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Voyage à Agaléga : une équipe de journalistes écartée à la dernière minute

6 juin 2017, 22:05

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Voyage à Agaléga : une équipe de journalistes écartée à la dernière minute

Depuis avril, l’express a obtenu l’accord de l’Outer Islands Development Corporation (OIDC) pour tourner des séquences vidéo et des interviews dans le cadre d’un documentaire sur Agaléga. Tout était fin prêt pour que notre équipe soit à bord du MV Trochetia qui quitte PortLouis ce samedi 10 juin. Mais hier, le directeur de l’OIDC, Soobee Norungee, nous a appelés pour s’excuser : «J’ai le regret de vous informer qu’il n’y a plus de place sur le bateau.»

«J’invite les journalistes à se rendre à Agaléga», disait Mahen Jhugroo, le ministre des Îles éparses, le 27 avril, lors de ce qui était sa toute première conférence de presse en tant que ministre. Quelques jours plus tôt, avant même cette invitation, l’express avait appelé ce même ministre dans le cadre d’un documentaire actuellement en tournage et pour lequel il aurait fallu des séquences tournées à Agaléga.

À l’époque, Pravind Jugnauth n’avait pas encore annoncé son voyage en Inde et Agaléga n’était pas le sujet sensible qu’il est devenu entre-temps avec le nouvel emprunt indien. «Oui, il n’y a absolument aucun problème. M. Norungee (NdlR, le directeur de l’OIDC) est à mes côtés en ce moment même. Appelez-le et il s’occupera de tout», nous a répondu Mahen Jhugroo. Ce qui a été fait et Soobee Norungee a coopéré au point de nous annoncer que «nous voyagerons ensemble. Nous aurons beaucoup de temps pour discuter».

Pour la forme, l’express formule une demande officielle, le 24 avril, et l’OIDC y répond favorablement tout en imposant certaines conditions sur le tournage. Les échanges téléphoniques, ainsi que les correspondances, se poursuivent jusqu’à la semaine dernière quand l’OIDC nous informe qu’à cause du mauvais temps, le voyage a été décalé d’une semaine.
 

La lettre de «l’express» à l’OIDC le 24 avril.

Le MV Trochetia quittera donc Port-Louis le 10 juin au lieu du 3 juin. Nous insistons aussi pour partager les coûts de déplacement (NdlR, Soobee Norungee voulait que l’OIDC se charge de tout car la compagnie dispose d’un budget pour le voyage des journalistes).

Mais voilà qu’hier, nous recevons un coup de fil de Soobee Norungee. «Il y a beaucoup d’Agaléens qui veulent venir à Maurice. Soixante en tout. Le bateau ne peut quitter Port-Louis avec plus de 40 personnes puisque le bateau ne peut embarquer plus de 100 personnes. Je suis désolé, il faut que je leur donne la priorité.» Nous exprimons notre désaccord :«Mais nous avons votre parole depuis avril et à cinq jours du voyage, vous nous écartez ?»

L’OIDC a informé «l’express» dans un courriel que le voyage a été décalé d’une semaine.

«Je sais, répond-il, mais je vous assure que vous serez du prochain voyage.» Nous lui demandons s’il a reçu des pressions «d’en haut» à cause du débat sur une base militaire indienne sur l’île qui est né entre-temps. «Pas du tout, au contraire, je me ferai taper sur les doigts par le ministre qui vous avait donné la garantie que vous serez du voyage.» Le MV Trochetia quittera donc Port-Louis ce samedi sans qu’aucun journaliste n’ait pu répondre à l’invitation de Mahen Jhugroo. Nos tentatives de joindre ce dernier au téléphone hier ont été vaines.

La troublante lettre sur le tournage des images


Une lettre de censure que l’OIDC dit nous avoir envoyé par erreur.

Cela s’apparente à de la censure. Dans une lettre datée du 2 mai, l’OIDC informe «l’express» que pour tout tournage vidéo, il faut l’accord de la Mauritius Film Development Corporation. La compagnie devra ensuite visionner le reportage pour éviter «qu’il ne démontre une image négative des îles». Après nous avoir envoyés cette lettre, l’OIDC s’est ensuite ravisée. «Ne prenez pas cette lettre en considération. C’est une erreur. Cette règle s’applique uniquement aux productions étrangères», a expliqué Soobee Norungee. À l’époque, «l’express» était bien du voyage.

 

Comment se rendre à Agaléga ?

Pour se rendre à Agaléga il n’y a pas 10 000 moyens. La première option c’est de s’y rendre à bord de l’avion Dornier (moyen qu’a utilisé Mahen Jhugroo et Mahen Seeruttun pour se rendre sur l’île le mois dernier). Mais le Dornier n’est réservé qu’aux personnalités ou aux cas d’extrême urgence. Même Adil Ameer Meeah, député d’Agaléga, n’a pu obtenir une place sur cet avion lors de ce présent mandat. La deuxième option c’est d’affréter un bateau d’au moins 20 mètres. C’est ce qu’a fait la compagnie Water Research Co. Ltd l’année dernière pour effectuer, à la demande des indiens, des tests géotechniques pour la piste d’atterrissage. Mais là, il faut compter au moins Rs 1 million. La dernière option, c’est de trouver une place sur le MV Trochetia. Mais là encore, il faut la permission de l’OIDC car les places sont limitées et surtout pour les arrangements d’hébergement car il n’y a pas d’hôtel ni de maisons d’hôte sur l’île.

Ce que révèlera le documentaire de l’express

Voilà trois mois depuis que l’express prépare ce documentaire sur la souveraineté d’Agaléga. Une partie du reportage a déjà été tourné en Inde en mars dernier avec notamment l’interview d’un ex officiel indien qui dit estimer que l’accord du 11 mars 2015 permet la création d’une base militaire indienne sur Agaléga. Ce documentaire révèlera, avec à l’appui des documents diplomatiques confidentiels, une autre raison de l’intérêt indien sur ces îles. Avec l’annulation de ce voyage, la production réfléchit à présent sur la publication de ce documentaire sans des images d’Agaléga.