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Noorani Allybocus: Ferblantier et Philosophe

1 septembre 2017, 01:00

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Noorani Allybocus: Ferblantier et Philosophe

C’est là qu’il a passé la plupart de son temps depuis qu’il a quitté l’école. Et il travaille le métal depuis 37 ans déjà. Lui, c’est Noorani Allybocus, le ferblantier.

Noorani Allybocus reçoit des degs des quatrs coins du pays. Sa brosse métallique est l’outil le plus important du travail sur ce récipient.

Sa petite boutique de ferblanterie, sur la route principale de Chemin-Grenier, est ce qu’il a de plus précieux. Parce que c’est l’héritage que lui a laissé son père, Ameen Allybocus. «Mon père était ferblantier lui aussi. C’est de lui que j’ai tout appris quand j’ai quitté l’école à l’âge de 15 ans. Aujourd’hui j’ai 52 ans. Mon père n’est plus de ce monde mais les gens se rappellent toujours ce coin comme l’atelier d’Ameen dada. J’y passe la plupart de mon temps. Ici, j’aime travailler le métal, dans cet atelier j’ai tout fait avec le métal.» 

Son atelier est bourré d’objets, de métaux, de pièces de toutes sortes. Certains objets datent même des années 1960 et ne se trouvent plus sur le marché, mais il les garde. Pour lui, chaque objet a une valeur, soit il les garde comme souvenirs soit lui seul sait que faire de ces objets que nous aurions normalement jetés à la poubelle, ne connaissant pas leur utilité. 

Mais qu’est-ce qui rend son atelier unique ? «On fait de tout ici : des récipients, des moules, des lampes. On répare vraiment tout. On ne refuse jamais un client ; s’il le faut on va souder, coller et river. On nettoie le radiateur des voitures, des récipients comme le deksi et le karay. Je ne refuse jamais un client», répète Noorani avec fièrté.

Sur la terrasse de sa boutique, il dispose des objets en métal pour donner un aperçu de son travail.

L’atelier d’Ameen dada est aussi connu aux quatre coins du pays pour une raison spécifique. Depuis des années, il est le spécialiste du deg. Il répare, fait le recouvrement de ces récipients et accepte aussi des commandes. 

«J’ai des clients qui viennent de partout : Grand-Sable, Quartier-Militaire, Lallmatie et Port-Louis, pour faire réparer leurs degs. Des fois on reçoit même des commandes.» Pour nous faire comprendre ce qu’il fait avec ce récipient incontournable pour la préparation du briani, il accepte de partager ses connaissances. 

«Le deg est fait en cuivre mais on ne peut préparer à manger dans des récipients en cuivre. Il y a des risques d’empoisonnement. Ainsi, je recouvre le deg avec un autre type de métal qu’on appelle calin. Avec le temps ce métal s’use. Je gratte et nettoie le récipient entier avec une brosse métallique avant de le recouvrir avec du calin.»

Patience et Minutie 

Pour Noorani, travailler avec les métaux demande aussi une bonne notion de géométrie et de dessin afin de mettre en place des plans, mesurer, tracer et tailler le métal. La coordination et la connaissance des objets nécessaires pour manipuler les différents types de métaux sont aussi importantes. «Il fait connaître un peu de tout. Comment dessiner, calculer la taille, la largeur des objets, commment faire pour bien les assembler. Bien sûr, on apprend tout cela avec le temps.» 

«Par exemple, si j’ai obtenu une commande de tablette pour un moule à glace, je dois connaître la taille du moule. Ensuite, j’en fais trente et j’assemble le tout sur un support. Ainsi j’ai ma tablette. Je fais aussi des moules pour la pâtisserie. Chaque client vient avec une commande spécifique et à moi de faire le travail. Je fais aussi des moules spécialement pour le poutou.» 

Notre ferblantier poursuit que ce métier lui a aussi appris la patience et la minutie. «Travailler avec patience pour rendre un travail à la satisfaction du client et surtout propre est nécessaire. Les risques de se blesser sont présents, à nous de prendre nos précautions.» 

Si certains métiers perdent de leur valeur, Noorani Allybocus, lui, trouve que la ferblanterie est de plus en plus demandée. Le travail évolue et demande plus de connaissances mais les gens auront toujours recours à ce service. 

«Le travail a bien changé avec le temps. Avant, quand je travaillais avec mon père, la plupart des commandes étaient des lampes à pétrole mais, aujourd’hui, il y a tellement à faire avec le développement. Certes, certains objets ne sont plus en demande mais d’autres demandes y sont toujours. Réparations, nettoyages. 

«Des fois des personnes âgées viennent pour faire réparer d’anciens objets. Elles viennent en espérant pouvoir sauvegarder quelque chose qui leur rappelle une époque de leur vie. Je ne refuse jamais parce que c’est grâce à elles que cet atelier maintient un lien avec une époque qui se perd avec le temps.»