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Élevage de singes: une activité pas si sauvage

26 août 2017, 21:30

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Élevage de singes: une activité pas si sauvage

Nous sommes à Rivière-des-Anguilles, à quelques kilomètres de La Vanille Nature Park. Au milieu des champs de canne se trouvent les locaux de Bioculture Mauritius Ltd, une compagnie qui élève et qui exporte des singes pour la recherche biomédicale depuis les années 80. À première vue, il n’y a pas de cages ni de singes visibles autour de nous. Nos narines ne sont pas non plus titillées par des odeurs désagréables qu’on aurait pu associer à un élevage. Celui-ci se trouverait-il donc ailleurs ?

«Nous avons cinq sites géographiques», explique Nada Padayatchy, l’un des responsables de Bioculture et aussi notre guide. Et l’un de ces sites se trouve non loin, à quelques mètres en contournant de grands arbres endémiques. Mais avant de pouvoir visiter nos amis les bêtes, il faut s’équiper. Masque, gants, filet pour les cheveux, blouse jetable et bottes sont de rigueur.

On peut percevoir les premières cages, en dur et entourées de grillage, avec des volets rabattables en tôle. Des structures sont installées en hauteur afin que les singes puissent y grimper. Les couleurs sont vives, les cages sont surtout très propres. Celles-ci contiennent les breeders, les singes qui constituent les colonies.

«Une colonie consiste de 35 à 40 individus, avec un ou deux mâles», confie Tantely Andrianjazalahatra, primatologue et AnimalWelfare Officer. «Nous essayons de reconstituer ce qu’il y a dans la nature. Donc, il y a un mélange afin d’obtenir une certaine hiérarchie sociale.» Les singes ne sont nullement farouches à l’approche des hommes, habitués au train-train quotidien des employés qui font le va-et-vient toute la journée.

«Nous faisons cinq tournées le jour et quatre la nuit pour nous assurer que tout va bien», indique Nada Padayatchy. Ces tournées, dit-il, sont essentielles pour s’assurer que les singes sont en bonne santé et qu’aucune guenon ne perde ou n’abandonne son bébé.

Si un petit est abandonné, il est transféré dans la pouponnière. Celle-ci est une structure en verre, à l’intérieur d’une structure en béton. Chaque site possède aussi un incubateur, le même qui est utilisé pour les bébés humains. La pouponnière n’est pas accessible à tous, et malgré la protection vestimentaire, les visiteurs doivent encore se désinfecter avant d’entrer à l’intérieur. Lors de notre visite, cinq petits s’y trouvent, blottis les uns contre les autres.

«C’est la période où, en forêt, il n’y a pas de naissance car il n’y a pas assez de nourriture. En captivité, c’est plus une question d’instinct», fait valoir notre guide. Car, chez Bioculture, les singes n’ont pas à lutter pour leur survie. Notamment pour la nourriture. Ils ont droit à des repas constitués d’aliments spéciaux deux fois par jour et des fruits frais trois fois par semaine. Ce régime permet aussi d’allonger le temps de sevrage qui, dans la nature, a lieu à l’âge de six mois.

Tantely Andrianjazalahatra, primatologue et Animal Welfare Officer,
est chargé du bien-être des singes de Bioculture Ltd.

Pouponnière pour bébés abandonnés

Les petits singes quittent leur mère à partir de huit mois, explique notre guide. Mais ils ne sont jamais isolés. Quitte à attendre qu’un deuxième petit atteigne l’âge réglementaire avant de sevrer un plus grand. «Ce sont des animaux très sociaux qui doivent être en groupe à tout moment.» Les petits sont ensuite transférés dans d’autres cages, celles des weaners, très différentes des cages des breeders. Ce, «car les jeunes singes ont des besoins différents. Ils veulent être en hauteur, avoir des structures derrière lesquelles se cacher, avoir de quoi jouer également », explique Nada Padayatchy.

À Bioculture, confie notre guide, on est tout aussi aux petits soins pour les membres plus âgés de la colonie. «Alors que dans la nature, les vieux descendent dans la hiérarchie et doivent lutter pour avoir accès à la nourriture et aux autres conforts, ici, ils sont placés dans des cages gériatriques. Celles-ci sont conçues spécialement pour les besoins des vieux singes.» En effet, la cage gériatrique est moins en hauteur, avec des rampes en pente douce pour faciliter le mouvement des vieilles bêtes.

Mais qu’en est-il des singes destinés à l’exportation ? Pour cela, il faudra changer de site et de cages pour arriver à celles des growers. Les singes qui arrivent sur le site d’exportation sont déjà passés par une présélection, explique Nada Padayatchy. Car chaque singe passepar un suivi vétérinaire. Le centre détient les données de chacun, de la prise de poids à l’épisode de diarrhée en passant par les petites blessures. D’ailleurs, en cas de blessure, les singes sont transférés à la clinique. Que ce soit pour une chirurgie où pour se guérir d’une quelconque infection, c’est là où le singe malade reste sous observation, accompagné d’un congénère pour ne pas être isolé.

Les caisses pour l’exportation sont fabriquées sur le site d’élevage.

Sur le site d’exportation, les singes poursuivent les exercices de familiarisation qui auront débuté dès la cage des weaners. Celle-ci consiste, entre autres, de manger de la main de l’homme. Sur le même site se trouvent aussi des petites cages en métal qui sont utilisées comme intermédiaires entre la cage où logent les singes et celle qui sera utilisée lors du transfert en avion.

Par ailleurs, les caisses pour le transport, faites en bois, sont fabriquées sur place, à l’écart de l’élevage. En attendant leur voyage dans ces caisses, les singes, eux, s’amusent à s’épouiller, ou encore ronger les jouets qui se trouvent dans les grandes cages.