Publicité

[Vidéo] Caméra cachée: visite chez un docteur qui guérit «tou zafer»

26 mars 2017, 22:20

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

[Vidéo] Caméra cachée: visite chez un docteur qui guérit «tou zafer»

Cherche «volontaires» pour tester un remède contre le sida. Les malades ont 99 % de chance de guérir. L’annonce, vue sur Facebook, a de quoi susciter l’indignation, l’incrédulité et la curiosité. Autant de bonnes raisons d’aller rendre visite au médecin, caméra cachée sous le bras. Ou ailleurs. Personnes influençables ou vulnérables s’abstenir.

Première surprise : le lieu n’a rien d’une clinique ou d’un cabinet de consultation. Pas de livrets médicaux ni de diplômes encadrés en vue. Même pas une «carte» détaillée de l’anatomie du corps humain. Des squelettes dans le placard alors ? 

Ce qui frappe dans le «cabinet spécial» du docteur avec souliers, c’est que les réclames vantant les techniques pour apprendre une langue étrangère sont légion. D’autres affiches font la promotion d’une agence qui facilite les démarches pour les étudiants désirant partir voir ailleurs. Avons-nous atterri dans une agence de pub ? Mais revenons au sujet qui nous intéresse : le «remède miracle» contre le sida. On se fait passer pour un patient, bien entendu. 

«J’ai dit qu’il y a 99 % de chance de guérison pour ne pas dire 100 %», insiste, avec aplomb, l’homme assis derrière le bureau. Le «produit» n’est pas nouveau et ce taux de réussite n’est pas annoncé au hasard. Environ 200 personnes, notamment en France et en Russie, ont déjà goûté aux bienfaits de la potion magique. 

C’est au tour des Mauriciens d’en bénéficier, si l’on comprend son raisonnement. Voilà pourquoi il cherche maintenant dix volontaires porteurs du virus du sida. Le but, confie-t-il, est de faire une étude en bonne et due forme, de documenter les résultats et l’évolution des patients. Et de nous balancer quelques mots savants à la figure, dont «CD 4» et «viral load»

Que fera-t-il des findings de cette fameuse étude ? Ben, il ira les présenter au monde entier lors de conférences internationales. Dix patients, n’est-ce pas là un échantillon trop restreint pour une étude d’une telle ampleur? «Si ti éna 100, ti pou bon mem…» 

Quid des risques pour la santé des «cobayes»? Il n’ y en a aucun assure notre interlocuteur. Hormis quelques nausées et vomissements. Mais même ces effets secondaires peuvent être atténués par l’ajustement de la composition des doses avalées. 

Justement, que doit-on envoyer dans le gosier ? Si on a bien compris, il s’agit d’un savant mélange de médecines allopathique et ayurvédique. «Si on n’utilise que la médecine, on connaît déjà le résultat. La médecine ayurvédique fait bien plus. Si on mélange les deux, l’un ‘potentialise’ l’autre.» Rassurezvous, on n’a pas tout compris non plus. 

(…) Lorsqu’il aura présenté les résultats de son ambitieuse étude et que le traitement sera connu à travers monde entier, un patient devra débourser environ rs 50 000 s’il veut guérir.

Pourtant, à l’écouter, tout est d’une simplicité enfantine. Le docteur prépare l’élixir que le sujet doit passer prendre chez lui tous les matins car «il ne se conserve pas». Un flacon de liquide secret qu’il doit ingurgiter pendant toute la journée à des heures régulières pendant 21 jours à un mois, et voilà ! Plus de sida… 

Pour prouver ses dires, il exhibe un document. En russe, bien évidemment. Le coût de l’opération ? Rien. Mais lorsqu’il aura présenté les résultats de son ambitieuse étude et que le traitement sera connu à travers monde entier, un patient devra débourser environ Rs 50 000 s’il veut guérir. «Mais nous travaillons sur une formule spéciale. Le client ne paie pas s’il n’est pas satisfait.» 

On veut en savoir davantage. Mais le docteur a l’art et la manière de détourner la conversation, de changer de sujet. Au point parfois de se perdre. 

Ce remède trop mystérieux ne va-t-il pas provoquer d’autres problèmes? Boire une mixture inconnue comporte tout de même des risques. «Non. Même si la personne est atteinte d’autres maladies opportunistes ou autoimmunes, elle ira mieux.» 

D’ailleurs, l’étude se concentre sur le VIH mais elle débouchera sur d’autres remèdes. Contre la malaria, la maladie de Crohn, le cancer… tout. Attention toutefois: «Il y a également le côté spirituel de la guérison. Méditation, yoga et autres devront être pratiqués en même temps. Bon, pas pour le sida, mais pour d’autres problèmes organiques.» 

Le diabète, par exemple, poursuit le docteur intarissable qui défend sa théorie, fait que le corps développe une résistance à l’insuline et aucun livre médical ne dit pourquoi. Le traitement diminue la résistance car c’est «une philosophie par micro-organisme…» On vous passera les détails car la suite de l’explication est aussi floue que le début. 

Persévérons. Revenons-en au VIH. Comment est-ce que le fluide fonctionne dans le corps ? «Il détruit le ‘microbe’ du sida. Li pou al rod li pou atak li», balance-t-il avec tout le sérieux du monde. Puis la personne est guérie, martèle-t-il, convaincu. 

Pour quelle raison les scientifiques sont-ils passés à côté d’une telle arme ? C’est parce qu’il ne sont pas intéressés aux «substances qu’il faut». S’ensuit un autre interminable monologue sur le pourquoi du comment et une thèse sur la raison pour laquelle la chimiothérapie ne marche pas tout le temps. Une question d’alcaloïdes qui offensent la nature, apparemment. 

Oui, mais avant d’ingurgiter ce divin breuvage, il faudrait savoir ce qu’il contient, pardi! «Plusieurs plantes. Peut être une quarantaine en petites quantités, dont plusieurs qui sont familières. Gingembre jaune, cumin, tulsi, corossol. Tout ça pris au bon moment donne le résultat voulu.» 

Pour le moment, le produit est administré par voie orale, mais à l’avenir, il se peut que cela passe par les veines «pour une guérison plus rapide». 

Plus rapide encore, la vitesse à laquelle nous avons détalé après cette visite d’un autre genre…