Depuis quelques jours, la région du Bouchon est sous les feux des projecteurs. Non pas pour des raisons macabres, mais parce qu’elle devrait bientôt accueillir une «Smart City». Il s’agit d’un projet du Sugar Investment Trust.

Une petite brise souffle sur le village du Bouchon. Véhicules et piétons se font rares. Au bord de la plage publique, nous entendons des chants. Des femmes du troisième âge chantent à gorge déployée en bhojpuri. L’une s’élance, commence à danser. Deux autres tapent sur des bouteilles avec une petite branche de filao. Un peu plus loin, une femme s’aventure à marcher au bord de l’eau. Ses pensées semblent à mille lieux de là… 

Pourtant la mer à cet endroit, est tout, sauf attirante. Noirâtre par moments, boueuse à d’autres, la vie sousmarine ne semble plus y exister. Un peu plus loin, des mangroves ont poussé au milieu de cette eau. 

L’année dernière, la région avait été secouée par le naufrage du cargo MV Benita. Ce pavillon libérien avait échoué sur les récifs suivant une mutinerie à bord entre les membres d’équipage. De l’huile, principalement une grosse quantité de cambouis en provenance de la salle des machines du cargo, avait envahi le lagon et une partie de cette côte du Sud-Est. Et depuis juin dernier, la mer ne semble pas avoir retrouvé sa sérénité… 

En quittant la plage, nous traversons Camp CarolKenya. À quelques kilomètres de là, l’on aperçoit l’ancienne usine sucrière de Mon Trésor Mon Désert. Jadis roi du Sud-Est en matière de sucre, l’usine n’est qu’un amas de bâtiments sans vie à présent. Le silence des environs est pesant. 

Dans un virage, une flèche indique «Pont Naturel». Il faudra s’armer de courage, surtout pour ceux qui sont en voiture, pour y accéder. Le sentier est rocailleux, fait de pierres et de roches volcaniques. Il est ordinairement emprunté par les camions qui transportent de la canne à sucre. 

Après ce parcours du combattant, nous arrivons finalement au Pont Naturel. Le spectacle qui s’offre à nous est à couper le souffle. Plus menaçantes les unes que les autres, les vagues déferlent. Viennent s’écraser contre les rochers volcaniques. 

Un groupe de touristes, en partie des ressortissants chinois, n’arrêtent pas de pousser des cris de surprise devant cette nature qui ne compte pas laisser l’homme la dompter. Une Chinoise, plus téméraire que ses amis, ose s’aventurer sur le rebord d’une petite colline. En faisant des selfies, elle ne remarque pas une grande vague qui vient s’écraser à quelques mètres d’elle. Éclaboussée, elle décide sagement de rebrousser chemin. 

Ils ont été plusieurs à ne pas avoir connu la même chance qu’elle. Récemment, un homme a perdu la vie en voulant sauver ses chiens. Un infirmier a, lui, été emporté par une vague en s’aventurant trop près du bord de la façade rocheuse… Malgré le danger, impossible de rester insensible devant la beauté du Pont Naturel.