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Mixité et sexualité : des éducateurs prennent position
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Mixité et sexualité : des éducateurs prennent position
Yahya Paraouty, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE) y croit dur comme fer : la mixité dans les écoles, une des conséquences de la mise en place du Nine Year Schooling, est «une mauvaise idée». Son argument? La proximité entre filles et garçons donnerait des idées aux ados. Un raisonnement qui s’appuie sur la diffusion récente du clip «Gat», mettant en scène une adolescente et son petit-ami à peine plus âgé… Un peu mince, comme argumentaire, diriez-vous. Nous avons posé la question à des éducateurs et surtout aux principaux concernés, les collégiens, dont certains peinent à voir où se situe le problème… La plupart ont requis l’anonymat.
«Pa koné kot déba la été...», lâche un collégien rencontré à la gare du Nord, qui vient de passer des épreuves du School Certificate. «Les garçons et les filles sont tout le temps ensemble, que ce soit lors des leçons particulières, dans le bus ou ailleurs. Lorsque les écoles seront mixtes, il ne s’agira que de quelques heures de cohabitation de plus», analyse-t-il. Son ami, qui fréquente une école privée, précise qu’avoir des filles et des garçons dans la même classe apporte une autre dimension aux discussions. «Nous avons d’autres opinions, une autre façon de penser, car à cet âge, nous ne fonctionnons pas de la même manière.»
Nous ne pouvons nous empêcher de leur poser la question qui fâche. Être ensemble dans l’enceinte de l’école ne leur donnerait-il pas davantage d’occasions de se rapprocher un peu trop ? «Ou koné, si éna pou fer sa, pa pou atann dan lékol. Nou zwenn déor, kapav al partou», relativise l’une des filles du groupe. Et ce n’est certainement pas la mixité qui leur donnera envie de tourner des clips, nous font-ils comprendre.
Ces adolescents sont catégoriques : dès l’entrée au collège, les cours de biologie aidant, la sexualité n’a plus de secrets pour eux. Certes, concèdent-ils, des cours d’éducation civique et sexuelle pourraient leur être d’une grande aide «pour mettre un terme aux comportements irresponsables».
C’est un point de vue que partagent de nombreux éducateurs. Une enseignante d’un établissement pour filles, qui estime que «la mixité est une bonne chose car elle permet de mieux comprendre l’autre sexe et de le respecter», met aussi en avant la nécessité de donner une formation adéquate aux profs : «Rien qu’avec les filles, nous sommes parfois témoins de comportements hors de l’ordinaire. Vous seriez étonné d’apprendre à quel point les filles sont sexuellement actives. C’est lorsque les jeunes couples rompent que nous rencontrons des problèmes. Souvent, les filles viennent se ‘confesser’ et nous perdons nos moyens, malgré notre expérience de la vie. Avec la présence de garçons, d’autres problèmes vont certes surgir, et nous devrons savoir comment les gérer. »
Le recteur d’une Star School de la capitale préconise aussi la formation des enseignants en amont. «Cela fait plus de 20 ans qu’ils travaillent avec des classes non mixtes. Il serait souhaitable qu’ils sachent, en avance, à quoi s’attendre.»
Et quid des comportements liés à une sexualité précoce ? Une solution, explique notre interlocuteur, serait la présence d’un Discipline Master – un membre du personnel formé «qui s’assurerait que tout se passe bien à l’école. Hors de l’école, cela se passe déjà bien entre les filles et les garçons».
Pour Soondress Sawmynaden, président de l’association des recteurs, la mixité, «étape cruciale», réglera même quelques questions liées au genre. «Lorsque garçons et filles seront ensemble, ils apprendront à traiter le sexe opposé différemment, ce qui mettra un terme à toutes les déviances», dit-il, avant de préciser qu’il faudra aussi faire l’éducation des parents !
D’autre part, poursuit Soondress Sawmynaden, la mixité permettra de régler certains problèmes de… matières. «Nous avons beaucoup de garçons qui souhaitent étudier les Home Economics et des filles qui veulent se lancer dans le Design and Technology, ce qui est compliqué en ce moment. Or, cela pourrait changer. Qui plus est, cela va dans le sens de l’égalité des genres.»
Il est rejoint dans ses propos par le recteur d’une Star School sise à Port-Louis. Pour lui, la mixité est «imparable». «Nous faisons partie des rares pays qui n’ont pas de système éducatif mixte. Pour avancer, il faudra absolument passer par là.»
Par contre, notre interlocuteur préconise la prudence. «C’est une métamorphose totale que connaîtra notre système éducatif. Il faudrait être sûr que tout soit bien en place avant de poursuivre dans cette voie.» À commencer par les infrastructures – comme des toilettes et infirmeries séparées.
Alors, convaincu, Yahya Paraouty ? Le syndicaliste campe sur ses positions. Auparavant, dit-il, il y avait davantage de collèges mixtes «mais cela causait des problèmes. Le gouvernement a essayé, à nouveau d’avoir un collège mixte à Ébène mais a vite abandonné l’idée». Mais les choses ont changé aujourd’hui, n’est-ce pas ? Le président de l’UPSEE se radoucit : «Nous ne sommes pas contre, mais nous avons des réserves. Il faut que le ministère ait un plan bien défini. Ce n’est pas le moment de prendre nos élèves pour des cobayes.»
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