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Gare au surbooking !

4 juin 2017, 23:30

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Gare au surbooking !

Cours de langues étrangères, théâtre, danse, musique, chorale et équitation… Du haut de ses 9 ans, Élodie est très occupée. Du lundi au samedi, «ses journées sont bien organisées pour qu’elle réussisse», dit Sabine. Pour cette conseillère juridique, hors de question que sa fille se repose sur ses lauriers. Au fur et à mesure qu’elle a grandi, la petite fan de Violetta s’est vu imposer un rythme de plus en plus soutenu. «C’est maman qui m’a inscrite à toutes ces activités», affirme Élodie, qui habite à Trou-aux-Biches.

Comme elle, Tanusha court pour respecter un emploi du temps serré. «Lundi, mercredi et vendredi, je vais à la piscine. Mardi et samedi, j’apprends la guitare. Jeudi et samedi matin, je suis à l’école de danse. Et dimanche matin, je monte à cheval.» Cette Curepipienne de 11 ans connaît son programme par cœur vu qu’il a été mis en place quand elle avait 6 ans. Au début, elle y prenait plaisir. Mais ces deux dernières années, les leçons particulières se sont ajoutées trois fois par semaine. C’est devenu pesant.

Si les pédagogues vantent les mérites des activités extrascolaires, les dangers liés à un emploi du temps surchargé sont souvent sous-estimés. Élodie et Tanusha estiment que ces activités sont «pour leur bien» et leurs parents disent «faire leur devoir» en leur offrant une éducation complète et de qualité. Pour eux, l’accumulation des compétences est un gage de réussite future. «Tanusha assure son avenir en étant polyvalente et elle évite l’ennui», soutient Giandev, qui est père célibataire.

Mais un trop plein d’occupations ne rime pas avec réussite. «Cela conduit à la fatigue et au surmenage. Il en résulte notamment un manque d’attention en classe et la baisse des résultats qui va de pair», explique Véronique Wan Hok Chee, psychologue clinicienne. Un planning trop chargé est «très mauvais pour l’enfant, qui fi nit souvent par enchaîner les différentes activités machinalement, uniquement pour faire plaisir à ses parents ou respecter leur volonté», ajoute-t-elle.

Pire, quand la pression devient trop forte sur les épaules de ces petits, ils s’effondrent. Les conséquences peuvent aller, comme chez l’adulte dans le cadre professionnel, jusqu’au burnout, un état d’épuisement nerveux accompagné de symptômes de dépression. La Française Béatrice Millêtre, docteure en psychologie, vient d’écrire un livre sur le sujet, dans lequel elle lance un cri d’alarme à destination des parents (l’ouvrage est disponible sur Internet).

Afin de ne jamais en arriver à ce stade, Véronique Wan Hok Chee rappelle qu’il est crucial que l’enfant ait du temps pour lui. «C’est ce qui lui permettra de se découvrir et de régénérer son cerveau.» Selon elle, deux activités extrascolaires sont suffisantes : «Avec une activité physique et une activité artistique, entrecoupées de sorties en famille, de temps d’échange avec des amis et de moments de détente et de repos, l’enfant acquerra toutes les aptitudes nécessaires et se construira une personnalité solide.»

Puisqu’il faut faire des choix, quelles activités privilégier ? «Soyez surtout attentif au caractère et aux besoins de l’enfant. Notez aussi quelles sont ses failles et ses craintes. Vous pourrez ainsi lui proposer les activités qui lui correspondent», conseille la psychologue, en soulignant que toute discipline sportive ou artistique présente un intérêt. «Le karaté contribue à l’éveil, le théâtre permet de vaincre la timidité et l’équitation est un excellent remède contre l’angoisse», indique-t-elle à titre d’exemples.

Afin d’évaluer son enthousiasme pour une activité, il suffit de l’y accompagner et d’observer sa réaction. «En général, c’est vers l’âge de 4 à 5 ans que l’enfant sait si une discipline lui plaît ou non, précise Véronique Wan Hok Chee. En grandissant, son rythme de pratique augmentera naturellement. Il faudra alors l’entourer pour qu’il puisse équilibrer activités extrascolaires et études.» Mais la pire chose à faire est de lui imposer une activité en fonction de vos propres ambitions de parent. Notre spécialiste insiste bien sur ce point : «L’enfant ne tirera les bénéfices d’une activité que s’il aime la pratiquer.»