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MBC: Mal-aimée Broadcasting Corporation

10 septembre 2017, 20:30

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 MBC:  Mal-aimée Broadcasting Corporation

Quel avenir pour la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) ? L’alliance Lepep nourrissait l’ambition de la transformer. En 2015, il aurait même été question de recruter un étranger pour revoir l’administration. Ainsi qu’un Mauricien ayant une expérience des médias, qui aurait été chargé de veiller à ce que l’information soit traitée de manière impartiale.

Sauf que deux ans après, la situation au sein de la rédaction n’a pas évolué. Et les récentes suspension et réintégration du directeur général, Meckraj Baldowa, ainsi que la mise à pied du directeur de l’information par intérim, Jugdish Jatoo, soulèvent de nouvelles interrogations concernant la radiotélévision nationale.

Pour Jugdish Joypaul, ancien directeur de l’information, cette situation au sein de la radiotélévision nationale démontre que celle-ci a fait plusieurs pas en arrière, surtout dans l’opinion publique. Il est d’avis que si la MBC ne revoit pas ses objectifs, elle va précipiter sa chute.

Jugdish Joypaul souligne que selon la MBC Act, celle-ci doit être une institution impartiale avec des objectifs bien définis : informer, éduquer et distraire. Elle doit pouvoir être autonome pour qu’il y ait de l’information objective.

Ainsi, tous les politiciens, les ONG, les syndicats et l’opposition, par exemple, doivent avoir un temps d’antenne équitable, ajoute-t-il. Il se souvient que lorsqu’il était à la MBC dans les années 90, les journalistes prenaient sur eux pour véhiculer les informations. Hormis les journaux télévisés, il y avait aussi des débats qui encourageaient la population à réfléchir sur des sujets divers.

Par exemple, les samedis il y avait l’émission Peak Time Magazine à la radio. «Mais aujourd’hui, constate Jugdish Joypaul, il manque ce genre d’émissions.» Il évoque la «mainmise» des différents gouvernements qui se sont succédé. «Là, les journalistes ont un rôle à jouer et à faire comprendre qu’ils ont le devoir d’informer la population», fait-il valoir. «Le bulletin, aujourd’hui, n’est pas crédible et provoque un phénomène de rejet», ajoute l’ancien directeur de l’information.

En 1999, confie-t-il, malgré les directives des anciens ministres, les journalistes avaient pris sur eux pour rassembler tout le monde et calmer le jeu. De nos jours, avec Internet, les gens sont mieux informés de ce qui se passe dans le pays. Ils peuvent suivre l’information à la radio, sur les réseaux sociaux, sur les sites d’information.

Ancienne News Editor à la MBC, Arabella Seebaluck déclare, pour sa part, n’avoir jamais vu les choses se faire «différemment».

Relations personnelles

«Chaque gouvernement y installe son petit manège personnel depuis que la MBC existe, et cela ne fait qu’empirer», laisse-t-elle entendre. «Je suis une enfant de la MBC, mon père y ayant fait carrière et ayant moi-même servi presque une décennie au sein de cet établissement. » En poste de 2001 à 2009, elle ajoute qu’elle a personnellement connu quatre directeurs et autant de rédacteurs en chef. Quant à la rédaction, il aurait toujours été question de relations personnelles pour avancer.

«J’ai vu bon nombre de journalistes de calibre se retirer par exaspération du manque de clarté et de méritocratie dans les affaires de la MBC. Tous ceux qui y ont une expérience quelconque pourraient le confirmer. On n’a pas besoin d’aller au PMO pour établir la connexion avec le gouvernement», dit, sans détour, Arabella Seebaluck. «Il n’y a qu’à voir les compétences de la ‘vitrine’ de la radiotélévision nationale pour comprendre ! Pas besoin que le patron de la communication gouvernementale s’immisce, que le directeur soit mis à la porte ou qu’un journaliste soit muté aux îles éparses… Le boulot s’est toujours fait de l’intérieur !» lance l’ancienne journaliste. Elle déclare qu’elle n’est pas étonnée de voir une telle situation à la MBC. «Est-ce que ce qui se passe à Moka, aujourd’hui, m’étonne ? Qu’un directeur général doive s’éclipser ou qu’un rédacteur en chef claque la porte ? Pas du tout. Quand le manège en question ne marche plus... on ne fait que le remplacer. Mais des sujets restent en interne pour assurer les arrières, toujours !» Selon Arabella Seebaluck, il faudrait privatiser la MBC pour qu’il y ait un vrai changement.

«Rod bout»

Pour un ancien journaliste qui a passé 15 ans à la MBC et qui a souhaité garder l’anonymat, la détérioration de la station de radiotélévision nationale dure depuis dix ans. Ce dernier affirme qu’hormis la raison politique, la MBC se retrouve dans cet état, car elle n’a jamais eu de plan directeur. «Il n’y a jamais eu de vision commune pour la MBC», fait-il ressortir. «Sakenn rod so bout ek lager pou so bout parski MBC pou tou dimounn. Éna mem group sosiokiltirel in al dévan Equal Opportunities Commission parski li pa ti gagn mem tan dantenn ki enn lot group», se rappelle l’ancien journaliste.

Par ailleurs, la qualité des images a également beaucoup détérioré, ajoute-t-il. «La dernière fois que des équipements ont été achetés, c’était il y a dix ans.» Selon lui, il y a un désordre à tous les niveaux, même au niveau du recrutement. «La MBC doit être harmonisée, il doit y avoir un plan directeur, un plan financier, le système de programmation doit être revu, le marketing aussi», préconise notre interlocuteur.

Quant au directeur, il doit pouvoir maîtriser les finances, comprendre l’information, avoir un plan pour toutes les chaînes, revoir les contenus. «Il doit aussi pouvoir dire non aussi à des ministres», conclut l’ancien journaliste.

Le micro-trottoir

Elodie Dindoyal, Vacoas

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<p>&laquo;Il n&rsquo;y a rien à la MBC qui m&rsquo;interpelle comme jeune. Je ne la regarde pas. Il n&rsquo;y a rien de frais ou de nouveau. Mais je pense que pour les gens qui dépendent de la chaîne locale pour être informés, il faut qu&rsquo;il y ait plus de transparence. Après la tension à Résidence Barkly et La Butte, la chaîne locale aurait dû faire comme toute la presse et diffuser ce qui se passe. Imaginez si une chaîne étrangère avait couvert l&rsquo;événement. Ça aurait été une honte.&raquo;</p>

Bruno Agathe, Riche-Terre

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<p>&laquo;La MBC ne m&rsquo;intéresse pas. C&rsquo;est une perte de temps. Je ne comprends pas pourquoi les gens continuent à regarder un JT qui est loin d&rsquo;être fiable. Les événements récents ne sont ni les premiers ni les derniers. Parce que la MBC est contrôlée par le gouvernement. Certaines informations ne sont pas diffusées si elles comportent un risque pour les dirigeants.&raquo;</p>

Sheriff Sakur, Port-Louis

<div><img alt="" height="200" src="/sites/lexpress/files/images/sheriff-sakur.jpg" width="200" /><br />
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<p>&laquo;Je ne regarde plus la MBC depuis longtemps. À chaque fois, on diffuse la même chose. Par moments, lors du dîner, je regarde le journal télévisé. Mais c&rsquo;est une perte de temps. On n&rsquo;apprend rien de nouveau. Avant, on donnait plus d&rsquo;informations sur l&rsquo;actualité à l&rsquo;extérieur, mais maintenant, plus rien. De toute façon, même l&rsquo;actualité locale est censurée. C&rsquo;est pour cette raison que les gens se tournent vers d&rsquo;autres chaînes ou Internet.&raquo;</p>

Abraham José, Beau-Bassin

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<p>&laquo;Je la qualifie d&rsquo;inutile. Il y a tellement de problèmes et de fléaux dans le pays, mais la MBC ne montre rien. Les responsables pensent qu&rsquo;en diffusant uniquement des images des ministres, ils pourront duper les gens. Heureusement que certaines personnes ont la capacité de poser des questions. Mais c&rsquo;est vrai qu&rsquo;il y a une partie de la population qui n&rsquo;a que la MBC à la maison. Ils sont influencés. La MBC n&rsquo;appartient pas au public, mais plutôt au gouvernement. Elle change de propriétaire avec l&rsquo;arrivée d&rsquo;un nouveau régime.&raquo;</p>

Annabelle Fortuno, Albion

<div><img alt="" height="200" src="/sites/lexpress/files/images/annabelle-fortuno.jpg" width="200" /><br />
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<p>&laquo;J&rsquo;ai l&rsquo;impression qu&rsquo;ils ferment les yeux sur les vrais problèmes à Maurice. On ne voit que des choses sans importance au JT. Il y a d&rsquo;autres problèmes qu&rsquo;il faut couvrir, comme la pauvreté, la hausse de la criminalité, entre autres. Si on prend l&rsquo;exemple de ce qui s&rsquo;est passé à Barkly et La Butte, en tant que télé publique, la MBC aurait dû lancer des débats autour du Metro Express au lieu de faire la comm&rsquo; des ministres. Il faut montrer la vie réelle.&raquo;</p>