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Drame à Montagne Jacquot: l'impossible deuil...

25 avril 2017, 21:30

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Drame à Montagne Jacquot: l'impossible deuil...

«Dieu l’a appelé. Nous n’y pouvons rien…» Chez les Jurawon, à Vallée-des-Prêtres, la vie a repris son cours normal. Ou presque. Le corps de Shahaan Jurawon, 18 ans, n’a jamais été retrouvé. Il y a presque deux mois, ses trois amis et lui s’étaient retrouvés en difficulté en mer, à montagne Jacquot. Un seul d’entre eux a pu s’en sortir.

La police a arrêté les recherches une semaine après le drame. Shafeenaz Jurawon, la mère de Shahaan, affirme que les autorités ont fait tout leur possible. «Les caves ont été inspectées. J’ai assisté aux recherches. Ils ne pouvaient rien faire de plus.» 

Il n’y a plus de larmes. Simplement un sourire triste et des yeux qui peinent à ne pas se mouiller à chaque fois que le sujet est évoqué. Résignée, elle lâche : «Je sais qu’il n’y a plus d’espoir de retrouver le corps de mon fils. Mais encore une fois, c’est Dieu qui décidera.» 

Garçon brillant

Pour les Jurawon, retrouver la dépouille leur permettra de faire le deuil comme il se doit. Cela leur donnera aussi un lieu pour se recueillir et honorer la mémoire du jeune garçon. Mais pour l’instant, ce n’est qu’à travers leurs souvenirs qu’il existe. Shahaan devait commencer ses études supérieures cette année. Il avait été accepté à l’université de Médine.

«Même aujourd’hui, lorsque je marche dans la rue, les gens m’arrêtent pour me raconter tout le bien que faisait mon fils», soupire Shafeenaz. L’anecdote qui l’a le plus marquée vient d’un des anciens enseignants de Shahaan. Ce dernier lui a raconté que pendant le Higher

School Certificate, Shahaan l’avait aidé à s’occuper de la classe. «Le prof m’a dit qu’il était l’un des plus brillants de son groupe. Il aidait les élèves qui avaient des problèmes, il corrigeait les devoirs et tout…» D’ailleurs, à la maison, c’était toujours lui qui aidait sa soeur, surtout pour les mathématiques, sa matière préférée. 

 Méprise

Le lendemain de la disparition, le Groupe d’intervention de la police mauricienne et la National Coast Guard ont repêché un corps. Naushad Jurawon, le père de Shahaan, l’avait identifié comme son fils. Mais plus tard dans la soirée, la famille a réalisé qu’il s’agissait de Wasim Oderuth. «C’est lorsque mon mari lui donnait le dernier bain qu’il l’a réalisé. Les dents de Qasim n’étaient pas comme celles de mon fils», explique Shafeenaz Jurawon.

Une méprise due au fait qu’à la morgue, le corps était quelque peu abîmé et gonflé après avoir passé plus de douze heures dans l’eau. «Puis, il y avait l’émotion aussi. Les deux garçons avaient la même corpulence, d’où l’erreur.» Il a fallu retourner le corps à la morgue. Refaire les procédures…

 «Comment oublier?»

Un semblant de normalité est revenu peu à peu chez les Oderuth aussi. La mère de Wasim a repris le travail cette semaine, alors que son père s’est envolé pour Madagascar. Cela fait deux ans qu’il travaille là-bas. La grand-mère du jeune homme,Asma Oderuth, avance que peu à peu la vie reprend son cours normal. Mais, «comment oublier ? C’est le pire drame de notre vie». La conversation glisse doucement vers Wasim et la tristesse quitte son visage dès qu’elle replonge dans ses souvenirs. Asma Oderuth énumère les autres passions de son petit-fils. «Vous savez, il a toujours été sportif. Il a été médaillé plusieurs fois lors de compétitions de badminton. Il allait souvent à la gym. Puis il adorait nager.» La liste est longue.

Son sourire disparaît à nouveau lorsqu’elle évoque le jour du drame. Son petit-fils a disparu sans crier gare. Près d’un mois après les funérailles, les blessures sont toujours bien ouvertes. 

«Nous n'en parlons pas»

Chez Mudaththir Fanny, le rescapé, ce sujet est toujours tabou. «Ces jeunes gens ont eu un problème qu’ils n’ont pas cherché. Personne n’a voulu ça», lâche le grand-père du jeune homme,Gorah Binath. Depuis l’accident, Mudaththir Fanny suit un traitement à l’hôpital. «Nous l’entourons de notre mieux. Il est toujours affecté par la mort de ses amis et nous n’en parlons pas tellement.»