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Gaël Froget : portrait d’artiste

27 avril 2017, 23:58

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Gaël Froget : portrait d’artiste

Il enchaîne les expositions, à Maurice et ailleurs. Gaël Froget a réussi le pari fou de vivre de son art : la peinture. Et la semaine dernière, son talent n’a été que réaffirmé, lors de sa participation à l’art urban fair à paris, l’une des foires d’art les plus populaires.

C’est un Gaël décontracté, en short, T-shirt et baskets – avec quelques gribouillages dessus –, qui nous reçoit. Nous sommes à Quatre-Bornes, à Bactory. Le lieu où l’artiste crée (voir hors-texte). Une fois la porte massive en bois poussée, il nous guide au premier étage. Là, c’est l’explosion de couleurs, accentuées par l’éclairage naturel de la pièce. Çà et là sont accrochés des tableaux un peu trash, d’autres sont appuyés contre le mur  et certaines pièces «en cours», pas encore montées sur châssis, jonchent le sol. Les murs, eux, ont été vandalisés au spray par endroits. Le lieu est frais et respire la rébellion. 

La petite visite se poursuit au deuxième étage, où sont exhibées les œuvres qui cherchent preneurs, ou encore celle qu’il a peinte pour la compagnie aérienne Emirates, qui l’avait sollicité l’an dernier...

En quelques années, Gaël Froget a su imposer sa signature dans le monde de l’art contemporain. Sa peinture, il ne souhaite pas la définir, même si certains la qualifient de «figurative», dans un mouvement tantôt «pop», tantôt «street», précise l’artiste. «C’est plus de l’hyperréalisme si tu veux.»

Messages  de félicitations 

Même s’il a du mal à comprendre l’engouement que suscite son travail, Gaël Froget est désormais une figure bien ancrée dans le milieu. Sa participation à l’Art Urban Fair, l’une des foires d’art les plus connues, à Paris, témoigne de son succès. Celle-ci, qui a débuté jeudi dernier, a pris fin dimanche. Choisi avec quelques autres artistes parmi 70, Gaël y a exposé une dizaine de tableaux. «Dès l’ouverture, j’ai reçu des messages de félicitations des gens qui ont vu mon travail.» 

Ce n’est pas la première fois que son travail traverse les frontières : France, Angleterre, Singapour, Malaisie, Bali, Dubaï… Il connaît. Mais, il avoue avoir jubilé, derrière son écran d’ordinateur, en apprenant sa participation à la foire : au même stand que lui, le numéro 10, se trouvait Banksy, la référence en matière de street art. «Je n’arrivais pas à y croire. Ça n’arrive pas à un artiste tous les jours.» Alec Monopoly et FenX, représentés par la même galerie que lui, y étaient aussi exposés. 

Moins d’une semaine plus tôt, c’est au Caudan qu’il a donné quelques coups de pinceaux, lors du StreetArt Together, organisé par Meta-Morphosis dans le cadre du projet Moris Dimé. Il s’y trouvait en tant qu’ambassadeur. Il a décidé de rejoindre la cause, de promouvoir l’art et la culture «par plaisir». Surtout «vu leur collaboration avec Saphir» et si cela peut aider. Ce qu’il souhaite pour la suite, c’est «aller dans le quartier des enfants faire quelque chose». 

Son parcours 

Sa dextérité avec le pinceau cache bien que la peinture, c’est «tard» qu’il l’a commencée. Gaël Froget se décrit comme un jeune homme de 30 ans, pas particulièrement spécial. Il y a l’artiste, puis la personne. Lui, c’est celui qui fuit les soirées chics, où il est invité à «expliquer» son travail et recevoir les critiques. Être sous les feux des projecteurs lui fait même peur, confiet-il. D’ajouter, par exemple, que depuis que ses œuvres sont à l’hôtel Royal Palm, il n’y a pas une fois mis les pieds. «Je ne suis pas quelqu’un de glamour.» 

Parce que Gaël, lui, est timide à la base. «Pendant mon enfance j’étais créatif, mais je n’avais pas trouvé le bon moyen de le montrer.» Il a essayé la musique, la mode – qu’il a étudiée –, le technical drawing, etc. Mais l’émancipation artistique n’a eu lieu que le jour où il a attrapé un pinceau et s’est laissé aller, à 21 ans. «Je n’avais plus besoin de m’expliquer.» C’était un des moments les plus importants de sa vie, un vrai tournant. 

Vendre de l’art  à Maurice 

Son retour à Maurice, après avoir étudié et travaillé en Malaisie et à Singapour, est aussi un point important. En 2014, il se laisse tenter par la proposition d’une propriétaire de galerie qui l’invite à exposer ses travaux à Maurice. En même temps, une offre de travail lui est faite à Singapour. Il la met en attente. Il revient pour faire de l’art à Maurice et «en vendre surtout», rit-il. L’idée semble alors saugrenue et le pari est risqué. 

Il rentre au pays avec trois tableaux sous les bras et dispose de six semaines pour en faire... 40 ! Ses parents le croient fou, plaisante Gaël. Mais à force de travail et de nuits blanches, il réussit à peindre le nombre qu’il s’était fixé. 

Cependant, il n’a aucun fonds pour l’exposition. Si la galerie est à sa disposition, tous les coûts associés à la mise sur pied d’une expo ne le sont pas. Il frappe alors à la porte de plusieurs personnes qui croient en lui. Celles-ci, sans hésiter, l’aident financièrement. Et elles ne seront pas déçues. 

Coup d’essai coup de maître. À son premier vernissage, toutes ses œuvres sont sold out. Ses parents finissent par comprendre qu’il est sérieux. Le besoin insatiable de créer aboutit, deux mois plus tard, à une nouvelle exposition. Le travail ne s’arrête plus, lui permettant ainsi de vivre de la vente de ses tableaux. Et aussi de décliner les invitations pour du live painting, qui ne lui procurait aucun plaisir. 

Sans contrainte 

Désormais, il crée plus librement et sans contrainte. Il laisse le soin à son agent de gérer l’aspect financier de son business, entre autres. L’artiste peint quatre à cinq heures par jour, plusieurs œuvres à la fois. Pour éviter la frustration d’attendre que la peinture sèche sans n’avoir rien à faire, dit-il. 

D’ailleurs, lorsque nous le rencontrons, Gaël Froget est en pleine phase d’expérimentation ; il s’essaie à l’art abstrait. Cet essai est né d’un besoin de «s’exprimer différemment». Néanmoins, l’intention demeure la même. Comme dans chacune de ses créations, chaque couleur, chaque détail et coup de pinceau ou de spray a sa raison d’être. Pas de calcul mais de la spontanéité derrière les mouvements. Ceux-ci se doivent tous de retranscrire une émotion, un sentiment, si ce n’est d’en provoquer. En bref, de raconter une histoire. Et dans le cas présent, dans tous les sens. 

Au final, ce qu’il désire, c’est de toucher ceux qui croisent son travail de la manière la plus pure possible. Pour cela, lorsqu’il ne travaille pas, il se documente beaucoup sur la musique, les films et les mouvements mainstream et underground, entre autres, qui parlent au monde. Et dans la mesure du possible, aspire à «être reconnu pour son art» et avoir la vie privée la plus paisible possible.

Bactory : «c’est ici que je dois être»

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	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/2_55.jpg" width="620" />
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<p>Plus qu&rsquo;un simple lieu de travail, Bactory est un coup de cœur. C&rsquo;est un endroit qui l&rsquo;inspire et qui est, conséquemment, le lieu de création de prédilection de Gaël Froget. La première fois qu&rsquo;il y a mis les pieds, il y a un peu plus d&rsquo;un an, l&rsquo;artiste s&rsquo;y est immédiatement projeté, attiré par le volume et l&rsquo;espace. <em>&laquo;En deux minutes, je me suis dit : &lsquo;C&rsquo;est ici que tu dois être&rsquo;.&raquo;</em> Si bien que durant une année, il travaille <em>&laquo;comme un malade&raquo;</em> pour l&rsquo;acquérir. Depuis, l&rsquo;atelier, situé à cinq minutes de chez lui, à Quatre-Bornes, est témoin de sa progression. <em>&laquo;Mon travail est passé à un niveau supérieur grâce à cet endroit.&raquo;&nbsp;</em></p>

<p>Mais outre l&rsquo;espace du bâtiment, c&rsquo;est son environnement qui l&rsquo;a plu : c&rsquo;en est un qui l&rsquo;interpelle, dans une ville où il a grandi. Rien à voir avec les ateliers où il a travaillé, dans des immeubles pompeux, où il avait presque peur de salir le sol avec de la peinture, raconte l&rsquo;artiste. Son attachement à Bactory est tel qu&rsquo;il en fera peut-être un jour sa maison.</p>

Le rituel

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<p>Chaque artiste a son &laquo;rituel&raquo; avant d&rsquo;entamer le travail. <em>&laquo; Non, je ne fais pas de balade, tout ça &raquo;</em>, se moque-t-il. Lui, doit se retrouver seul d&rsquo;abord, ensuite identifier dans laquelle des <em>&laquo;cases&raquo;</em>, qui correspondent à des émotions, il se trouve. C&rsquo;est un exercice qui lui permet de donner une direction à son travail. Il cherche alors la musique qui va avec ; il ne bosse jamais sans, soutient-il, avec le groupe Cunnilinguistic résonnant dans l&rsquo;atelier. <em>&laquo; C&rsquo;est le nom qui m&rsquo;a attiré d&rsquo;abord, mais ils font de la bonne musique &raquo;</em>, lance Gaël Froget. Cette étape de faite, il revoit ses travaux à la recherche d&rsquo;un <em>&laquo;catalyseur&raquo;</em>, et débute alors son travail sans grande réflexion ; moins de plans et plus d&rsquo;actions. <em>&laquo; C&rsquo;est peut-être parce que je suis paresseux &raquo;</em>, ricane-t-il sans culpabilité. Mais avec le temps, poursuit l&rsquo;artiste, il s&rsquo;est perfectionné afin de ne plus devoir jeter quoi que ce soit.</p>