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Gessiyka Frivet: la dame de fer

18 mai 2017, 23:00

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Gessiyka Frivet: la dame de fer

Depuis l’annonce de la concrétisation du projet Metro Express, Gessiyka Frivet, 39 ans, occupe le devant de la scène. Employée par la compagnie UBS, elle la secrétaire de l’association des travailleurs du transport par autobus veut des garanties qu’il n’y aura pas de suppression d’emplois.

Elle est reconnaissable à son hijab. À 39 ans, Gessiyka Frivet est sur tous les fronts. Secrétaire de l’Association des travailleurs du transport par autobus (voir encadré), cette mère de trois enfants est également la première femme du pays à avoir été nommée Chief Starter et Traffic Officer. C’était en 2015.

Cela fait 14 ans qu’elle travaille au sein de la compagnie United Bus Service (UBS). Elle a démarré comme receveuse d’autobus. «Sa travay-la pa fasil pou enn fam», reconnaît-elle. Au fil des années, raconte Gessiyka, elle a souvent eu affaire à des passagers qui ont tenté de l’intimider parce qu’elle est une femme. Mais, on ne badine pas avec Gessiyka.

Une fois, dit-elle, un passager plutôt costaud ne voulait pas payer son ticket d’autobus. «Madam, mo finn fer lazol mwa», lui avait-il lancé. Elle lui avait répliqué : «Sa létan-la mwasi mo ti pé fer prizon!» Décontenancé, le malotru n’avait pas su quoi répondre. Et avait finalement payé son ticket. Forte de ses nombreuses années d’expérience, Gessiyka explique qu’en fait, tout est dans la manière de se présenter aux passagers et d’interagir avec eux.

Petit à petit, elle a gravi les échelons. Très appréciée par ses collègues et la direction de la compagnie, elle finit par devenir la représentante des employés. Cela fait, en effet, quatre ans qu’elle porte la casquette de syndicaliste. Chaque jeudi, ils sont au maximum une vingtaine d’employés à être convoqués devant un comité disciplinaire. Motif : l’absentéisme. Bien qu’elle défende les intérêts des employés, Gessiyka Frivet admet être souvent d’accord avec la décision du comité envers ceux reconnus coupable d’absentéisme. Car, dit-elle, dans le secteur du transport, cette faute est considérée comme «très grave».

Depuis qu’elle a été nommée Chief Starter, Gessiyka démarre la journée à 4 h 30. L’habitante de St-Pierre doit quitter son domicile à trois heures du matin. «Une voiture passe me récupérer. Je dois être sur mon lieu de travail à quatre heures.»

Une fois sur place, c’est le même casse-tête chinois chaque matin. En tant que Chief Starter, elle doit s’assurer qu’il y ait chaque jour 52 autobus, et 52 chauffeurs, pour desservir les lignes à partie de 16e Mille. «Kasé ranzé rod travayer zot lakaz si absan», lance-t-elle. Elle fait ressortir que rien ne doit causer un décalage dans les horaires des autobus. Ni les chauffeurs et receveurs absents, ni les autobus hors service ou accidentés.

La jeune femme peut compter sur la collaboration d’Anwar Ackbar et de Feroz Janoo, qui font le même travail qu’elle. «Nous sommes une équipe soudée.» L’objectif, poursuit-elle, est de ne pénaliser en aucun cas les passagers.

«Kan travay inn fini klasé», Gessiyka change de casquette. Et devient alors Traffic Officer, ce qui est communément appelé à Maurice «contrôleur». Elle n’est d’ailleurs pas peu fière d’être la première femme à assumer ces fonctions. «Mon rôle consiste à vérifier les tickets d’autobus et voir si les receveurs ont fait correctement leur travail.»

La journée prend fin à 17 heures. Et c’est le même rythme pour Gessiyka de lundi à samedi. Le dimanche, en revanche, elle finit le travail à 14 h 30. N’empêche, lorsqu’elle rentre, la jeune femme ne peut pas pour autant se reposer. Il lui faut alors s’occuper des tâches ménagères et prendre soin de ses trois enfants, dont l’aînée a 20 ans.

«Environ 40 % des emplois supprimés à UBS avec le Metro Express»

«Sak zour mo latet fatigé. Pa koné ki pou arivé…» Ces derniers temps, Gessiyka est préoccupée. Avec le Metro Express, la secrétaire de l’Association des travailleurs du transport par autobus craint des pertes d’emploi dans le secteur. Et notamment au sein d’UBS, dont les autobus desservent la ligne Curepipe-Port-Louis. «C’est une épée de Damoclès sur la tête de tous les travailleurs du transport», fait-elle ressortir.

Avec ce projet, les recettes de la compagnie UBS devraient baisser de 40 % à 50 %. Le calcul est vite fait pour Gessiyka. «Cela signifie qu’environ 40 % des emplois seront supprimés.»

En mars, l’Association des travailleurs du transport par autobus avait organisé une marche pacifique pour demander une réunion avec les autorités concernées. Gessiyka Frivet précise que les employés ne sont pas contre le Metro Express. Ils veulent simplement des garanties qu’il n’y aura pas de licenciements.

Plusieurs correspondances ont été envoyées au bureau du Premier ministre et au ministre des Infrastructures publiques et du Transport en commun, Nando Bodha. Celles-ci sont restées lettre morte. «Pourquoi ce silence envers les salariés du transport ?» se demande Gessiyka Frivet.