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Sunil Banymandhub: «Nous avons suivi à la lettre les dispositions de la loi»

1 mars 2017, 12:14

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Sunil Banymandhub: «Nous avons suivi à la lettre les dispositions de la loi»

 

La recommandation aux actionnaires de ne pas vendre leurs actions de New Mauritius Hotels (NMH) a été émise en conformité avec les dispositions des «take-over rules» et non en raison de dissensions au conseil d’administration du groupe hôtelier.

Vous êtes, avec Herbert Couacaud, signataire d’un communiqué qui atteste que la valeur de l’action de NMH est de Rs 30,96 alors qu’ENL Land/Rogers la proposent à Rs 21 aux petits actionnaires. Qu’est-ce qui vous a poussé à émettre ce communiqué ?

Nous avons suivi à la lettre les dispositions des take-over rules émises par la Financial Services Commission (FSC). Ces règles établissent avec précision les procédures à suivre et les responsabilités du conseil d’administration dans le cas d’une offre publique d’achat. Elles nous placent dans l’obligation de recommander aux actionnaires d’accepter ou de rejeter l’offre, sur la base d’une opinion formulée par des experts indépendants dans des délais précis. La loi est aussi très précise sur le contenu du reply document, et nous l’avons suivie. La recommandation du conseil d’administration aux actionnaires s’inscrit dans la suite logique des conclusions des experts indépendants.

Pourquoi KPMG ? Parce que dans le passé, ce cabinet n’a jamais travaillé ni pour le compte de NMH, ni pour celui des offerers (NdlR : ENL Land/ Rogers). Ce qui permet d’établir leur indépendance. Ce cabinet a fait son évaluation à partir d’informations publiées officiellement ainsi que sur la base d’entretiens avec le management sur les perspectives de la compagnie. KPMG a évalué l’action à Rs 30,96. À la réception de ce rapport, le conseil d’administration était tenu de donner aux actionnaires son avis. Puisque le prix établi par KPMG est supérieur à l’offre de Rs 21, nous avons recommandé aux actionnaires de ne pas vendre leurs actions aux offerers.

Estimez-vous qu’ENL Land/Rogers sont en droit de proposer l’action à Rs 21 ?

ENL Land/Rogers ont, eux aussi, suivi les dispositions du take-over code, qui, je le rappelle est très précis. Il exige que le prix offert reflète le montant le plus élevé entre le prix du dernier achat de l’acquéreur et la moyenne des cours de Bourse des six derniers mois. La FSC a fait sa due diligence et a conclu que les dispositions du code ont été respectées. Elle a donné le feu vert pour que l’offre soit faite aux actionnaires.

Il n’y a donc pas de mésentente entre vous et ENL Land/Rogers ?

Non, il n’y en a pas. En tant que membres du conseil d’administration, nous représentons tous les actionnaires, et pas seulement un groupe de minoritaires. Nous avons commandité un rapport sur la base d’experts indépendants et, sur cette base, il n’y a rien qui cause problème. Trois directeurs impliqués aux niveaux de Rogers et d’ENL Land se sont abstenus de voter en respect des règles de gouvernance, mais cela ne traduit aucune dissension. Tous les membres du conseil d’administration acceptent et respectent les conclusions des experts indépendants.

La transaction la plus critiquée est celle de février 2016, quand Swan achète 3,6 % des actions de NMH à Rs 29. La compagnie d’assurance soutient ne pas avoir agi en concertation avec ENL Land/ Rogers. Êtes-vous de cet avis ?

Au conseil d’administration, nous ne sommes pas au courant des circonstances dans lesquelles se font des achats et des ventes d’actions entre un willing buyer et un willing seller. À la lecture des take-over rules, on note que des personnes agissant en concertation sont des personnes qui coopèrent par le biais d’acquisition d’actions d’une compagnie cotée, en vue d’exercer le contrôle effectif de cette compagnie. Le conseil d’administration de NMH n’a jamais été informé, ou constaté que de tels arrangements auraient existé.

Vous recommandez aux actionnaires de ne pas vendre. Qu’est-ce qui vous fait dire que l’action ne va pas chuter davantage ?

Le rapport de KPMG, qui attribue une valeur de Rs 30,96 à l’action, a été établi à une date précise, sur la base d’éléments disponibles à la fois sur l’état actuel de la compagnie et sur ses perspectives. Beaucoup de choses pourraient changer. À mon avis, le risque que nous jaugeons mal est celui de perturbations sociales qui affecteraient le tourisme. Nous avons vécu les émeutes-Kaya en 1999. Fort heureusement, cela a été un incident isolé. Toutefois, nous suivons avec attention les nombreux cas de vols et d’agressions sur les plages, ou de vols dans les hôtels. Nous ne sommes pas à l’abri d’incidents de violence ou de soulèvements qui affecteraient nos hôtels. Cela dit, ce sont des cas extrêmes. Pour l’heure, avec les informations dont nous disposons, il y a plus de chances pour que le prix de l’action monte, qu’il n’y en a pour qu’il baisse.

Estimez-vous que la FSC est en droit d’enquêter sur cette transaction ?

Je n’ai pas de mandat pour parler au nom de la FSC. Je pense que la FSC est en droit d’enquêter sur n’importe quelle transaction.

Si vous étiez régulateur, auriez-vous initié une enquête sur le cas NMH ?

En tant que régulateur, je demanderais de manière générale des précisions sur toute transaction qui dépasse un certain seuil. J’envisagerais la suite à la lumière de ces éclaircissements. Je note ici que la FSC, qui a tous les droits pour enquêter, non seulement n’y a pas donné suite un an après cette transaction, mais qu’elle a aussi donné son aval à l’offre d’ENL Land/Rogers.

La capitalisation boursière de NMH est inférieure à la valeur nette de ses actifs, est-ce que le cas pour beaucoup d’entreprises cotées en bourse ?

Je n’ai pas de statistiques à l’appui sur ce fait. Mais, je pense que cela est le cas pour de nombreuses compagnies mauriciennes cotées en bourse. Je pense toutefois qu’il est important de comprendre que la valeur d’une compagnie dépend très peu de celle de ses actifs. Sa vraie valeur est établie sur la base de ses profits et de ses perspectives, que les évaluateurs ramènent à un prix du jour par la méthode du discounted cash flow. D’autre part, la valeur boursière dépend non seulement de ces calculs d’évaluation mais aussi de l’offre et de la demande pour les actions. Dans le cas de la Bourse de Maurice, le faible niveau de l’offre et de la demande fait chuter le prix des actions.

Si tel est le cas, de nombreuses entreprises mauriciennes ne seraient-elles pas des proies faciles à des hostile bids ?

En théorie, oui. Dans la pratique, je ne pense pas qu’il y ait de risques puisque la majorité de ces compagnies sont détenues par des holdings qui ne sont pas vendeuses. Il y a eu, dans le passé, des tentatives de take-over qui se sont révélées très compliquées. Cela dit, dans d’autres pays, une telle situation aurait donné lieu à davantage de hostile bids.

Est-ce une bonne ou une mauvaise chose que des investisseurs étrangers prennent le contrôle de compagnies mauriciennes ?

Je n’ai aucun problème de fond avec l’idée que les actionnaires soient étrangers. Ils peuvent nous amener d’autres marchés, de nouvelles technologies et des compétences. Il y a cependant deux écoles de pensée à ce sujet. La première voudrait que le rachat par des étrangers soit bon puisque, en proposant un prix supérieur au cours de Bourse, ces acheteurs contribueraient à dégager une valeur non-réalisée, à remettre aux actionnaires la vraie valeur de leurs actions.

La seconde école met en garde contre les situations que de tels achats par des étrangers pourraient engendrer. Sans généraliser, car beaucoup de compagnies internationales opèrent à Maurice et emploient des milliers de personnes, certaines compagnies étrangères prennent des décisions sur des bases de la logique financière uniquement, sans aucune émotion. Cela peut engendrer des pertes d’emplois. Les actionnaires mauriciens sont, pour leur part, plus engagés à assurer la pérennité de l’entreprise et de ses emplois.

 

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