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Révision des traités économiques: Maurice moins attrayant, l’emploi en difficulté

5 octobre 2017, 23:16

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Révision des traités économiques: Maurice moins attrayant, l’emploi en difficulté

Le secteur des services financiers est inquiet. «Nous voyons déjà qu’il y a moins de requêtes des investisseurs vers l’Inde. Nous avons peur que dans cinq ans, nous n’ayons plus de job», souligne un jeune employé d’une Management Company. Maurice démarre des négociations avec 19 pays afin de se conformer aux nouvelles règles imposées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Cette réforme concerne les traités de non double imposition (Double Taxation Avoidance Agreements - DTAA).

Pour le pays, un premier cap a déjà été franchi en mai 2016 avec la signature d’un nouveau traité avec l’Inde comportant des clauses moins favorables. La mies en place des nouvelles règles de l’OCDE provoque l’appréhension des jeunes professionnels du domaine financier. Selon eux, ces changements drastiques pourraient rendre Maurice moins attrayant aux investisseurs et impacter beaucoup d’emplois. Ce risque de pertes d’emplois est confirmé par les parties prenantes. Toutefois, ils soutiennent que Maurice a encore des cartes à jouer

«Maurice n’est plus attrayant. Avant, les clients ne payaient presque pas de taxe ici. Mais maintenant, qu’avons-nous de plus qu’un autre pays ?», s’inquiète ce Senior Client Executive de 28 ans dont la compagnie est basée à Baie-du-Tombeau. Il argue que la signature du nouveau DTAA voudrait dire une clientèle moins affluente de l’Inde.

Des propos que rejoignent plusieurs jeunes du domaine. «En plus, avant, l’offshore, c’était la confidentialité. Maintenant, beaucoup de gens fortunés ne voient plus Maurice comme une plateforme offshore idéale. Il y aura des clients, mais moins qu’avant», soutient le directeur d’opération d’une boîte de Global Business.

Pour Kamal Hawabhay, Managing Director de Global Wealth Management Services Ltd et ancien Chairman de l’Association of Trust and Management Companies (ATMC), le risque de perte d’emplois est bien réel et non négligeable. D’ailleurs, il fait déjà ressortir que le nombre de queries de clients potentiels a déjà baissé depuis la signature du DTAA avec l’Inde. «Tous les clients ne vont pas claquer la porte du jour au lendemain. Ce n’est qu’en avril 2019 que les mesures entrent pleinement en vigueur et c’est là que l’impact se verra.»

Meilleure infrastructure

Kamal Hawabhay se demande surtout si les investisseurs vont choisir Maurice alors que d’autres pays offrent les mêmes conditions, avec une meilleure infrastructure. «Les changements affectent Singapour aussi. Mais là-bas, l’infrastructure est beaucoup plus appropriée. Que choisiront les investisseurs ?», se demande-t-il.

En sus, le Managing Director de Global Wealth Management Services Ltd indique qu’avec la mise en vigueur des nouvelles règles de l’OCDE, il n’est pas certains que les entreprises déjà à Maurice continuent à bénéficier des conditions pour lesquelles elles ont décidé de s’implanter. «Nous avons 43 traités. Nous avons réussi à obtenir des négociations pour 19 de ces traités. Il se peut que pour ces 19 pays, les entreprises déjà implantées continuent à bénéficier des “anciennes”conditions. Mais pour le reste des traités, et si les négociations n’aboutissent pas pour les 19 pays en question, il y a un énorme risque que les compagnies présentes ferment boutique», affirme Kamal Hawabhay.

Assad Abdullatiff, le Chairman de l’ATMC, est plus optimiste. «Concernant les échanges d’information, bien sûr qu’il y a une clientèle qui ne voudra pas de cette plus grande transparence. C’est valable surtout dans le cas où ces clients viennent de pays où les kidnappings sont fréquents. Pour cela, ils souhaiteront garder leurs actifs confidentiels. Mais ce ne sera qu’une petite minorité.» Mais surtout, il ne veut pas s’avancer à prédire des pertes d’emplois avant que les renégociations bilatérales avec les 19 pays n’aient abouties. En sus, Assad Abdullatiff affirme que les changements viennent aussi avec d’autres opportunités de services.

Ce point est également soulevé par Wasoudeo Balloo, Tax Partner chez KPMG. «Si nos services n’évoluent pas, il faudra s’inquiéter», lâche-t-il. En effet, avec les changements qui surviennent dans le secteur des services financiers, l’administration ne suffira plus, déplore Wasoudeo Balloo.

«Avant, les sociétés qui étaient à Maurice n’étaient qu’incorporées et faisaient de l’administration pour bénéficier de la non-double imposition. Mais maintenant, il faudra être actif», fait-il ressortir. D’ailleurs, il est d’avis que les jeunes se forment pour pouvoir pallier ce besoin. Quels sont, donc, les métiers d’avenir dans le secteur des services financiers ? «Les traders, conseillers fiscaux internationaux, le treasury management…»