Du bleu à perte de vue, un vent soufflant de la terre vers la mer et des rochers dont les contours ont été redessinés à la force des vagues. Ce spectacle s’offre à ceux qui se tiennent au pied du phare d’Albion. C’est à côté de cet édifice qu’on compte ériger une raffinerie. Une intention signée Near Shore Resources Ltd.

Au vu de ce spectacle à couper le souffle, difficile d’imaginer qu’une structure flottante, à laquelle viendront s’approvisionner d’autres navires, se nichera dans la baie d’Albion. Pourtant, l’objectif du gouvernement est de développer le Petroleum Hub et de commencer les activités de Bunkering.

Avec cette initiative, c’est aussi une vague de contestation qui s’est déclenchée. Elle est semblable à celle qui s’était opposée au projet de centrale à charbon des promoteurs malaisiens CT Power. Le même site avait d’ailleurs été choisi. Une coïncidence ?

Pas tout à fait. Les habitants d’Albion sont conscients que les terres qui se trouvent juste à côté du phare sont très convoitées par les investisseurs. D’une part, le site se trouve non loin du port et est accessible par bateau. Ensuite, il existe une baie qui rend l’accostage des navires possible. Tous ces atouts expliquent tant de convoitise.

Si le paysage côté mer est captivant, celui côté terre est loin d’être très attrayant visuellement. Une vaste étendue de terres trop arides pour des arbres. Çà et là, des broussailles qui ont poussé dans la direction du vent et quelques chiens errants. Ici, l’on croise également des amoureux en quête d’un peu de tranquillité.

«Le contrat de CT Power a été résilié après de longues années de combat.»

Même si le phare semble, en apparence, être un solitaire, il ne se trouve pas loin des résidences qui ont été construites petit à petit à Albion. Nous avons rencontré Cyril Rabion, un Français qui s’y est installé en 2014. Il se rendait à la supérette du coin. Il dit avoir entendu parler de la raffinerie récemment.

«J’accueille très mal cette idée, tout comme j’accueillais très mal l’idée de la centrale à charbon. J’ai choisi Albion à cause de sa tranquillité. Mon fils est asthmatique et je ne veux pas habiter à côté d’une usine. J’espère qu’elle s’implantera très loin, si possible pas à Maurice», soutient le Français.

À l’entrée d’Albion, près de la plage publique, difficile de rater la banderole attachée pour dire non à la raffinerie de pétrole. Elle a été placée par la Plateforme citoyenne, non loin des petites caravanes qui vendent de la nourriture.

Georges Brelu-Brelu, président de la Plateforme citoyenne, dit ne pas comprendre la position de l’actuel gouvernement. «Le contrat de CT Power a été résilié après de longues années de combat. C’était le soulagement. À présent, on entend parler d’une raffinerie. Ce qui est pire !»

Dans les ruelles des morcellements d’Albion, les gens semblent ne pas croire que ce projet de raffinerie pourra se concrétiser. «Bé ti tir CT Power enn lépok, met enn lot aster ki pli pir ! Nounn sap dan karay, noun tom dan difé», lâche Emmanuel, autre habitant de la localité qui ne cache pas sa colère.