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Univers carcéral: L’intégrité des gardiens de prison mise à l’épreuve au quotidien

29 avril 2017, 22:23

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Univers carcéral: L’intégrité des gardiens de prison mise à l’épreuve au quotidien

Les gardiens de prison sont au centre des débats actuellement. Quelle relation entretiennent-ils avec les détenus ? Y a-t-il moyen d’empêcher qu’ils soient corrompus par les prisonniers ? Difficle…

«Wealth, women and wine»… Cette expression a été utilisée lundi par Sam Lauthan, membre de la commission d’enquête sur la drogue pour décrire la relation entre certains prisonniers, soupçonnés d’être des trafiquants de drogue, et des gardiens de prison. Selon les intervenants présents, certains gardiens se laissent souvent aller à des confidences à des prisonniers et, de là, ils deviennent des proies faciles. Une source, qui a souhaité garder l’anonymat, nous raconte comment l’intégrité des gardiens de prison est mise à l’épreuve au quotidien.

D’emblée, notre interlocuteur nous explique que les détenus n’ont nul besoin de faire «ami-ami» avec des gardiens de prison pour qu’ils effectuent des transactions avec eux. Les rumeurs se répandent très vite en milieu carcéral et «dès que vous y mettez le pied, on vous informe de qui il faut se méfier et qui sont les personnes de confiance».

 Comment les gardiens de prison se font-ils prendre dans le manège des détenus ? La situation financière de ces officiers joue un rôle clé. «Si un détenu, présumé trafiquant de drogue, obtient ce genre d’information, il peut facilement s’arranger avec ce gardien pour qu’ils s’aident mutuellement. Personne ne refuse un peu d’argent facile. Puis, une fois qu’ils ont commencé, ils continuent», nous confie la source. Et d’ajouter que si les officiers corrompus sont réticents dans un premier temps, ils finissent par céder si la somme est conséquente.

Un gardien de prison, qui a travaillé à la High Security Prison de Melrose, soutient que les détenus s’immiscent tout le temps dans les conversations entre gardiens de prison. «Ils sont très curieux. Ils posent beaucoup de questions pour obtenir le maximum d’informations», avance-t-il.

Selon un autre gardien de prison, les jeunes officiers sont plus souvent la proie des prisonniers. Ces derniers, ayant souvent plus d’expérience dans le milieu carcéral que ces jeunes officiers, savent repérer et approcher les «plus faibles». Est-ce que les détenus vont souvent à la pêche aux gardiens de prison pour faire la mule ? «Non. Car ils savent qui sont les gardiens corrompus. Transférer ces officiers ne sert à rien, parce que les “grands patrons” sont très souvent connectés entre eux. Ainsi, ils n’ont pas toujours besoin de rechercher de nouvelles mules.»

Divers objets transportés par les mules

<p>Téléphones portables, cartes SIM, chargeurs, <em>&laquo;powerbanks&raquo;</em> et même drogue ont été retrouvés entre les quatre murs des prisons. Comment ces objets atterrissent-ils dans ces endroits sécurisés ? Notre source explique que les mules utilisent plusieurs astuces. &laquo;<em>Auparavant, les gardiens de prison corrompus les transportaient dans leurs effets personnels comme les chaussures, dans de la nourriture ou sur eux. Sauf que ces méthodes sont devenues obsolètes. Aujourd&rsquo;hui, il y a d&rsquo;autres astuces</em>.&raquo; Nous n&rsquo;en saurons pas plus.</p>

 

Vinod Appadoo: «La Prison Security Squad ne sera pas démantelée»


 

Des gardiens de prison sont dans le collimateur de la commission d’enquête sur la drogue pour être restés en contact avec des détenus. Y a-t-il un moyen de prévenir cela ?

Cela relève surtout de l’éthique du gardien de prison. Nous la leur apprenons et ils savent qu’il ne faut pas que les détenus aient des portables. Lorsqu’un prisonnier est parenté à un gardien de prison, ce dernier se doit de le signaler. C’est la règle.

Bien sûr, la commission d’enquête sur la drogue fait son travail. De mon côté, il me faudra faire un constat de ce que trouve la commission et voir comment prévenir ces abus.

Dans le milieu carcéral, on parle aussi du démantèlement de la Prison Security Squad (PSS). Qu’en est-il ?

 L’équipe ne sera pas démantelée. Il y a, cependant, un comité qui étudie en ce moment une possible restructuration du système. Nous voudrions éventuellement que la PSS soit déployée dans les prisons. Ainsi, il n’y aura pas une seule personne à la tête de cette brigade. Ses officiers prendront des ordres du personnel en charge de la prison où ils seront basés.

Pourquoi ?

Tout ce que je fais, c’est pour le bien des officiers et des détenus. De toute façon, le personnel de la PSS effectue les fouilles, travaille dans la tour et escorte les prisonniers. Finalement, elle fait la même chose que les gardiens de prison. De plus, tous les responsables de prison vous diront qu’ils sont en manque de personnel. Il faudra donc revoir le système. Il ne faut pas que nos gardiens de prison soient stressés non plus.

Qu’en est-il des brouilleurs de réseau de téléphone dont on a longuement parlé ?

 Un appel d’offres a été lancé. Ce sera bientôt une réalité.

Est-ce que les caméras de la prison de Melrose ont été réparées ?

 Nous en avons 146 qui ne marchent pas en ce moment. Mais nous avons commencé à les remplacer. Il y avait aussi des rats qui rongeaient les câbles et nous avons lancé un projet de dératisation. Les contrats devraient être alloués cette semaine.

Visites aux détenus : Les avocats doivent se justifier

Durcissement de la loi. Les avocats devront désormais remplir un formulaire de demande pour pouvoir rendre visite à leurs clients en prison. C’est ce qu’a annoncé sir Anerood Jugnauth, ministre mentor et ministre de la Défense, lors du Passing out parade de 63 gardes de prison, mercredi. Ce, suivant la polémique autour des hommes de loi ou «fake lawyers» ayant rendu des visites répétées à des détenus.

C’est le ministère de la Défense, le State Law Office et la prison qui travaillent sur la fiche d’application. Déjà, il nous revient que des hommes de loi seront sommés de s’expliquer sur la raison de leurs visites en prison. Ils devront aussi révéler le nom du détenu, la date de la visite ainsi que le nom de la personne qui a retenu leurs services.

«Quand les prisonniers ont été condamnés et que l’affaire est passée en cour d’appel, pourquoi ont-ils besoin de voir leurs avocats ?» s’est demandé Vinod Appadoo, le commissaire des prisons, s’adressant à la presse à l’issue du Passing out parade mercredi. D’ajouter que toutes ces visites sont enregistrées dans un Visitor’s Book.

Toutefois, le commissaire des prisons confie à l’express qu’il compile en ce moment une liste d’avocats ayant effectué des visites – dont le motif est suspect – aux détenus. Celle-ci sera envoyée à la commission d’enquête sur la drogue. «Bien sûr, les hommes de loi doivent prouver qu’ils sont enregistrés au barreau. Mais des fois, les détenus ne savent même pas qui sont leurs avocats…» souligne Vinod Appadoo.

 Appelé à réagir face à cette décision du ministre mentor, Yahia Nazroo, ancien secrétaire du Bar Council, explique qu’il faudrait que le conseil soit mis au courant d’un tel changement. «Tout est une question de relation de travail entre le barreau et les autorités. Si on peut s’entendre, il n’y aura pas de problème.»

 De préciser que les autorités peuvent toujours introduire de telles mesures tant que cela n’empêche pas un avocat de voir son client. «Si c’est simplement pour enregistrer les visites, nous comprenons cette démarche. Mais s’il y a un autre but, il faudra voir. Surtout si cela prend du temps et retarde les visites, cela pourrait poser problème.»

Sollicité, le président du Bar Council, Me Jacques Tsang Mang Kin, a indiqué que suivant l’annonce de sir Anerood Jugnauth mercredi, le comité du Bar Council demandera au commissaire des prisons de lui communiquer les détails de cette démarche afin de pouvoir se prononcer.