Jason Bourne: un film d’espionnage rugueux et violent

30 septembre 2016

30 septembre 2016, 10:40

Commentaire(s)

10:40

Commentaire(s)

Par

Partager cet article

Jason Bourne: un film d’espionnage rugueux et violent

Dix ans après sa disparition et après avoir révélé au grand jour l’existence de l’opération Blackbriar, Jason Bourne a retrouvé la mémoire. Il vit complètement isolé du monde et gagne sa vie en participant à des combats clandestins. Son ancienne compagne Nicky Parsons, elle, vit en Islande et fait partie d’un groupe d’activistes et pirates du web. En s’introduisant dans le serveur de la CIA, elle découvre des documents concernant le recrutement de Bourne pour le programme Treadstone. Ces documents révèlent également que le père de ce dernier en faisait partie. Nicky prend donc rendez-vous à Athènes avec Jason Bourne pour lui faire part de sa découverte. Les deux se rencontrent au milieu d’une manifestation antigouvernementale qui tourne à l’émeute…

La note : 7/10

Dès le départ, ce thriller paranoïaque invite à l’engagement pour une cause «publique» ou «patriotique», pour poursuivre ce que Bourne sait faire de mieux: jouer perso et partir en quête de son sombre passé. Pourtant, avec Paul Greengrass derrière la caméra, la portée politique du film est sans appel. Divisant son film en séquences d’action épatantes et inédites, dans laquelle la foule est largement mise à contribution, pour impliquer davantage le spectateur dans la réalité géopolitique et technologique de l’intrigue, le réalisateur de Bloody Sunday nous situe dans un premier temps dans un camp de réfugiés syriens, pour une courte introduction loin du glamour des blockbusters actuels, pour ensuite se lâcher totalement en Grèce, avec une séquence d’état d’urgence et de manifestations à l’échelle épique.

Le style nerveux de Greengrass nous plonge dans son chaos, au risque de déstabiliser les yeux les plus délicats: la réalité de Greengrass est terne, violente et ne s’apparente pas à la retransmission d’une chaîne d’info en continue. James Bond et Ethan Hunt n’ont aucune légitimité dans sa vision crue du monde.

Désabusé à l’écran, Damon, qui ne prononce que quelques mots en deux heures de film, a l’air abîmé. Physique et introspectif, l’acteur compose une incarnation en béton, au milieu de comédiens quatre-étoiles. Sur fond de trame de télésurveillance totale, où réseaux sociaux amicaux collaborent avec l’État policier en secret, la complexité du discours (faut-il arriver à pareil excès pour combattre le terrorisme, les hackers et autres lanceurs d’alerte sont-ils vraiment les héros de notre époque moderne?), assume un monde unilatéralement gris.

Face à Matt Damon, Vincent Cassel est une machine à tuer viscérale mais il n’est jamais maquillé en vilain badass charismatique et la magnifique Alicia Vikander dessine ses propres ambiguïtés de comédienne, à la fois charmeuse, faussement frêle et subtilement manipulatrice. La jeune comédienne s’impose un peu plus comme le talent féminin aux facettes multiples qui sera incontournable demain.

Blockbuster au ton fougueux et aux formes rugueuses, et donc atypique dans le monde délavé de Hollywood, ce nouveau Jason Bourne est un thriller d’espionnage high-tech, sans le modernisme clinquant des autres films du genre. À voir pour les fans de films d’espionnage violents et réalistes.