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Univers carcéral: le quotidien des bébés nés en prison
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Univers carcéral: le quotidien des bébés nés en prison
Ils ont entre dix mois et quatre ans. Chaque jour, de 9 à 15 heures, ils vont soit à la crèche, soit à l’école maternelle. Le reste du temps, ils sont avec leur maman. Une enfance somme toute normale, à une différence près – ces enfants vivent dans l’univers carcéral.
«Mo pa ti koné mo ansint kan monn vinn dan prizon.» C’est ce que confie d’emblée Angela, la trentaine, que nous avons rencontrée mercredi, à la prison des femmes de Beau-Bassin, à l’occasion de la célébration de la Fête des Mères. Cela fait 19 mois qu’elle est incarcérée à Beau-Bassin. Et dix mois qu’elle y élève son enfant.
Les mêmes yeux foncés, le même nez, le même visage rond. À dix mois, la fille d’Angela lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Un brin rondouillette, elle gazouille de plaisir dans les bras de sa maman. «C’est difficile, très difficile de vivre ici avec un enfant», commente la jeune femme, tandis que les larmes lui montent aux yeux. «Pa gagn okenn léd isi.»
Angela ne s’attendait donc pas à donner naissance en prison. Elle ne s’est rendu compte qu’elle était enceinte que lorsqu’elle a commencé à être constamment malade. D’ailleurs, elle fait remarquer qu’elle n’aurait pas «pran sarz» dans un cas de drogue si elle avait été au courant de sa grossesse.
Changer de vie
«Ce n’était pas facile d’accepter le fait que j’allais avoir un enfant derrière les barreaux. Mais au fur et à mesure que mon ventre grossissait, j’étais heureuse», se rappelle Angela. À la naissance de sa fille, sa mère, a voulu prendre l’enfant à sa charge. Mais Angela a refusé, préférant garder son nouveau-né près d’elle. «Mo zanfan sa. Mo leker dir mwa pa doné», dit-elle. La jeune femme sait aujourd’hui qu’il lui aurait été beaucoup plus difficile de purger sa peine si elle n’avait pas eu son enfant à ses côtés.
«J’ai encore deux garçons, âgés de 11 et 15 ans. Ils habitent tous deux avec ma mère», dit Angela avec tristesse. Ses fils lui manquent car elle ne les voit que très rarement. Ils lui rendent visite, en moyenne, une fois tous les six mois. Quid du père ? «On est marié mais là je suis ici, je ne sais pas si on est toujours ensemble.» Elle n’a pas eu de contact avec lui depuis son incarcération. «Nou ti ansam avan mo vinn dan prizon. Mais ce n’est qu’en sortant d’ici que je saurai», confie la jeune femme en baissant les yeux. Elle compte changer de vie quand elle goûtera de nouveau à la liberté. «Isi mo swiv cour, mo pé aprann enn métié. Quand je sortirai, je vais trouver du travail et m’occuper de mes enfants.»
Angela prend effectivement des cours de couture en prison tous les jours, de 9 à 15 heures, pendant que son bébé est à la crèche. Le reste de la journée est aussi très chargé. La jeune femme se réveille à 4 heures du matin pour écouter des passages de la Bible à la radio. Ensuite elle s’attelle à ses corvées – nettoyer sa chambre, chercher de l’eau pour donner un bain à sa petite, la préparer pour sa journée. Ce n’est que vers 15 h 30 qu’Angela retrouvera l’enfant. Recommence alors la même routine – la laver, jouer avec elle, faire une pause dessin animé avant de la coucher…
<p><strong>«<em>Mon fils, ma force, mon courage…»</em> </strong></p>
<p>«<em>Je suis fière de mon fils. C’est lui ma force et mon courage», </em>confie la maman du petit Manou, trois ans. Le garçonnet est né derrière les barreaux et y a toujours vécu avec sa mère. C’est visiblement un des favoris des gardiennes de prison avec qui il est complètement à l’aise. Depuis quelque temps, il fréquente une école maternelle de la région. Le reste du temps, il le passe avec sa mère. Celle-ci, une ressortissante malgache, a encore cinq ans à purger. Le hic, son fils, à bientôt quatre ans, ne pourra continuer de vivre avec elle. La jeune femme, qui a été condamnée pour une affaire d’importation de drogue, a donc demandé un transfert afin de pouvoir purger sa peine dans son pays natal. «<em>Là-bas, il pourra être avec la famille</em>», dit la jeune femme. </p>
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