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Arjoon Suddhoo: «Oui, Choomka m’a présenté un projet éolien à l’IBA»

9 mai 2017, 11:45

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Arjoon Suddhoo: «Oui, Choomka m’a présenté un projet éolien à l’IBA»

C’est dans le boardroom de l’Independent Broadcasting Authority (IBA) que s’est tenue une partie des discussions pour faire avancer un projet… éolien. Ce sont-là des faits qui viennent conforter l’enquête de l’express publiée le 4 mai et faisant état des pratiques pour le moins contestables de la directrice de l’IBA, Youshreen Choomka. Pourtant, celle-ci, pour sa défense, a martelé qu’il s’agissait là de transactions portant sur sa «private practice as barrister». Sauf que des informations mises en avant par l’express tendent à prouver le contraire.

Ouvrir les portes du gouvernement

Zoom d’abord sur le projet éolien du Dr Soo Song Lee. Ce chercheur coréen, inventeur d’une technologie éolienne, a transféré des milliers de dollars sur le compte bancaire de celle qui était alors présidente de l’IBA. Selon notre enquête et à la lumière de tous les documents publiés (e-mail, échanges WhatsApp), cet argent serait des commissions perçues par Youshreen Choomka pour ouvrir les portes du gouvernement et des autorités au Dr Lee. Ce dernier a finalement bien obtenu un Power Purchase Agreement du Central Electricity Board (CEB).

C’est dans le boardroom de l’IBA qu’elle a présenté le projet du Dr Soo Song Lee le 2 décembre 2015. Cette réunion, qu’elle a elle-même présidée, a vu la participation d’Arjoon Suddhoo, en tant que directeur du Mauritius Research Council (MRC). «Oui, la réunion a bien eu lieu au siège de l’IBA à Port-Louis», confirme-t-il.

Pourquoi ce lieu ? Arjoon Suddhoo dit ne pas se souvenir, mais il précise qu’il y était en tant que directeur du MRC. «Le Mauritius Research Council est à l’écoute de tous ceux qui veulent proposer de nouvelles technologies. Bien sûr, j’ai recommandé au Central Electricity Board d’être prudent puisque celle qui nous avait été présentée ce jour-là n’avait jamais été testée. J’ai, par exemple, posé des questions sur la capacité de ces éoliennes à résister aux vents cycloniques.» Certains cadres du CEB auraient aussi participé à cette présentation.

Joint au téléphone hier, l’un des trois membres du triumvirat à la tête du CEB dément catégoriquement. «La seule fois que j’ai entendu parler de ce projet, c’était lors d’une présentation à laquelle l’ex-directeur, M. Hébrard, m’avait demandé, à moi et d’autres techniciens, de participer. Cette présentation a eu lieu au Mauritius Research Council», maintient Chavan Dabydin.

Notre enquête a aussi révélé que Youshreen Choomka a demandé $ 10 000 par projet, «instead of the usual $15 000», à un autre groupe d’investisseurs qui lorgnaient une demi-douzaine de projets (soit Rs 350 000 et Rs 520 000, environ, respectivement).

Le fact-finding committee

Toute cette affaire a mené à l’institution d’un Fact-finding Committee (FFC)  annoncé hier. Prameeta Devi Rasheela Goordyal-Chittoo, fonctionnaire au bureau de l’Attorney General, présidera ce comité et devra plancher sur les «lobbies à $ 15 000 de Youshreen Choomka».

La constitution de ce comité intervient cependant après de nombreuses tractations de haut niveau et bien des tergiversations. La position initiale du gouvernement c’était «d’attendre l’enquête de l’ICAC», enquête qui a débuté il y a 40 jours, avec la plainte de la représentante mauricienne d’Earthcore Investment Ltd.

C’est ce qu’avait dit Etienne Sinatambou, porte-parole du gouvernement, lors d’une conférence de presse, vendredi. Mais «l’impossibilité de l’exécutif à empiéter sur l’enquête de l’ICAC» évoquée par Etienne Sinatambou a été écartée par Pravind Jugnauth.

Ce dernier a hier institué ce Fact-Finding Committee. Que s’est-il passé au cours des derniers jours ? Une source à l’hôtel du gouvernement qui nous a parlé hier, avant l’émission du communiqué du PMO, explique que Pravind Jugnauth a rencontré Youshreen Choomka, ce que le service de presse du PMO ne confirme, ni n’infirme.

Une autre source toujours de la Government House affirme que Youshreen Choomka a rencontré un autre ministre, en l’occurrence, Yogida Sawmynaden, ministre des Technologies de la Communication et de l’Innovation (TCI). Celui-ci est resté injoignable hier soir pour confirmer cette réunion. La raison de cette rencontre : la stratégie élaborée par le gouvernement pour éviter tout embarras serait de demander au ministre des TCI de répondre à la question parlementaire de Rajesh Bhagwan à l’ordre du jour du Prime Minister's Question Time. Cela équivaudrait à reléguer cette interpellation à la fin de la tranche des questions, avec un gros risque qu’on n’y réponde pas. Faute de temps.

Le contrat au Dr Lee renouvelé le mois dernier

Alors que son Power Purchase Agreement lui donnait seulement un an pour réaliser son projet,  qui n’a pas avancé d’un iota depuis la signature de l’accord en mars 2016, le Dr Soo Song Lee a obtenu, le mois dernier, un renouvellement «sur les mêmes conditions».

Interrogé à ce sujet, Mootoosamy Naidoo, le Chairman, déclare que ce renouvellement ne coûte rien au CEB. «C’est à lui de prouver que sa technologie est viable. Le Dr Lee avait demandé à fournir 20 à 30 MW. Nous lui avons imposé ce projet pilote de 1,05 MW pour qu’il nous prouve que sa technologie est viable.» Mootoosamy Naidoo maintient encore une fois que «le CEB a traité ce dossier comme tous les autres, en faisant ce qu’il fallait».

La direction du CEB accède à la requête du Dr Lee pour le renouvellement de son Power Purchase Agreement.

 

Qui a pris la photo qui dérange ?

<p>La publication, en une de l&rsquo;express, d&rsquo;une photo du Dr Soo Song Lee aux côtés de Pravind Jugnauth a provoqué des remous au bureau du Premier ministre, jeudi matin<em>. &laquo;N&rsquo;importe qui peut prendre une photo avec Pravind Jugnauth&raquo;</em>, a répondu Etienne Sinatambou, vendredi, pour défendre son Premier ministre de l&rsquo;embarras que provoque l&rsquo;affaire Choomka. Figurez-vous que la première personne à avoir publié cette photo n&rsquo;est autre que&hellip; Youshreen Choomka elle-même. C&rsquo;était le 30 novembre 2015 sur Facebook. En voici une capture d&rsquo;écran.</p>

<figure class="image"><img alt="" height="485" src="/sites/lexpress/files/images/screenshot_fb_choomka.jpg" width="461" />
	<figcaption></figcaption>
</figure>

<p>Et si c&rsquo;était Youshreen Choomka qui avait pris cette photo après avoir introduit celui qu&rsquo;elle qualifie aujourd&rsquo;hui de <em>&laquo;client</em>&raquo; à Pravind Jugnauth, &laquo;<em>our future Prime minister</em>&raquo;, comme elle l&rsquo;a décrit dans ses chats WhatsApp?</p>

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<h2><strong>Ivan Collendavelloo sollicité </strong></h2>

<p>Est-ce le ministre Ivan Collendavelloo qui a demandé au CEB de s&rsquo;intéresser à ce projet ? En tout cas, le 24 novembre 2015, l&rsquo;IBA a envoyé un e-mail à A. Salabee. Cette femme travaille comme Management Support Officer au ministère des Services publics et agit aussi comme secrétaire confidentielle en l&rsquo;absence de Sunita Nandkishore-Veerasamy. Au-delà de l&rsquo;utilisation du compte <em>&laquo;intnet</em>&raquo; de l&rsquo;IBA, c&rsquo;est une dénommée Valéry, la secrétaire de cet organisme, qui agit comme point de contact. L&rsquo;e-mail commence ainsi : &laquo;<em>Me. Youshreen Choomka, Chairperson of the Independent Broadcasting Authority, would like to request a courtesy meeting with the Hon Minister for Dr. Lee Soo Song (...)&raquo;</em> Nous avons demandé à Ivan Collendavelloo de nous préciser les suites qu&rsquo;il a données à cet e-mail. Le ministre de l&rsquo;Energie ne nous a pas répondu.</p>

<h2><strong>Ultimatum d&rsquo;Earthcore Investment </strong></h2>

<p>Earthcore Investment veut récupérer ses $ 10 000 transférées sur le compte de&nbsp;Youshreen Choomka, le 20 novembre 2015. Cette compagnie ghanéenne dirigée par Jerry Brassfield prétend que c&rsquo;est elle qui a présenté le Dr Soo Song Lee à Youshreen Choomka qui les a court-circuités. Elle demande pour la énième fois à cette dernière de rendre l&rsquo;argent. Earthcore menace en fixant un ultimatum : midi aujourd&rsquo;hui. Sinon, elle alertera la presse ghanéenne, puis la presse internationale sur ce qu&rsquo;elle appelle &laquo;<em>les dessous de l&rsquo;investissement à Maurice&raquo;.</em></p>

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