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Radhakrishna Sadien : «Le gouvernement oppose les patients aux médecins»

5 août 2017, 11:36

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Radhakrishna Sadien : «Le gouvernement oppose les patients aux médecins»

Le président de la Government Services Employees Association défend les médecins et les pompiers. Ceux-ci sont sous les feux des projecteurs après l’extension du système de rotation dans les hôpitaux et la polémique autour des bâtiments dépourvus de certificat de sécurité incendie.

Après la rencontre ratée entre le ministère de la Santé et les syndicats, est-ce qu’un autre rendez-vous a été fixé pour discuter du «shift System» des médecins ?

 Pas encore. Mais on reste ouvert. Il y a des choses dont Anwar Husnoo n’est pas au courant. Et ce sont ces éléments d’informations qu’on veut lui fournir. Des choses que seules les personnes sur le terrain peuvent savoir. C’est quelqu’un qui est ouvert au dialogue, certes, mais on a de bonnes raisons de croire que des employés de son ministère sont en train de l’induire en erreur.

Pourquoi ne pas l’avoir fait mercredi alors que vous aviez l’occasion de le rencontrer ?

 De l’autre côté, il y avait toute une armée. Et à nous, on disait que seules trois personnes seraient autorisées à assister à cette rencontre. Il y a deux fédérations et on est à cinq personnes. Est-ce de trop ? D’ailleurs, lors des négociations, il doit y avoir une représentation égale. On ne réclame pas cela. Ce qu’on souhaite, c’est que nos cinq membres aient droit à cette rencontre. Et ce n’est pas le seul manque de sérieux du côté du ministère.

Que lui reprochez-vous ?

On avait demandé une copie du rapport réalisé à la suite du projet pilote du Shift System mené aux urgences. Mais on n’a pas voulu nous l’accorder. On voulait en prendre connaissance afin d’y apporter des corrections nécessaires. Or, ce qui se passe maintenant, c’est que le ministère est en train d’opposer les patients aux médecins. C’est une situation malsaine. Si les postes vacants avaient été remplis à temps, il n’y aurait pas eu ce problème aujourd’hui.

D’ailleurs, après la mise en œuvre de ce nouveau système, il y a toujours un manque de personnel. On parle également du paiement des heures supplémentaires dont bénéficiaient ces médecins. Quand il y a un manque de personnel, c’est normal qu’on fasse appel à des gens pour effectuer des heures supplémentaires. Et le travail a été fait. N’oublions pas que beaucoup d’argent gagné sert à payer l’impôt sur le revenu.

Mais, selon le Dr Anwar Husnoo, l’introduction du système de rotation est à l’avantage des patients. Vos commentaires ?

On est en train de faire des calculs mathématiques. Or, la santé des personnes ne se mesure pas de cette façon. Il faut que les patients bénéficient d’un service de qualité. Comment assurer cela si les médecins ne peuvent pas donner le meilleur d’eux-mêmes ?

Quittons l’hôpital pour les casernes des pompiers. Comment avez-vous accueilli le fait que des 1 164 bâtiments publics, seuls 115 soient conformes en matière de sécurité incendie ?

C’est comme si on disait que les voitures du gouvernement n’avaient pas de certificat de fitness. C’est malheureux, car la Fire Safety Division a fait sa part du travail. Il incombe aux propriétaires des bâtiments de faire le nécessaire.

Cependant, avec la décentralisation du gouvernement, ou encore des ministères qui sollicitent la Fire Safety Division pour effectuer des inspections afin qu’ils soient en règle, la situation devrait s’améliorer. Il est important que les ministères prennent conscience qu’il n’y va pas que de la sécurité des fonctionnaires, mais aussi des citoyens qui fréquentent ces lieux. Les ministères vont devoir débloquer les fonds nécessaires.

Quid du fait que certains bâtiments ne détiennent pas de plan, essentiel pour pouvoir procéder à l’inspection en vue de l’octroi du «fire certificate» ?

 Ils vont devoir faire leur demande auprès du drawing office du ministère des Infrastructures publiques. Peut-être que les ministères et départements concernés n’avaient pas trouvé que c’était une priorité. Mais maintenant, il y a un début de prise de conscience. Je connais un ministère qui a fait une demande à la suite de l’éclatement de cette polémique.

Au sein de la «Fire Safety Division», on déplore un manque d’effectif qui retarderait la réglementation des 995 bâtiments non conformes. Qu’en dites-vous ? À vrai dire, il y a un manque d’effectif dans les différents départements. Mais on ne fait pas de recrutement important. Par an, avec le recrutement de 60 à 70 personnes, on n’avance pas beaucoup. Quand les recrues sont réparties à travers les dix casernes de pompiers, il n’y a qu’un ou deux par shift.

Comme on parle de recrutement, récemment, il y a eu des plaintes au sujet de nominations faites par la Public Service Commission (PSC). Quel regard jetez-vous sur la situation ? L’accès à l’emploi est un droit fondamental. Ce n’est pas possible que lors d’un recrutement, la majorité des candidats soient issus d’une même circonscription. Ou encore que les personnes n’aient pas les qualifications requises.

Où est l’indépendance de la PSC ? Il semble qu’il y ait une politisation des nominations. Il faut qu’il y ait de la transparence. La PSC devrait avoir pour directeur une personne indépendante. Pourquoi pas un ancien juge ? À l’image de Paul Lam Shang Leen ou Shirin Aumeeruddy-Cziffra, qui font du beau boulot à la commission d’enquête sur la drogue et au Public Bodies Appeal Tribunal respectivement. Un fonctionnaire ayant travaillé sous un gouvernement peut difficilement exercer indépendamment quand il atterrit à la PSC, alors que ce même gouvernement est en place.

Vous siégez aussi au «board» du National Wage Consultative Council (NWCC). Le montant du salaire minimum sera-t-il bientôt connu ?

 À ce stade, aucun montant n’a été déterminé. Par contre, on a beaucoup avancé dans les discussions. Par exemple, on se penche actuellement sur l’inclusion ou pas du boni de productivité dans le salaire minimum. Personnellement, je suis contre, car ce boni relève du niveau personnel.

Il faut que la population sache que nos mains, en tant que syndicalistes, sont liées. Raison : la NWCC Act mentionne clairement qu’il faut se baser sur le median wage. Le nôtre tourne autour de Rs 11 000. Et n’oublions pas qu’on est à Maurice. Le gouvernement aime bien prendre d’autres pays pour référence... Il faut s’attendre à un modèle étranger adapté à notre contexte. Le gouvernement aurait pu venir avec son chiffre, vu qu’il a déjà établi les paramètres. Mais il veut que ce soit le conseil qui porte le chapeau.