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Megh Pillay : «MK a délaissé Kuala Lumpur en faveur d’Air Asia X»
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Megh Pillay : «MK a délaissé Kuala Lumpur en faveur d’Air Asia X»
Le bilan financier d’Air Mauritius (MK), le départ d’Air Asia X, le retour de Mike Seetaramadoo. Autant de sujets qu’a abordés l’ancien DG d’Air Mauritius.
Le secteur de l’aviation a été riche en actualités cette semaine. Qu’est-ce qui a retenu votre attention ?
D’abord, l’extension de la coopération MK/AF-KLM avec la desserte d’Amsterdam. L’Europe est le bread and butter de notre économie du tourisme. Les efforts de diversification vers d’autres marchés sont nécessaires mais pas au détriment de l’Europe. Amsterdam jouera un rôle important.
Mieux encore ?
La progression du plan de renouvellement de la flotte de MK a aussi retenu mon attention. J’ai mis du temps dans une rationalisation de la flotte comprenant des A350 et d’autres appareils mieux adaptés à l’éventail des aéroports couverts par le réseau. Tout comme un mix d’acquisitions et de leasing soutenable par les perspectives de croissance, tout en respectant les accords déjà conclus. J’ai également retenu le retrait imminent d’Air Asia X et un peu moins les comptes de MK se terminant au 31 décembre 2016 ainsi que l’évolution des arrivées touristiques en janvier 2017.
Ce que vous prévoyiez sur Air Asia X (AAX) s’est avéré…
Le départ d’AAX ne m’a pas surpris. J’ai lu leur communiqué et je pense qu’ils ont réalisé qu’il était difficile de transposer leur modèle qui marche très bien sur les courts–courriers sur une destination comme Maurice. Le trafic à partir de Maurice est limité. Un billet Maurice-Kuala Lumpur en dessous de Rs 10 000 attire et stimule une partie du marché. Cela crée une demande parmi ceux qui n’auraient pas voyagé du tout. Mais la base est limitée et ceux qui ont pris l’avantage ne pourront en profiter trop souvent.
Pourquoi étiez-vous opposé à l’arrivée de ce «low-cost» ?
Il est faux de dire que je suis contre les low-costs ou contre AAX. J’ai seulement attiré l’attention sur le fait qu’elle opérera en concurrence avec MK et ne devrait pas bénéficier des subventions sur une route concurrentielle. Le vol direct de sept heures d’AAX est plus attirant que le vol MK avec escale de deux heures à Singapour. Les coûts par siège sont bas car ils densifient leurs cabines avec plus de sièges que MK. Et ils opèrent à partir et vers des aéroports secondaires pour éviter les frais et bénéficier des mesures incitatives. MK, qui a essayé en vain d’arriver à un accord avec eux pour développer des synergies, a délaissé Kuala Lumpur en faveur d’AAX.
En quoi le retrait d’AAX va-t-il bénéficier à MK ?
Les risques que MK perde son trafic vers Kuala Lumpur disparaissent et elle peut dorénavant se concentrer sur Singapour. Pour les recettes de ventes à partir de Maurice, Kuala Lumpur était deuxième derrière Paris. Avec une escale à Singapour et la compétition d’AAX sur Kuala Lumpur, des tarifs bas auraient été intenables avec une augmentation du coût du carburant. MK peut maintenant respirer. Mais de là à augmenter sa capacité sur cette route pour «remplacer» AAX sera un saut périlleux sans filet de protection.
Qui était le lobbyiste pour l’arrivée d’AAX ?
Aucune idée. AAX a le droit d’opérer sur Maurice et n’en avait pas besoin. L’accord bilatéral Maurice-Malaisie prévoit un transporteur désigné par chaque gouvernement. Malaysia Airlines n’opérant plus, malgré sa participation au partage de code sur les vols opérés par MK, personne ne pouvait objecter à son arrivée. Le lobby évoqué par un obscur journal en ligne me semble fantaisiste.
Qui est derrière son départ ?
Il n’y a aucune raison de croire qu’AAX ment dans son communiqué quand elle avance la raison «to deploy capacity to our strongest markets». On privilégie les routes les plus rentables dans un marché qui est dynamique. C’est la règle du jeu dans l’aviation commerciale !
Le couloir aérien est-il voué au même sort qu’AAX ?
Je préfère m’abstenir sur le sort du couloir aérien. Le temps nous le dira. Par contre, je peux vous dire que quand AAX est arrivée, le management de MK a proposé d’une voix que le couloir s’appelle plutôt Asia Corridor et que MK vole directement sur Kuala Lumpur, en gardant la flexibilité de nous ajuster par rapport à la dynamique du marché, en retenant d’autres destinations comme Bangkok. La concurrence directe avec AAX sur Kuala Lumpur aurait permis une différentiation de produits, chacun exploitant son propre créneau et son marché niche. Nous opérons des appareils similaires mais avec des densités cabines et prestations différentes. Le deux auraient peut-être stimulé la demande de manière soutenable et durable. Atteindre les 50 000 passagers aurait été plus réalisable. Cette proposition, acceptée dans un premier temps, n’a pas été retenue.
Hormis les billets «low-cost», en quoi AAX a-t-elle été bénéfique pour le pays ?
Il aurait pu l’être en abaissant le seuil des voyages internationaux abordables. Mais il faut adapter notre modèle de destination loisir pour accommoder ce mode de transport et ce marché.
Comment accueillez-vous le retour de Mike Seetaramadoo ?
Depuis mon départ et la démission de Mes André Robert et Désiré Basset, je m’attendais à ce que cela arrive le même jour. Comme directeur général d’une entreprise publique, j’avais le devoir d’agir dans l’intérêt de MK. J’ai assumé mes responsabilités suivant les conseils indépendants de deux Senior Counsel. Ils travaillent avec MK sur des dossiers concernant le personnel et ce, bien avant mon arrivée. Le reste est du domaine public et je ne souhaite pas y revenir.
Qui a eu le dernier mot dans cette affaire ?
Une fois parti, cela m’était égal.
Regrettez-vous d’avoir suspendu l’Executive Vice President (EVP) Commercial et Cargo ?
Jamais. Quand vous êtes investi des responsabilités de la gestion d’une compagnie cotée en Bourse, soit vous les assumez, soit vous partez.
«Quand vous êtes investi des responsabilités de la gestion d’une compagnie, soit vous les assumez, soit vous partez.»
Seriez-vous toujours le CEO de MK si vous aviez écouté Arjoon Suddhoo et Prakash Maunthrooa et n’étiez pas allé de l’avant avec le comité disciplinaire ?
Ce n’est pas à moi de répondre.
Venons-en au dernier bilan financier de MK. Quelle a été votre contribution aux profits «records» de Rs 1,1 milliard, sachant que vous avez dirigé la compagnie durant huit mois ?
Le temps nous le dira, même si on sait que ça s’oublie le jour où l’on part.
Sans vous, ce bilan aurait-il été réalisable ?
Certainement ! Il serait incorrect de ma part de crier au miracle ou de prétendre être un grand Zorro. Avec le cours du pétrole si bas pendant si longtemps, il faut être vraiment nul pour faire moins bien. Les deux trimestres de l’année financière commençant le 1er avril coïncident avec la période creuse pour les opérations. Historiquement, on affiche des pertes en cette période qu’on rattrape avec la haute saison qui suit. Pour la toute première fois, MK termine ces deux trimestres avec un profit excédant Rs 600 millions. Donc, le moins auquel on puisse s’attendre pour l’année est le double, soit Rs 1,2 milliard.
Arjoon Suddhoo attribue les profits aux structures mises en place par le «board»...
Il n’est pas dans mes habitudes de contredire un collègue directeur dans un board où j’ai siégé. Mais il me semble qu’il a répété la même chose à chaque présentation d’un bilan trimestriel positif. Tout comme après le bilan annuel qu’on a présenté à l’assemblée générale en juillet dernier. Si ce qu’il dit est vrai, allons essayer de le quantifier après avoir comptabilisé l’impact de la chute du cours pétrolier sur les chiffres d’affaires de MK.
Expliquez-nous. ..
Dans les coûts opérationnels de MK, le carburant représente entre 25 et 45 % des dépenses courantes. Le profit est la différence entre les dépenses et les revenus. En 2014, 2015 et 2016, le cours moyen annuel du pétrole Brent chuta de plus de 50 %, d’USD 99 à USD 53 et USD 44 le baril. Le dernier rapport annuel dévoile que le carburant a coûté 174,7 millions d’euros en 2014/15 contre 142,3 millions d’euros en 2015/16. Ce qui fait 32,4 millions d’euros (Rs 1,3 milliard) de moins. Pourtant, MK afficha seulement 16,5 millions d’euros de profits.
Pourquoi ?
On disait que la cause était le hedging. Ce même hedging était toujours là lors de ma garde de huit mois et se termina qu’en novembre juste après mon départ. Il a été pris en compte pour les neuf mois. Comme le cours du pétrole a chuté de 53 à 44 dollars le baril, on doit s’attendre à bien plus que Rs 1,3 milliard que pour cette raison. Si ces «changements aux structures» mises en place par le board ont vraiment contribué aux résultats positifs, il faut expliquer cette conclusion immédiatement. Sinon, il faudra attendre la publication des comptes rendus détaillés.
Pourquoi les dernières arrivées touristiques vous interpellent-elles ?
La croissance de 5 % est intéressante. Hormis la Chine et, assez loin derrière, l’Inde, les arrivées de l’Asie ne sont pas encourageantes. Ceux qui défendent à tort et à travers citent 300 et 400 % de croissance mais ne disent pas que c’est de la croissance à partir d’une base faible. De Singapour, 187 arrivées en janvier 2017 comparées à 77 en janvier 2016 fait 142 % de croissance mais reste négligeable. Pis, malgré un vol de MK sur Maputo, il n’y a eu que 94 arrivées du Mozambique en janvier 2017 comparé à 213 en janvier 2016 quand il n’y avait aucun vol.
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