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Sridhar Nagarajan: «L’héritage de la MPCB et de la NCB n’a pas eu d’impact sur la MauBank»
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Sridhar Nagarajan: «L’héritage de la MPCB et de la NCB n’a pas eu d’impact sur la MauBank»
Au moment de prendre la direction de la MauBank en janvier 2016, Sridhar Nagarajan s’est donné deux ans pour en faire un établissement bancaire profitable. Une année après, il fait le point et indique que les objectifs ont largement été atteints.
Après plus d’une année à la tête de la MauBank, quel est le constat au niveau des objectifs que vous vous êtes fixés, notamment par rapport à l’image de la banque ou encore par rapport à la possibilité de réaliser des bénéfices ?
Les objectifs étaient de trois ordres. Premièrement, il s’agissait de faire la démonstration que la MauBank mérite la confiance de sa clientèle. Deuxièmement, il fallait que la MauBank fasse des bénéfices. Enfin, il s’agissait de consolider la part de marché de la Mauritius Post and Cooperative Bank (MPCB) et de la National Commercial Bank (NCB) qui était de 3 % seulement. Ces trois objectifs ont été atteints.
L’enseigne MauBank est bien ancrée dans le secteur bancaire. Le deuxième objectif était un véritable défi, dans la mesure où il s’agissait de rendre profitable, dans un délai de deux ans, une société qui a hérité, de deux banques, des pertes en milliards en 2015. Les comptes au 30 juin 2016 faisaient état de pertes de Rs 451 millions occasionnées par les opérations de remise en ordre de l’état de situation de la MPCB et de la NCB. Nous sommes confiants qu’au 30 juin 2017, nous réaliserons des bénéfices de Rs 250 millions après impôts. Cette prévision s’appuie sur notre performance durant le premier trimestre de l’exercice financier 2016-2017 qui montre des bénéfices de Rs 68 millions.
Les bénéfices après impôts pour janvier et février avoisinent les Rs 100 millions. La part de marché de la MauBank est passée de 3 % de celle combinée de la MPCB et de la NCB pour atteindre les 7 %. Ce qui fait de la MauBank la troisième plus importante banque locale sur le marché.
Le secteur d’activités de la MauBank que nous n’avons pas touché jusqu’ici est celui ayant trait aux procédures en cours à la banque. Notre approche consiste à créer des procédures qui simplifient les choses pour notre clientèle et qui éliminent toutes les procédures administratives inutiles. Notre clientèle doit être au centre des préoccupations de la banque.
Quelles ont été les implications pour la MauBank de passer à une nouvelle culture de travail, dont l’objectif est d’aider cette banque à connaître un sort autre que celui de la MPCB et de la NCB ?
Une culture qui fait du service à la clientèle la priorité des priorités ne peut se matérialiser que si l’entreprise accorde d’abord à ses ressources humaines l’importance qu’elles méritent. Trois conditions sont indispensables pour rehausser le niveau et la qualité de services. Les employés doivent être des employés épanouis dans leur travail. Ils doivent faire la démonstration qu’ils ont confiance dans l’administration. Finalement, ils doivent avoir une vision claire et nette des orientations de la banque.
Comment la MauBank s’y est-elle prise pour renforcer chez l’employé l’esprit d’appartenance ?
La migration d’une culture à une autre est un procédé qui peut durer entre deux et trois ans. Ce changement comporte plusieurs volets. Il y a eu un volet de communication. La direction a expliqué à ses 650 employés la nature de sa vision, sa stratégie et sa mission. L’autre volet a consisté à amener les employés à intégrer dans leur mode de fonctionnement les cinq valeurs que nous avons adoptées. Il s’agit d’une prédisposition à être toujours réceptif aux directives de la banque, l’intégrité, l’innovation, l’esprit d’équipe et le souci à viser l’excellence dans l’exécution des tâches qui leur ont été confiées.
Cette campagne a nécessité l’organisation d’une séance de sensibilisation pendant une période de 90 jours. Nous prévoyons la mise en place d’un programme de 90 jours cette fois-ci pour célébrer ces cinq valeurs. D’autres mesures se sont greffées à ce programme de sensibilisation. Il s’agit entre autres de la mise en place d’un programme de formation au leadership afin d’inciter ceux qui ont développé cette capacité à servir d’exemple aux autres.
Nous avons mis en place une campagne de recrutement de jeunes talents au sein du personnel même de la banque, disposés à s’associer à l’aventure dans laquelle la MauBank s’est engagée. C’est un procédé qui prendra du temps pour se matérialiser.
Qu’est-ce qui a été fait pour que la cohabitation de la MauBank avec l’héritage laissé par la MPCB et la NCB ne compromette pas les chances de réussite de la nouvelle banque ?
Nul ne saurait ignorer le fait que la MauBank traîne derrière elle un passé hérité du parcours en dents de scie de la MPCB et de la NCB. Il y a eu deux types d’héritage. Le premier inclut les prêts consentis avec des intentions peu nettes et que l’on peut aisément qualifier de prêts toxiques. L’autre type de prêts concerne ceux qui ont été effectués avec une certaine forme de désinvolture administrative. Ce sont des prêts destinés à des personnes engagées dans des entreprises commerciales. Ce relâchement administratif est caractérisé par l’absence de suivi et de vérification de la capacité de remboursement du bénéficiaire. Cette faille administrative a été éliminée. Une unité chargée de gérer les actifs de la banque, la Special Asset Management Team, a été mise en place. Le personnel de cette équipe a l’aptitude et la compétence voulues pour ce genre d’opération. Il est intransigeant avec les débiteurs malveillants en ce qui concerne des prêts toxiques. Des poursuites sont engagées. La banque n’hésitera pas à avoir recours à des ventes à la barre si elle n’a pas d’autre alternative pour récupérer son dû.
Par contre, la banque n’est pas aussi rigoureuse à l’égard de débiteurs dont l’accumulation de dettes ne relève pas de leur faute. Si l’entreprise est viable et que le débiteur est quelqu’un de sérieux, de nouvelles options sont offertes à l’intéressé. On peut rééchelonner ses dettes. On peut également lui procurer un ensemble de conseils susceptibles de lui permettre de réorienter sa stratégie.
L’héritage de la MPCB et de la NCB n’a aucun impact sur nos opérations et nous ne devrions pas le laisser nous distraire de nos objectifs. Il faut reconnaître que l’argent injecté par le gouvernement dans MauBank a pour objectif d’atténuer les effets de cet héritage peu reluisant.
Dans l’esprit du public, il existe une école de pensée qui n’hésite pas à associer tout exercice de radiation de dettes impayées du livre des comptes d’une banque à une opération d’annulation de dettes. Comment le système de «bad debts» est-il géré au niveau de la MauBank ?
Le recours à la radiation de dettes impayées du livre comptable ne signifie pas qu’un débiteur ne sera pas forcé de rembourser ses dettes. La banque poursuit ses actions légales pour le remboursement de la dette à travers l’exécution de toutes les sécurités et garanties à sa disposition. Le procédé de radiation est utilisé à bon escient notamment pour éviter de payer des impôts sur des actifs non performants. Nous avons éliminé les failles qui, dans le précédent système, pouvaient permettre des pratiques illégales, que ce soit de la part d’un client ou de l’administration bancaire. Il y a trois façons de gérer une situation de dettes impayées quand tous les recours de repaiement non légaux ont été épuisés. Il s’agit de l’administration judiciaire de la compagnie en question, de sa mise en liquidation ou de l’engagement des poursuites contre les débiteurs. Dans le cadre d’une administration judiciaire, nous exigeons que le préposé engage ses propres finances également.
Combien d’auteurs de dettes impayées ont-ils été poursuivis en justice ?
Plus d’un millier de cas sont en train d’être examinés en cour. Ce qui a nécessité le recours au service de six avocats qui travaillent sur ces dossiers à temps plein.
Comment la traque de mauvais payeurs patentés s’opère-t-elle ?
Le Mauritius Credit Information Bureau (MCIB) est une plateforme indispensable dans l’analyse en vue de l’octroi des crédits. C’est un service mis à la disposition des banques commerciales par la Banque centrale qui nous permet d’avoir une idée exacte du niveau d’endettement d’un client. Les banques n’ont qu’à consulter les données.
Dès réception d’une demande pour un emprunt, le nom du demandeur sera confronté aux données disponibles auprès du MCIB. Ce n’est pas un instrument pour rejeter les demandes. Il nous permet de déterminer s’il faut enquêter davantage. À Maurice, si vous êtes un mauvais payeur auprès d’une institution bancaire, cette information sera connue de toutes les banques. Une banque sera prudente avant d’approuver une demande de crédits si les informations du Mauritius Credit Information Bureau indiquent que le bénéficiaire a une dette impayée.
Dans quelle filière d’activités l’exercice de contre-vérification de la crédibilité et de la stabilité financière d’un client s’impose-t-il avec le plus d’acuité ?
C’est davantage au niveau des petites et moyennes entreprises (PME). Selon les dispositions légales, contrairement aux sociétés brassant plus de Rs 50 millions, les PME ne sont pas tenues de faire auditer leurs comptes. Nous avons créé un groupe composé d’une douzaine de cabinets d’audit de petite taille. Dès que nous sommes en présence d’une PME qui éprouve des difficultés à présenter ses comptes selon les normes établies, nous lui demandons de se faire aider par l’un des cabinets d’audit en question. C’est une des nombreuses initiatives prises par MauBank pour rehausser le niveau de performance des petites et moyennes entreprises.
Il y a eu également l’établissement d’une liste de conseillers en affaires dont les honoraires sont abordables, et la mise en place de regroupement en cluster de PME qui évoluent dans la même filière d’activités. Notre objectif est de parvenir, d’ici trois ans, à transformer 30 % à 40 % de micro-entreprises en PME, 10 % à 15 % des PME en des entités de taille moyenne et 3 % à 5 % des entreprises de taille moyenne en de grandes entreprises et dont les chiffres d’affaires sont au-delà des Rs 50 millions. Nous avons en effet approuvé le déboursement de Rs 200 sous le Government Sponsored Scheme de 3 %, sans garantie, à environ 120 individus et petits entrepreneurs dans des secteurs aussi variés que l’agriculture, l’artisanat, la couture, la bijouterie ou encore la boulangerie.
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