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Comment appelle-t-on un État qui démissionne ?

15 septembre 2016, 09:07

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Comment appelle-t-on un État qui démissionne ?

Dimanche 11 septembre. Cela faisait plus d’une semaine que le ministre de l’Agro-industrie, l’honorable (!) Seeruttun, avait tenu la ligne dure sur l’épidémie de fièvre aphteuse. Il avait tout intérêt, remarquez, puisque c’est quand même sous son ministère, en plein désaveu de ses protocoles et des responsabilités de son personnel, que la maladie a d’abord fait son apparition à Rodrigues, puis, a tout bonnement émigré vers Maurice…

Puis, dimanche après-midi, coup de tonnerre : l’État démissionne complètement de ses responsabilités et permet à trois fermes de la région Ouest de vendre le bétail qui «paraît» être en bonne santé. Le verbe «paraître» est de circonstance, puisque les vétérinaires du ministère, dans un ultime sursaut de dignité, refusent de signer des certificats attestant de la bonne santé des bœufs vendus. Ils ont bien raison ! Car un troupeau avec un seul animal infecté court le risque d’être totalement infecté ! En effet, le virus responsable, un picarnovirus, est très contagieux et, typiquement, a un temps d’incubation d’entre 1 et 12 jours. C’est dire si, au moment de la livraison d’un animal vivant en troupeau serré, les chances que la bête qui «paraît» bien soit déjà infectée sont plutôt élevées…

On livre les bêtes quand même. En cela, le ministre Seeruttun (un comptable de formation – qui a quand même connu l’environnement du MSIRI) est flanqué des ministres Soodhun (un manager de Model High School, selon son CV – on y pratiquait sûrement les sciences ?) et Husnoo (un pédiatre – un scientifique donc !). On ne sait pas s’il a consulté la seule zoologiste du gouvernement, la ministre de l’Éducation, Madame Leela Devi Dookun, mais à entendre la déclaration triomphaliste du maulana Haroon cet après-midi-là, la décision ne semble pas avoir été de nature très cartésienne. Le ministre s’est en fait littéralement lavé les mains, forçant, ce faisant, le pays entier à prendre un sérieux risque de propagation de la maladie. M. Seeruttun, dans sa déclaration de circonstance, pense peut-être avoir désengagé son ministère en disant, d’une part, que ses vétérinaires ne certifieraient pas la bonne santé des animaux et, d’autre part, que c’étaient aux acheteurs d’assumer «leurs responsabilités», mais c’est juste qu’il s’est totalement démonétisé comme responsable ministériel en République !!! Je n’en croyais pas mes oreilles !!!

C’est ainsi que le bien commun des Mauriciens et de leurs élevages divers (du bovin au cochon, du cerf au mouton) a été risqué pour les intérêts particuliers de certains lors d’une fête religieuse. Les croyants avertis et responsables auront, quant à eux, compris les enjeux et refusé de prendre le risque et se sont passé de sacrifices, tout en assumant leurs obligations religieuses. Un État qui démissionne en de telles circonstances est, à mon opinion, en état de déliquescence (fiévreuse !) avancée. 

Je m’excuse d’avance face aux probables accusations que je serais atteint par l’épidémie de «narnienpabon», mais je ne trouve cependant, à ce stade, absolument aucune raison de comprendre cette décision aussi… incompréhensible qu’irresponsable. Mieux ! Si une telle attitude et un tel comportement se généralisaient, ce n’est plus seulement l’avenir d’un ministre (ou d’un Conseil des ministres) que l’on joue sur le tapis vert, mais, sans exagération, l’avenir de notre pays et de ses prochaines générations !