le vétérinaire fait de son mieux pour venir en aide aux éleveurs. <em>«J’ai fait appel au service vétérinaire pour venir examiner mes bêtes»</em>, explique Jean Daniel Raffin, de Montagne-Fanal. Mais cela fait déjà quelques jours qu’il attend, dit-il.</p>
<p><em>«Ça fait trois semaines déjà que ma vache laitière bave. Et c’est vraiment dur (…) Quatre de mes bœufs sont infectés ainsi que mes moutons»</em>, déplore-t-il. De faire ressortir qu’il a <em>«dépensé Rs 15 000 en termes de nourriture et de médicaments» </em>pour soigner ses bêtes… à la perte. <em>«Zot dir nou donn inzeksion antibiotik. É nou mem ki pé bizin asté médikaman.»</em> D’ailleurs, au total, 60 000 vaccins ont été commandés pour traiter les animaux. Selon nos informations, une partie de ces doses sont attendues dans l’île d’ici la semaine prochaine. <em>«Nous sommes en train de soigner des animaux qui vont être abattus»</em>, s’insurge Jean Daniel Raffin.</p>
Vidéo postée par une internaute sur YouTube.
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