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Blanchiment d’argent soupçonné: chronologie de l’affaire Yerrigadoo

13 septembre 2017, 09:00

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Blanchiment d’argent soupçonné: chronologie de l’affaire Yerrigadoo

Devant la tonne d’informations autour de l’affaire Yerrigadoo, il est facile de s’emmêler les pinceaux et de s’y perdre. Voici en dix points, simplement expliqués, ce que vous devez comprendre.

1. La Genèse. Husein Abdool Rahim, parieur professionnel, rencontre Sylvio Sundanum, manager à Dry Cleaning, à la salle de sport en novembre 2016. Les deux hommes deviennent des amis et Husein Abdool Rahim lui explique qu’il n’arrive pas à toucher ses gains sur bet365 car il traîne une affaire d’escroquerie. Sylvio Sundanum lui promet son aide. En retour, affirme Husein Abdool Rahim, il doit aider à mettre des «undeclared funds» sur le circuit en abusant du site de jeux en ligne.

2. La rencontre avec Yerrigadoo. Par l’entremise de Sylvio Sundanum, qui est l’ami de Ravi Yerrigadoo, Husein Abdool Rahim rencontre l’Attorney General à son bureau pour la première fois, le 14 février 2017. Les deux hommes commencent à échanger des messages via WhatsApp. Husein Abdool Rahim envoie alors ses relevés de comptes bancaires et des captures d’écran de bet365 à Ravi Yerrigadoo. Il rencontrera ce dernier une demi-douzaine de fois.

3. Le plan. Husein Abdool Rahim affirme que Ravi Yerrigadoo, Sylvio Sundanum et Dick Kwan Tat, un avocat financier, ami de l’Attorney General, auraient décidé de monter une structure pour légitimiser les «undeclared funds» de Sylvio Sundanum.

4. Les «clean bets». Pour comprendre le plan, il faut savoir comment un joueur «clean» mise et touche ses gains. Cela se fait à travers des cartes prépayées, un service offert par plusieurs banques nationales et internationales. Une prepaid card, c’est une carte où un client d’une banque transfère de l’argent. Il peut par la suite l’utiliser pour faire des transactions en ligne, des achats à des points de vente en magasin ou même des retraits bancaires à des ATM, sans que ces opérations n’apparaissent sur le relevé de son compte principal. Le chemin inverse est aussi possible. Ainsi, il peut demander à bet365 de le payer sur sa carte prépayée (cash out) et procéder aux retraits à un ATM. Pour tout cash out, bet365 envoie un reçu électronique à son client. Reçu qui peut évidemment servir de «proof of fund» quand l’argent retiré des ATM doit être versé dans des banques.

5. Le modus operandi. Husein Abdool Rahim ouvre un compte au nom de Sylvio Sundanum sur bet365 pour environ 10 000 euros. Le parieur, lui, a déjà le sien que Sylvio Sundanum crédite d’environ  10 000 euros aussi. L’idée des protagonistes : générer des activités «clean» sur bet365 pour familiariser des banques suisses et dubaïotes – où les deux hommes devront ouvrir des comptes – à leurs versements «clean».

6. Le modus operandi (ii). La partie 5 n’est évidemment pas suffisante pour blanchir de l’argent, mais elle fait partie de la structure. Une fois les banques suisses et dubaïotes sont habituées aux transactions de ces clients précis, la bande aura recours à de faux reçus de bet365. Munis de ces faux reçus et d’une lettre signée et estampillée par l’Attorney General, et devenus des clients habituels pour des versements «clean», ils espèrent que les banques suisses et dubaïotes accepteraient leurs versements.

7. Le rôle de Yerrigadoo. Husein Abdool Rahim jure sous serment que c’est Ravi Yerrigadoo qui a écrit les notes où le modus operandi est expliqué sur papier. Mais il n’aurait pas fait que ça. Il aurait aussi signé et estampillé du tampon de son bureau une lettre à qui de droit que Husein Abdool Rahim est «clean» et que les versements de ses gains de bet365 doivent être acceptés. Il aide aussi Husein Abdool Rahim à demander un variation order à la cour. Ordre qui lève temporairement son objection to departure. Il allègue aussi que Ravi Yerrigadoo lui a même permis d’avoir accès à son passeport alors que celui-ci était «locked up» au Passport and Immigration Office. Dans une des annexes, il envoie la photo de ce passeport via WhatsApp à Ravi Yerrigadoo.

8. En Suisse. Sylvio Sundanum, Dick Kwan Tat et Husein Abdool Rahim se rendent ensemble à Dubaï et en Suisse, en mars 2017. Selon l’affidavit de Husein Abdool Rahim, il s’est rendu en Suisse bien que son variation order se limitait à la France, l’Angleterre et Dubaï. Et ce, dit-il, «sous les instructions de Ravi Yerrigadoo». Là-bas, un banquier lui aurait souhaité la bienvenue en disant : «Ravi m’a parlé, venez.» Sauf que ce banquier se rend compte que Husein Abdool Rahim est en situation irrégulière dans le pays. Il refuse d’ouvrir un compte en son nom et déclare : «J’ai dit à Ravi de ne pas prendre de tels risques. C’est dangereux.»

9. Pourquoi ça a foiré. L’étape 8 n’était pas un problème. Ils allaient refaire le voyage, les billets avaient déjà été payés. Mais une dispute aurait éclaté lorsque Sylvio Sundanum se rend compte que l’argent sur bet365 (étape 5) est épuisé. Il aurait accusé Husein Abdool Rahim de lui avoir volé cet argent et il lui aurait demandé de le rembourser.

10. Pourquoi il fait son coming out. Husein Abdool Rahim décide de tout balancer quand Sylvio Sundanum le «menace». Il raconte, dans son affidavit, que ce dernier lui aurait même fait rencontrer, au bureau de Ravi Yerrigadoo, à Port-Louis, l’inspecteur Robin Bundhoo de la Cybercrime Unit. Ce dernier aurait menacé de le coincer sur l’affaire des faux reçus (étape 6).

Le soutien de «l’express» à Husein Abdool Rahim

<p>Dans son interview en live hier, Husein Abdool Rahim a remercié <em>&laquo;l&rsquo;express&raquo; </em>pour son &laquo;soutien&raquo;. Ce soutien à un whistle-blower, nous l&rsquo;assumons avec fierté. Husein Abdool Rahim est venu nous voir, à <em>&laquo;l&rsquo;express&raquo;</em>, car il craignait pour sa sécurité. Après l&rsquo;avoir écouté, vu ses documents et son téléphone et compris qu&rsquo;il y a trop d&rsquo;évidences pour qu&rsquo;il ne soit qu&rsquo;un menteur ou un mythomane, nous avons décidé qu&rsquo;il fallait que son histoire soit publiée dans l&rsquo;intérêt public. Durant ces derniers jours, nous lui avons donné tout le support nécessaire et encouragé à parler de ce qui est, à nos yeux, un véritable scandale que le public devrait connaître.</p>