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Rose-Belle : La Caverne d’Ali Rajah ou la magie des souvenirs
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Rose-Belle : La Caverne d’Ali Rajah ou la magie des souvenirs
Rien à payer, entrée gratuite pour partir à la découverte. Une Bible du XXIIIe siècle, des boîtes d’allumettes et de cigarettes d’antan. D’autres choses encore. C’est la «Caverne d’Ali Rajah» !
C’est Vishwanee qui nous accueille chez elle, ou plutôt dans le musée qu’elle habite... difficile de choisir entre les deux. Elle nous dira d’emblée que son époux n’est pas présent, mais consent avec plaisir de servir de guide. Pas de ticket d’entrée à payer, c’est gratuit, et la visite commence par le garage. Un fer à lisser qui ne marche pas à l’énergie électrique, de vieilles photos de politiciens et de stars, un vieux projecteur de cinéma, mais surtout une Bedford Perkinson de 1966 tape dans l’œil.
C’est ensuite le musée de la télécommunication d’Ustad Rajah, inauguré le 18 mai, à l’occasion de la Journée mondiale des musées, que l’on découvre. Après 37 ans de vie commune, confie Vishwanee, elle est devenue passionnée, au même titre que son époux. Les débuts n’avaient pas été de la sorte, avoue-t-elle, du fait qu’elle ne s’intéressait pas à la collection de Goorooduth Chuttoo, le magicien.
C’est en quittant le musée que nous apercevons Ustad Rajah. Un livre neuf entre les mains, il explique qu’il revient de la capitale, ayant accompli une importante tâche. Quelques minutes de repos et un verre de jus plus tard, il fait comprendre qu’il venait de rencontrer le ministre des Arts et de la culture, Prithviraj Roopun, à qui il a remis une lettre.
Que contient cette missive ? Le sexagénaire souhaite qu’on lui accorde l’utilisation de l’ancien hôpital de l’établissement sucrier de Rose-Belle, situé près du complexe de l’usine, pour y aménager son musée, sa vie.
Le va-et-vient de son épouse le pousse à parler de sa vie familiale. Sa collection, il l’a bâtie depuis l’adolescence lâche le magicien, mais il n’y aurait pas eu de progrès sans le soutien indéfectible de ses deux fils et de Vishwanee. Sa famille l’a épaulé tout le temps pour l’entretien des objets, l’aménagement de l’espace. C’est tout ce que ses fils auront comme héritage, ajoute-t-il, sa collection étant tout ce qu’il possède.
Il nous entraîne alors parmi ses téléphones et montre fièrement les premiers appareils à avoir fait leur apparition à Maurice. Ceux-ci appartenaient à la force policière et au service postal. Il raccroche celui qu’il avait manipulé pour en manier un autre. Celui-là desservait la station de taxis de Curepipe, fait-il comprendre, et comprenait trois numéros, chacun destiné à un chauffeur de taxi. Ils attendaient ainsi les appels des clients qu’ils allaient récupérer.
Retour dans la maison. Quelle est votre plus vieille pièce de musée, Monsieur le magicien ? Ustad Rajah disparaîtra un moment avant de revenir avec un objet lourd, bien emballé. Le tissu puis le papier enlevés, c’est l’exemplaire d’une Bible de l’Ancien Testament que l’on découvre. Quand a-t-elle été imprimée ? Pas moyen de savoir, même si des notes d’un propriétaire précédent datent de 1783.
L’ancien typist clerk de la force policière confie l’avoir acquise en 1968, puis l’avoir fait restaurer pour la somme de Rs 15 000. Il relate, sourire aux lèvres, comment il avait pris peur en se rendant chez le relieur pour connaître la progression des travaux : les pages de la Bible étaient en train de sécher, une à une.
Après avoir passé en revue les premiers journaux du pays, les boîtes de cigarettes et d’allumettes d’antan, Goorooduth Chuttoo nous présente l’un de ses véhicules : la Bedford Perkinson de 1966 vue plus tôt. Roule-t-elle toujours ? Ustad Rajah sillonne le pays au volant de ce véhicule, qui fait office de musée itinérant. Ces sorties se font à la demande de responsables d’écoles ou d’autres institutions, alors qu’en d’autres occasions, c’est lui qui prend l’initiative d’aller à la rencontre des jeunes générations.
Qu’adviendra-t-il de sa collection ? Il n’a qu’une réponse : il ne la cédera à aucun prix! «Des Japonais m’ont offert Rs 22 millions pour le tout, mais je n’ai pu accepter de vendre ma vie.» Mais qu’elle satisfaction en tire-t-il ?
Pour Ustad Rajah, c’est faire découvrir ce patrimoine aux jeunes, pour qu’ils prennent conscience de la vie qui existait avant leur époque, car chaque objet a une histoire à raconter. Tout ce qu’il souhaite pour l’heure, c’est avoir l’emplacement pour lequel il a fait la demande, pour y installer «sa Caverne d’Ali Rajah».
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